Des Inuit du Canada font entendre leur voix à la COP26 en Écosse

L’Arctique se réchauffe deux fois plus vite que le reste du monde, et cela a des effets irréversibles sur les glaces. (David Goldman/Associated Press)
Les dirigeants inuit sont préoccupés par les changements climatiques. Les communautés de l’Inuit Nunangat, la « terre natale » en inuktitut, subissent d’ailleurs des effets disproportionnés du réchauffement du climat.

Le dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), publié en août, prévoit des phénomènes météorologiques extrêmes dans les prochaines décennies, avec l’augmentation des températures mondiales.

L’Arctique se réchauffe deux fois plus vite que le reste du monde, et cette tendance devrait se poursuivre. Des changements importants et irréversibles de la glace et du niveau des mers sont à prévoir.

Réunis à Glasgow, en Écosse, pour la COP26 (ou Conférence des parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques), des dirigeants du monde entier doivent s’entendre sur l’action à venir.

Pour s’assurer que ces dirigeants ne perdent pas de vue l’Arctique, une délégation dirigée par le Conseil circumpolaire inuit (CCI) s’unit pour parler d’une seule voix, mais ce sont les expériences uniques et individuelles des délégués qui font passer leur message.

Rosanna Deerchild, animatrice de l’émission Unreserved à CBC, s’est entretenue avec trois dirigeants inuit au sujet de la situation dans leurs communautés, qu’ils ont à l’esprit pendant les négociations de la COP26.

Natan Obed est un Inuk de la communauté Tuktoyaktuk, dans les Territoires du Nord-Ouest. (Kate Kyle/Radio-Canada)
Natan Obed

Communauté : Tuktoyaktuk, région désignée des Inuvialuit, Territoires du Nord-Ouest

Natan Obed est le président d’Inuit Tapiriit Kanatami, l’organisation qui représente 65 000 Inuit au Canada.

« Je pense à Tuktoyaktuk, qui se trouve dans la région désignée des Inuvialuit. Certaines parties du village sont littéralement emportées par la mer. L’élévation du niveau de la mer et le climat plus chaud, qui contribuent à la fonte du pergélisol, sont des accélérateurs qui font que les maisons d’une partie de la communauté sont emportées par la mer ou sont sur le point de l’être. »

« Nous avons déjà un énorme déficit d’infrastructures dans notre pays, et je pense aux complications que cette crise climatique ajoute au manque fondamental d’infrastructures dont nous disposons. Cela ne fait qu’aggraver des situations déjà difficiles. »

« Je pense aussi à ceux qui ont voyagé sur les sentiers traditionnels en hiver, sur la glace de mer, et… certaines personnes sont décédées. Certaines personnes sont mortes en voyageant sur des réseaux établis, qui ont été empruntés pendant des générations. Mais en raison du changement climatique, il y a des endroits où la glace n’est pas aussi épaisse, où le courant a changé, de sorte qu’il y a des défaillances potentielles dans la structure de la glace qui n’existaient pas auparavant. »

« Ce sont ces types de scénarios de vie et de mort auxquels les gens doivent maintenant faire face et auxquels ils doivent s’adapter. »

Lisa Koperqualuk est une Inuk de la communauté Puvirnituq au Nunavik, au Québec. (CBC)
Lisa Koperqualuk

Communauté : Puvirnituq, Nunavik, Québec

Lisa Koperqualuk est vice-présidente des affaires internationales du CCI, une organisation non gouvernementale internationale qui représente environ 180 000 Inuit de l’Alaska, du Canada, du Groenland et de la Tchoukotka (Russie).

« J’étais chez moi à Puvirnituq l’été dernier pour passer du temps à camper sur nos terres ancestrales, et c’était très bon de revenir là d’où je viens. »

« Et puis, j’y suis retournée en octobre où, normalement, on commence à voir la glace se former le long des baies, juste à côté du rivage. Et en octobre, il n’y avait rien de tout cela. »

« Normalement, il neige abondamment en octobre, mais il n’y avait absolument aucune neige. »

« Un de mes oncles m’a dit que, normalement, en octobre, on voit des cristaux de glace commencer à se former dans les baies. Nous les appelons qainngug, et nous avons des noms, une terminologie pour la glace et la neige, lorsqu’elles apparaissent au début de la baie ou à l’embouchure de la baie, et ainsi de suite. Donc, ce n’était pas encore arrivé. »

Brian Pottle

Communauté : Puvirnituq, Nunavik, Québec

Communauté : Nunatsiavut, Labrador

Brain Pottle est le président du Conseil national de la jeunesse inuit, une organisation créée par Inuit Tapiriit Kanatami.

« Pour moi, en grandissant, un élément clé de mon enfance a été de pouvoir sortir et explorer la terre. Et sortir, par exemple, en hiver, descendre la baie sur la glace pour faire des « bouillons » avec mes amis, et juste être sur la terre et être fondamentalement avec la terre. »

« Le changement climatique nuit à la capacité des gens à sortir et à explorer, à voyager et à se rappeler le lien que nous avons historiquement, et que nous pouvons encore avoir temporairement, avec la terre. Si ce lien est rompu, alors il est évident qu’un aspect vital de toute culture basée sur la relation et la spiritualité disparaît. »

« Cela n’a pas seulement un impact sur les jeunes, bien sûr, mais aussi sur tous. Tous ceux qui trouvent une source de réconfort et d’ancrage dans le lien avec la terre. Personnellement, je trouve que c’est très stimulant de pouvoir sortir et de décompresser, et de faire l’expérience d’une véritable liberté. »

« Si on enlève cela, alors, vous savez, vous allez avoir des gens qui se sentent davantage piégés et restreints dans la vie. Et dans une situation où vous êtes déjà très au Nord, vous êtes très loin de la société que vous voyez sur les médias sociaux et autres. Donc, plus vous êtes déconnectés, plus les risques pour la santé mentale augmentent. »

Un succès à la COP26

Lisa Koperqualuk et Brian Pottle font partie d’une délégation d’Inuit à la COP26, dirigée par le Conseil circumpolaire inuit.

L’organisation a lancé trois appels à l’action aux dirigeants mondiaux réunis en Écosse :

  • déployer des efforts massifs et sans précédent pour limiter l’augmentation de la température mondiale;
  • valoriser le savoir et le leadership autochtones dans l’action climatique, et soutenir la participation des Autochtones dans la gouvernance climatique;
  • reconnaître les océans et la cryosphère, soit la neige et la glace, comme des écosystèmes essentiels qui doivent être protégés par un partenariat avec les Inuit.

Pour Lisa Koperqualuk, le succès de la COP26 serait un engagement des parties à prendre des mesures concrètes pour réduire le réchauffement climatique.

Brian Pottle représente le Conseil national des jeunes Inuit au sein de la délégation à la COP26. Il affirme que la perspective inuit a été écartée des décisions politiques, et qu’il est temps de s’asseoir à la table.

« Les Inuit ressentent ces effets sur le terrain et, par conséquent, toute décision doit être éclairée par le groupe démographique qui subit – à un degré très extrême – les effets du changement climatique. Donc, s’assurer que la voix des Inuit soit entendue est l’objectif principal ici », conclut M. Pottle.

D’après un texte de Kim Kaschor de CBC

Radio-Canada

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