Ivujivik enfin réapprovisionnée après plus de deux ans sans eau traitée

Ivujivik est la communauté la plus au nord du Québec. (Photo : Thomassie Mangiok)

La communauté d’Ivujivik peut à nouveau compter sur son usine de traitement de l’eau, plus de deux ans après le bris d’une conduite névralgique, qui a considérablement perturbé l’approvisionnement en eau potable dans le village le plus septentrional du Québec.

Depuis vendredi dernier, les camions de livraison ont recommencé à s’approvisionner à l’usine de traitement de l’eau du village, comme c’était le cas avant le bris de la conduite principale en février 2021.

Une tempête de neige avait alors empêché les équipes municipales d’approvisionner en carburant la station de pompage d’Ivujivik et la conduite qui relie la source du village à l’usine de traitement avait cédé à cause du gel.

La conduite a finalement été remplacée au courant des derniers mois. (Photo : administration régionale Kativik)

Depuis, les camions-citernes devaient se rendre directement à un lac, à environ 1 kilomètre du village, avant de pomper de l’eau et d’y ajouter manuellement du chlore.

Toute l’opération ralentissait considérablement la livraison d’eau dans la communauté.

Plusieurs résidents préféraient puiser leur eau à même la rivière, à l’extérieur du village. (Photo : Thomassie Mangiok)

« Ce n’était pas rare de ne pas avoir d’eau durant plusieurs jours […] On prenait des douches quand on pouvait. On s’adaptait. On achetait des lingettes de bébé, les plus jeunes prenaient leur bain deux à la fois », raconte Thomassie Mangiok, un résident d’Ivujivik.

De nombreux résidents ont aussi dénoncé la mauvaise qualité de l’eau. Elle était parfois pleine des sédiments et avait souvent une forte odeur de chlore.

La situation a forcé plusieurs membres de la communauté à organiser eux-mêmes l’approvisionnement en eau potable à partir d’une rivière à environ 7 kilomètres du village.

On devait faire environ 1 heure de motoneige pour se rendre à la rivière. Souvent, on s’aidait. Cette fin de semaine, je suis allé pour trois familles. – Thomassie Mangiok

Thomassie Mangiok avoue s’être sentie «abandonné» par les autorités, parce que la réparation de la conduite s’éternisait. (Photo d’archives/Thomassie Mangiok)

Un coût 10 fois supérieur au budget

Il aura fallu 33 mois pour que les travaux de réparation de la conduite puissent être réalisés.

L’Administration régionale Kativik (ARK) explique ce délai par la difficulté de trouver une entreprise en mesure de réaliser de tels travaux, dans un lieu aussi éloigné.

À l’été 2022, un premier appel d’offres a été lancé pour trouver un entrepreneur. Une seule entreprise a levé la main, avec une soumission environ 10 fois plus élevée que le budget prévu.

« Notre budget n’était pas suffisant. On a dû être innovant et trouver des fonds […] On a lancé un autre appel d’offres et nous avons trouvé une seule entreprise qui répondait aux exigences », explique le directeur des travaux municipaux de l’ARK, Hossein Shafeghati.

L’ensemble du projet aura finalement coûté 8 millions de dollars aux contribuables, alors que l’ARK avait prévu dépenser tout au plus 800 000 $.

Ce prix élevé s’explique notamment par la complexité logistique d’un tel contrat dans la toundra nordique du Nunavik, qui n’est accessible que par navire et avion.

De nouveaux tuyaux ont rapidement été envoyés par navire, mais trouver une entreprise en mesure de les installer s’est révélé la partie la plus difficile pour l’Administration régionale Kativik. (Photo : l’administration régionale Kativik)

D’après Hossein Shafeghati, l’explosion des coûts serait aussi attribuable au manque de concurrence dans le secteur de la construction au Nunavik.

On vit dans une société de libre marché. Ils savent qu’il n’y a pas de compétition et montent leurs prix […] Malheureusement, depuis deux ou trois ans, la compétition est très petite. Il y a une sorte de monopole. – Hossein Shafeghati, directeur des travaux municipaux de l’ARK

Pas à l’abri d’un autre problème

La fin de cette saga est un véritable soulagement pour de nombreux résidents d’Ivujivik.

Ils devront toutefois être aux aguets, car le réseau d’eau de la communauté est toujours aussi vulnérable qu’il l’était avant le bris.

Aucune modification importante n’a été apportée à la station de pompage, qui devra encore être approvisionnée en carburant pour empêcher l’eau de geler en hiver.

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Félix Lebel, Radio-Canada

Journaliste à Sept-Îles

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