Une plateforme audio pour apprendre l’origine de toponymes du Nunavik, dans le Nord québécois

Avec l’aide l’Institut culturel Avataq, à Montréal, la Commission de toponymie du Québec a mis sur pied une plateforme numérique de toponymes du Nunavik, la région la plus septentrionale de la province. (Photo : Institut culturel Avataq)
Lacs, rivières, îles, baies, montagnes… Des toponymes du Nunavik, la région inuit du Nord québécois, sont maintenant regroupés au sein d’une plateforme audio visant à faire connaître leur prononciation et leur signification en langue inuit.

« Traditionnellement, les toponymes inuit sont utilisés depuis plusieurs générations [par des] Inuit qui s’en servaient comme points de référence quand ils vivaient sur le territoire avant de devenir sédentaires », explique l’agent d’information pour l’Institut culturel Avataq, Nicolas Pirti-Duplessis, que l’on peut entendre sur les fichiers sonores.

La Commission de toponymie du Québec, l’organisme public responsable de la gestion des noms de lieux du Québec, a ajouté mardi 125 fichiers audio en inuktitut, un dialecte de la langue inuit, à sa Banque de noms de lieux du Québec.

Selon le directeur et secrétaire de la Commission de toponymie du Québec, Fabrice Gagnon, la plateforme s’adresse autant à des Inuit qui souhaitent connaître la graphie de toponymes en alphabet romain qu’à des non-Inuit qui veulent comprendre l’origine de lieux en inuktitut. « On voulait donner la chance aux Québécois d’entendre ces noms qui font partie du trésor toponymique du Québec », affirme-t-il.

« Ça nous [procure] une certaine fierté de voir que finalement notre langue est reconnue », soutient pour sa part Nicolas Pirti-Duplessis, qui est originaire d’Akulivik, sur la baie d’Hudson.

Nicolas Pirti-Duplessis, un Inuk originaire d’Akulivik, sur la baie d’Hudson, a collaboré avec la Commission de toponymie du Québec pour valider les noms de plusieurs lieux du Nunavik. (Photo : Institut culturel Avataq)
Retrouver les noms traditionnels

Les toponymes concernent des lieux qui ne disposaient pas auparavant de noms officiels. « Il y a énormément de lacs au Québec qui n’ont toujours pas de noms », souligne Fabrice Gagnon.

« On donne [aux toponymes] un caractère de protection juridique pour qu’ils se retrouvent aussi affichés sur les cartes officielles du gouvernement, indique-t-il. Mais avant, on voulait s’assurer qu’on avait la graphie et la signification exactes. »

La plateforme est le fruit d’une collaboration avec l’Institut culturel Avataq, à Montréal, qui documentait déjà depuis plusieurs dizaines d’années les toponymes traditionnels inuit du Nunavik.

Ces noms de lieux ont été transmis par voie orale d’une génération à une autre et s’appuient sur les connaissances traditionnelles inuit.

Certains font référence à une particularité de l’environnement, tandis que d’autres renseignaient auparavant sur l’abondance d’espèces animales. D’autres encore relèvent davantage de l’imaginaire et des émotions, comme le lac Tatamivvik, qui signifie « l’endroit pour être bouleversé ».

La plateforme regroupe entre autres des toponymes de lacs, de rivières, de montagnes et de collines qui ne disposaient pas officiellement de noms. (Matisse Harvey/Regard sur l’Arctique)
Mise en mémoire

Nicolas Pirti-Duplessis explique avoir contribué à valider les noms de lieux auprès de la Commission de toponymie du Québec, en plus d’enregistrer leur prononciation. « On les a aidés à vérifier qu’ils étaient bien écrits, qu’il n’y avait pas d’erreurs et qu’ils étaient situés au bon endroit », affirme-t-il.

Les instigateurs du projet se sont notamment appuyés sur différents documents d’archives collectés au fil des ans, dont des entrevues effectuées auprès d’aînés de la région et des recherches menées par les anthropologues Ludger Müller-Wille et Bernard Saladin D’Anglure.

« Pour l’instant, on a validé 214 toponymes avec la Commission de la toponymie du Québec et on en a enregistré 125 sous forme audio. C’est un « work in progress ». »

Nicolas Pirti-Duplessis, agent d’information pour l’Institut culturel Avataq

L’inuktitut compte environ 39 770 locuteurs au Canada, dont 65 % habitent dans le territoire nordique du Nunavut et 30,8 % au Québec, selon le recensement de 2016. Le dialecte présente toutefois plusieurs nuances d’une région à une autre du pays.

Au Nunavik, Nicolas Pirti-Duplessis explique avoir dû composer avec les différences d’accents, voire parfois de mots, qui séparent les locuteurs de l’est et de l’ouest de la région.

Il cite l’exemple des termes « isiuralittaq » et « nutillilik » – qui signifient « il y a de l’omble chevalier » en inuktitut – employés respectivement par des Inuit de la baie d’Hudson et de la baie d’Ungava.

À terme, la Commission de toponymie du Québec souhaiterait lancer des plateformes similaires pour d’autres langues autochtones, dont certaines sont aujourd’hui menacées ou éteintes. « Je pense que là, ça va justement devenir intéressant pour les gens des communautés », croit-il, en donnant l’exemple de la langue huronne-wendat.

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