Élections au Canada : bilan « décevant », selon des organisations de femmes autochtones

L’une des photos de la campagne. On peut y voir Sarah Birmingham, la mère de Mary Ann Birmingham, tuée en 1986. (Nadya Kwandibens/ENFFADA)

Promesse phare des libéraux aux Autochtones, la tenue de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées (ENFFADA) a suscité l’espoir.

« Sur la question des femmes autochtones disparues et assassinées, ce gouvernement a donné des résultats décevants », n’hésite pas à dire Lynne Groulx, la directrice générale de l’Association des femmes autochtones du Canada (AFAC).

« Ils ont tenu leur promesse de faire une enquête nationale, mais leur échec se situe dans l’implantation des recommandations de cette enquête », explique-t-elle.

Nous avions de très hautes attentes, nous ne pouvons alors qu’être déçues.Lynne Groulx, directrice générale de l'AFAC

« Pour les femmes autochtones, ça constitue bel et bien un enjeu électoral, poursuit Mme Groulx. Les femmes autochtones qui sont sur le terrain vont juger le gouvernement sur les actions qu’il a prises pour contrer le génocide. »

Le constat est similaire du côté de Femmes autochtones du Québec (FAQ).

« Nous n’avons pas eu d’actions concrètes de ce gouvernement-là », avait affirmé la présidente Viviane Michel à Espaces autochtones en juin.

Un plan d’action qui laisse perplexe

L’élaboration d’un plan d’action national par Ottawa faisait partie des 231 recommandations de l’ENFFADA.

Ce plan a été dévoilé en juin dernier avec un an de retard.

Selon Lynne Groulx de l’AFAC, la machine gouvernementale est aux prises avec une bureaucratie inefficace qui ne permet pas de mettre en œuvre des changements tangibles et rapides.

Lynne Groulx et quelques-unes des trousses prêtes à être envoyées. (Photo : Association des femmes autochtones du Canada)

« Ce n’est pas nouveau, c’est la même chose avec la Commission de vérité et réconciliation. Mais les gens dans nos communautés, les familles, sont fatigués d’attendre que les promesses des gouvernements soient tenues », dit-elle.

En plus d’un fonctionnement inefficace, l’AFAC, qui a d’ailleurs présenté son propre plan d’action, déplore de ne pas avoir été invitée à contribuer à celui du gouvernement.

« Nous sommes la plus grande organisation de femmes autochtones au pays et nous n’avons reçu aucun appel pour y contribuer », soutient Mme Groulx.

Pour sa part, Viviane Michel avait souligné que le plan d’action du fédéral ne reconnaît pas le génocide des femmes autochtones, qui est pourtant la conclusion clé de l’Enquête nationale.

Des familles qui attendent justice

« La bureaucratie ralentit les processus, ce qui crée des retards et, pendant ce temps, des femmes continuent de disparaître et d’être tuées. Le génocide continue, déplore Mme Groulx. Les familles des femmes et des filles disparues et assassinées attendent que justice soit rendue. »

L’AFAC tient par ailleurs une banque de données sur les femmes disparues et assassinées.

Selon leurs données, les femmes et les filles autochtones constituent 10 % de tous les cas de féminicide au pays, alors qu’elles ne représentent que 3 % de la population féminine du Canada.

Par ailleurs, les informations de l’AFAC révèlent que près de la moitié des cas de meurtre de femmes autochtones demeurent non résolus.

La Gendarmerie royale du Canada (GRC) dénombrait, en 2014, 1017 homicides et 164 disparitions de femmes et de filles autochtones entre 1980 et 2012. Il s’agit, pour des organisations, dont l’ENFFADA, d’une sous-estimation.

Face à de tels chiffres, rien ne justifie l’inaction, considère Lynne Groulx.

Du financement

Le 12 août, la ministre des Relations Couronne-Autochtones, Carolyn Bennett, a fait une annonce pour rappeler les 182 millions de dollars prévus au budget afin de financer des initiatives liées aux femmes disparues.

Dans le contexte de la campagne électorale, cette annonce est accueillie avec prudence par les femmes élues de l’Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador (APNQL).

« Le Conseil des Femmes élues de l’APNQL s’assurera que tous les partis politiques, toutes les personnes qui aspirent à devenir membres du Parlement du Canada ne viennent en rien compromettre la réconciliation et la réparation qui s’imposent suite aux drames vécus par les femmes et les filles autochtones et leurs familles et descendants », peut-on lire dans un communiqué paru mardi.

Inciter les femmes autochtones à voter

L’AFAC compte lancer une campagne afin d’inciter les femmes autochtones à exercer leur droit de vote.

L’organisation produira notamment un guide qui contiendra des évaluations des programmes des partis fédéraux.

« Nous voulons que ce soit historique, que les femmes autochtones se mobilisent pour aller voter massivement pour faire entendre leurs voix », affirme Lynne Groulx.

À lire aussi :

Gabrielle Paul, Radio-Canada

Pour d’autres nouvelles sur les Autochtones au Canada, visitez le site d’Espaces autochtones.

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