Élections au Canada, le manque d’eau potable et l’identité autochtone s’invitent au débat
Accès à l’eau potable, destructions de livres contenant des représentations inappropriées des Autochtones, identité et culture : les enjeux autochtones ont été abordés dans l’avant-dernier segment du débat des chefs en français, mercredi soir.
En ce qui concerne l’accès à l’eau potable, tous les chefs ont reconnu qu’il s’agissait d’un problème urgent.
Le bilan du gouvernement Trudeau sur cet enjeu a par ailleurs été mis à mal, notamment par le chef néo-démocrate Jagmeet Singh.
« Dans un pays aussi riche que le nôtre, c’est inexcusable », a affirmé M. Singh, dont le parti s’engage à rendre accessible l’eau potable dans l’ensemble des communautés peu importe les coûts.
« Ce n’est pas une question de capacité ou de compétences, c’est vraiment une question de volonté. M. Trudeau […] a brisé sa promesse de livrer l’eau potable », a-t-il ajouté.
« Ça fait des décennies qu’on a ce défi d’eau potable dans les communautés autochtones. C’est pour ça qu’on a fait la promesse d’en finir partout au pays. On en a éliminé 109 [des avis à long terme de faire bouillir l’eau] », a tout de même rappelé le chef libéral Justin Trudeau.
La destruction de livres, jugés comme contenant des représentations inappropriées des Autochtones, dans une commission scolaire de l’Ontario, révélée par Radio-Canada cette semaine, a monopolisé la deuxième partie des échanges.
Les cinq chefs se sont entendus pour dire que de « brûler des livres est toujours inacceptable ».
« On doit se concentrer sur la réconciliation sans des gestes comme ça », a soutenu Erin O’Toole, le chef du Parti conservateur.
« Il y a de meilleures façons de s’exprimer, mais nous savons qu’il peut y avoir beaucoup de frustration chez les Autochtones. J’espère que nous pourrons trouver des solutions plus productives », a soutenu la cheffe du Parti vert Annamie Paul.
Quant à l’absence d’origines autochtones de Suzy Kies, qui a accompagné la commission scolaire ontarienne dans la destruction des livres, Justin Trudeau a appelé à la prudence.
« Il faut laisser beaucoup d’espace à l’identité personnelle. Je ne suis pas en train de défendre le geste, mais je veux que tout le monde fasse attention », a-t-il dit.
La reconnaissance officielle des langues autochtones
C’est la question d’un citoyen autochtone, Perry Simon, de Kanesatake, au Québec, qui a lancé le segment des enjeux autochtones.
Il souhaitait savoir si les chefs étaient d’accord pour que les langues autochtones soient reconnues comme langues officielles au Canada.
Justin Trudeau, Yves-François Blanchet, Jagmeet Singh et Annamie Paul ont affirmé être d’accord avec une reconnaissance officielle des langues autochtones au pays.
Trudeau a souligné la nomination de Mary Simon, qui parle l’anglais et l’inuktitut, comme gouverneure générale.
« Nous avons pris la décision de nommer une gouverneure générale qui ne parle pas nos deux langues officielles, mais qui parle l’inuktitut. Pour moi, ça démontre à quel point nous devons valoriser cette culture et ces langues », a-t-il déclaré.
« Chacune des langues autochtones mérite assurément une forme de reconnaissance », a précisé M. Blanchet, lors du point de presse qui a suivi le débat. « Je ne crois pas que le Parlement fédéral puisse ou doive demain matin avoir en traduction simultanée dans chacune des langues du territoire. Je ne pense pas ça. Mais entre ça, qui est un extrême, ou continuer à regarder les langues autochtones s’étioler […], je pense qu’il y a des gestes à poser. »
Le chef conservateur Erin O’Toole est, de son côté, demeuré prudent.
« Nous avons deux langues officielles maintenant, mais c’est possible d’avoir des services dans les langues autochtones », a-t-il affirmé.
Échange enflammé entre Trudeau et Blanchet
Le ton est monté lors d’un échange entre Justin Trudeau et Yves-François Blanchet.
« Nous n’allons pas dire aux peuples autochtones comment ils doivent se sentir, et trouver cet équilibre est important », a affirmé le premier ministre sortant lorsqu’il a été question du débat sur la destruction de livres
Une déclaration à laquelle le chef du Bloc québécois a rapidement rétorqué. « Mais s’il ne faut pas dire aux nations quoi faire ou quoi penser, pourquoi dit-il à la nation québécoise quoi faire et quoi penser? » a-t-il demandé.
« Parce que je suis Québécois, M. Blanchet, un fait que vous oubliez constamment : que je suis fier Québécois, que j’ai toujours été Québécois, que je serai toujours Québécois. Et je suis là, avec mon mot à dire », a répliqué Justin Trudeau.