Les renards arctiques aident à faire pousser de la végétation dans la toundra
Les effets des changements climatiques semblent faire baisser le nombre de renards arctiques. Ce constat menace la végétation de la toundra, car ils « ont la main verte ».
C’est ce que révèlent deux études distinctes publiées cet été et basées sur des recherches récentes menées dans la région de Churchill, dans le nord du Manitoba.
« Nous avons classé les renards arctiques dans la catégorie des ingénieurs d’écosystèmes. Ils ont un rôle clé dans la toundra, car ils profitent aux autres plantes de la région grâce à leur tanière », affirme Sean Johnson-Bice, un doctorant à l’Université du Manitoba.
Churchill, à environ 1000 kilomètres au nord de Winnipeg, et la région voisine de Wapusk, au sud-est, représente l’aire de répartition la plus méridionale de l’habitat du renard arctique.
C’est à cet endroit que l’animal dont le pelage devient blanc en hiver creuse sa tanière, dans la toundra dépourvue d’une végétation abondante et dans un sol pauvre en nutriment.
En analysant des images satellites, l’équipe de chercheurs a découvert qu’elle pouvait repérer les tanières depuis le ciel.
Cela s’explique par le fait que les tanières ont un effet de « verdissement ». Au fil du temps, les crêtes de la toundra, autrefois improductives, subissent une sorte d’embellissement, avec des herbes luxuriantes et d’autres végétaux qui poussent tout autour des tanières.
Selon Sean Johnson-Bice, cela est lié au comportement du renard arctique.
« Pendant l’été, ils rapportent toutes sortes de carcasses d’oies et de morceaux de caribous, et tous ces os, cette chair et ces plumes qui se dégradent autour des tanières agissent comme un puits de nutriments », explique-t-il.
Les renards et leurs petits font également « leurs besoins et urinent dans les tanières », ce qui constitue également un engrais pour la croissance des plantes, soutient Sean Johnson-Bice.
L’équipe a constaté qu’une fois que les renards ont colonisé un espace sur la toundra, les tanières et la verdure qui leur est associée restent en place bien après le départ des renards, ce qui suggère que les tanières apportent des avantages à long terme à la biodiversité de la région.
Sean Johnson-Bice et d’autres chercheurs ont publié l’année dernière un autre article montrant que les caribous, les ours polaires et les loups visitent tous les tanières de renards arctiques plus souvent que d’autres zones similaires de la toundra.
Moins de renards arctiques en raison d’un manque de nourriture
En se basant sur les registres des récoltes de fourrure entre 1955 et 2012, les chercheurs ont déduit que la population de renards arctiques est en déclin.
Ce phénomène est lié à la hausse des températures et à la dégradation de l’épaisseur et de la qualité de la neige et de la glace dans la mer.
Ces tendances semblent liées à une baisse des populations de lemmings, des minuscules rongeurs dont les renards arctiques se nourrissent généralement en hiver, d’après les recherches.
Les lemmings ont besoin d’une couche de neige épaisse et floconneuse près du sol, sous une couche de neige plus épaisse, pour creuser des tunnels et rester isolés en hiver. La hausse des températures a un impact sur la composition de la neige, ce qui leur donne des difficultés à construire ces tunnels.
Professeur à l’Université du Manitoba et membre du projet de recherche sur les renards à Churchill, Jim Roth affirme que le déclin de la population du petit rongeur a un effet domino sur la chaîne alimentaire des renards.
Le public devrait s’en préoccuper, affirme-t-il en compagnie de Sean Johnson-Bice.
« Il n’y aura plus de renards arctiques au Manitoba un jour, si rien n’est fait », avertit M. Johnson-Bice.
Avec les informations de Bryce Hoye