L’eau souterraine pompée par les humains modifierait les pôles, révèle une étude

Un paysage de la mer de Beaufort à partir du brise-glace finnois MSV Nordica. (David Goldman/Associated Press)
En surexploitant l’eau des sols, l’homme a modifié la rotation de la Terre qui s’est inclinée de près de 80 centimètres rien qu’entre 1993 et 2010, selon les conclusions d’une nouvelle étude récemment publiée dans Geophysical Research Letters, la revue scientifique de l’Union américaine de géophysique.

Les chercheurs internationaux originaires des États-Unis, d’Australie, de Corée et de Hong Kong se sont basés sur des modèles climatiques. Entre 1993 et 2010, ils ont estimé que l’homme avait pompé 2150 gigatonnes d’eau souterraine, soit l’équivalent de plus de 6 millimètres d’élévation du niveau de la mer.

Ces estimations indiqueraient que le déplacement, dû à l’extraction des eaux souterraines, a entraîné un déplacement du pôle de rotation de la Terre de près d’un mètre en l’espace de deux décennies.

L’étude explique que le pôle de rotation de la Terre – c’est-à-dire le point autour duquel la planète tourne – se déplace au cours d’un processus appelé mouvement polaire. À ce titre, la position du pôle de rotation de la Terre varie par rapport à la croûte terrestre.

« La répartition de l’eau sur la planète influe sur la répartition de la masse. Comme si l’on ajoutait un tout petit peu de poids à une toupie, la Terre tourne un peu différemment lorsque l’eau est déplacée », peut-on lire.

L’emplacement de l’eau souterraine a une incidence sur la dérive polaire. La redistribution de l’eau des latitudes moyennes a un impact plus important sur le pôle de rotation.Étude, Geophysical Research Letters

Le pôle de rotation de la Terre change beaucoup, assure Seo Ki-weon, géophysicien à l’Université nationale de Séoul, qui a dirigé l’étude. « Nos recherches montrent que parmi les causes liées au climat, la redistribution des eaux souterraines est celle qui a le plus d’impact sur la dérive du pôle de rotation. »

Un mystère résolu?

On apprend dans le document que la capacité de l’eau à modifier la rotation de la Terre a été découverte en 2016. Il reste que l’implication des eaux souterraines à ces changements de rotation demeurait jusqu’ici inexplorée.

Dans cette étude qui analyse divers scénarios de redistribution des eaux souterraines, les experts ont modélisé les changements observés dans la dérive du pôle de rotation de la Terre et le mouvement de l’eau. Ils précisent également avoir pris en compte les nappes glaciaires et les glaciers.

« Le modèle n’a correspondu à la dérive polaire observée qu’une fois que les chercheurs ont inclus 2150 gigatonnes de redistribution des eaux souterraines, indique le document. Sans cette redistribution, le modèle s’écarte de 78,5 centimètres, soit une dérive de 4,3 centimètres par an. »

M. Seo s’est dit très heureux d’avoir trouvé la cause inexpliquée de la dérive du pôle de rotation. « D’un autre côté, en tant qu’habitant de la Terre et père de famille, je suis inquiet et surpris de voir que le pompage des eaux souterraines est une autre source d’élévation du niveau de la mer », a-t-il souligné.

Les efforts déployés par les pays pour ralentir les taux d’épuisement des eaux souterraines, en particulier dans ces régions jugées sensibles, pourraient théoriquement modifier le changement de dérive, « mais seulement si ces approches de conservation sont maintenues pendant des décennies », estime le géophysicien.

Il ajoute que la prochaine étape pour les chercheurs serait de se tourner vers le passé. L’observation des changements du pôle de rotation de la Terre est utile pour comprendre les variations du stockage de l’eau à l’échelle du continent, précise M. Seo.

« Des données sur les mouvements polaires sont disponibles depuis la fin du XIXe siècle. Nous pouvons donc potentiellement utiliser ces données pour comprendre les variations du stockage de l’eau à l’échelle continentale au cours des 100 dernières années », conclut-il.

Avec les informations de Rebecca Dzombak

Ismaël Houdassine, Regard sur l'Arctique

Ismaël Houdassine est diplômé en journalisme de l’Université de Montréal. Il commence sa carrière comme reporter et journaliste culturel. Avant de rejoindre l’équipe de Radio-Canada, il a collaboré durant plusieurs années pour plusieurs médias, notamment l’Agence QMI et Le HuffPost.

Vous avez remarqué une erreur ou une faute ? Cliquez ici !

Laisser un commentaire

Note: En nous soumettant vos commentaires, vous reconnaissez que Radio Canada International a le droit de les reproduire et de les diffuser, en tout ou en partie et de quelque manière que ce soit. Veuillez noter que Radio-Canada ne cautionne pas les opinions exprimées. Vos commentaires seront modérés, et publiés s’ils respectent la nétiquette.
Nétiquette »

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *