Le brise-glace Amundsen atteint des latitudes inédites dans l’Arctique

Le brise-glace NGCC Amundsen n’avait jamais atteint de telles latitudes nordiques. (Photo : Université Laval)

Le brise-glace NGCC Amundsen vient d’atteindre des latitudes nordiques inédites. Cela a permis à son équipage de mener des travaux de recherche d’une importance capitale dans les eaux du détroit de Nares, endroit peu exploré par les scientifiques canadiens et considéré comme « un dernier refuge » pour la faune arctique.

L’exploit est d’envergure. Jamais depuis la création d’Amundsen Science, en 2003, le navire n’avait atteint le 82e parallèle nord, aux portes de l’océan Arctique.

Le tout a été réalisé lors de la mission de recherche estivale du brise-glace, dont le port d’attache est Québec. Il est consacré à la science en été grâce à un partenariat avec la Garde côtière canadienne.

Précieuses données

Fruit d’un travail de collaboration d’un consortium de 14 institutions universitaires, dont l’Université Laval, et gouvernementales du Canada, du Danemark et de la Norvège, la collecte de données s’annonce prometteuse.

Ces opérations ont permis la collecte d’un ensemble unique d’échantillons et de données à l’endroit le plus au nord jamais échantillonné par le NGCC Amundsen, indique Amundsen Science dans une déclaration transmise à Radio-Canada.

Les scientifiques ont placé des instruments de mesure un peu partout sur leur passage dans le détroit de Nares afin de récolter des données sur cet écosystème unique au Canada. (Photo : Université Laval)

La quarantaine de scientifiques à bord, avec l’aide de l’équipage de la Garde côtière, a déployé des instruments de mesure un peu partout sur son passage, du sud de l’île d’Ellesmere jusqu’à la mer de Lincoln, au nord, en plus d’installer 23 stations d’échantillonnage.

Le navire a pu cartographier les fonds marins de plusieurs secteurs. Des glaciologues ont quant à eux placé des balises sur des glaciers et sur des icebergs afin de mieux comprendre comment la dynamique de la glace continentale influe sur les écosystèmes marins.

Certains instruments vont demeurer dans les eaux arctiques pour la prochaine année et devront être récupérés dans une nouvelle mission de recherche prévue par Amundsen Science.

Le NGCC Amundsen s’est rendu aux confins du détroit de Nares, aux portes de l’océan Arctique. (Photo : Université Laval)

Endroit unique

Le détroit de Nares est un passage marin situé entre l’île d’Ellesmere et le Groenland. Selon Amundsen Science, «il joue un rôle important dans le système climatique régional et dans la productivité biologique de l’Arctique.»

Le NGCC Amundsen s’est notamment rendu jusqu’au passage Robeson, dernier chenal du détroit de Nares, avant de se retrouver dans la mer de Lincoln, puis dans l’océan Arctique.

L’endroit, unique au Canada, constitue une zone d’étude cruciale aux yeux de Maxime Geoffroy, professeur à l’Institut maritime de l’Université Memorial, à Terre-Neuve-et-Labrador. «C’est l’un des derniers endroits qui est typiquement arctique», dit-il, en entrevue depuis le brise-glace, dont les travaux sont toujours en cours dans les latitudes polaires.

Des animaux iconiques de l’Arctique, comme les ours polaires, dépendent de la glace marine pour survivre. (Getty/Sepp Friedhuber)

Grâce à la glace de mer dite pluriannuelle, à savoir qui subsiste même en été, le détroit constitue un refuge important pour la faune arctique, souligne-t-il. Il y a une concentration d’animaux charismatiques comme les morses, les baleines, les ours polaires.

En hiver, la glace consolidée dans les secteurs étroits du détroit de Nares sert de barrière temporaire à la glace pluriannuelle dérivant de l’océan Arctique. Cela contribue ainsi à maintenir la glace de mer la plus ancienne et la plus épaisse de l’Arctique.

Dans un contexte de changements climatiques et de réchauffement de la planète, l’étude du détroit de Nares et de ses glaces sera capitale, selon Audrey Limoges, professeure au Département des sciences de la terre à l’Université du Nouveau-Brunswick.

Les épaisses glaces, dit-elle, ont une influence sur le système hydrologique et océanographique ainsi que sur le climat. Si la glace devait fondre ou se retirer, des impacts sur le système climatique pourraient être anticipés. C’est une zone très importante, dit-elle.

Rien depuis les années 1800

En plus de sillonner le détroit de Nares, la mission a permis aux équipes de recherche de caractériser le fjord Archer, dont les derniers relevés dataient des années 1800, selon Maxime Geoffroy.

Ce vaste fjord se trouve au coeur de l’aire marine protégée Tuvaijuittuq, créée par le gouvernement fédéral en 2019.

Elle est relativement nouvelle et est bien connue pour sa biodiversité. Toutefois, peu de données ont été produites sur la superficie de cette immense aire protégée de plus de 319 000 kilomètres carrés.

En raison de leur position géographique et des conditions difficiles, le détroit de Nares et la mer de Lincoln sont difficiles d’accès, et seules de rares initiatives scientifiques ont tenté d’étudier leurs écosystèmes marins, explique Amundsen Science.

Pour sa part, Maxime Geoffroy relève que le Canada a pris du retard et les travaux en cours permettront de combler certaines absences dans l’exploration arctique. On est à la traîne par rapport au Groenland, qui a bien documenté la région, dit-il.

Amundsen Science, organisme à but non lucratif responsable du mandat scientifique du brise-glace, espère mieux comprendre les processus clés liés aux changements passés, présents et futurs induits par le climat.

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