Les Autochtones isolés risquent de ne pas profiter du plan fédéral de soins dentaires

Le nouveau régime national de soins dentaires est mis en œuvre par étapes, en commençant par les personnes âgées et les enfants de moins de 18 ans, puis s’étendra à tous les Canadiens admissibles à revenu faible ou moyen en 2025. (AFP/Sebastien Bozon)

Une dentiste pédiatrique estime que l’absence de service dans les communautés rend peu efficace le plan fédéral de soins dentaires.

La cofondatrice de l’Association dentaire autochtone du Canada affirme qu’en plus d’étendre la couverture, le gouvernement fédéral devrait améliorer l’accès aux soins dentaires pour les personnes qui vivent dans des communautés éloignées afin d’éviter que les écarts en matière de santé bucco-dentaire ne se creusent.

«Si nous ne nous attaquons pas aux problèmes des populations autochtones, ils vont nous exclure», estime Sheri McKinstry, dentiste pédiatrique membre de la Première Nation Sagkeeng, à une centaine de kilomètres au nord de Winnipeg.

Sheri McKinstry est cofondatrice de l’Association dentaire autochtone du Canada. (Photo : Sheri McKinstry)

Selon un rapport de 2017 du Bureau du vérificateur général du Canada, les populations des Premières Nations et des Inuit présentent près de deux fois plus de maladies dentaires et davantage de besoins non satisfaits en matière de santé bucco-dentaire que les populations non autochtones.

Selon Sheri McKinstry, les fonds disponibles pour les soins dentaires importent peu si personne n’offre de services dans votre communauté ou si vous rencontrez des obstacles tels que le racisme dans le système de soins de santé. «À mon avis, nous n’avançons malheureusement pas assez vite et j’aimerais que ça s’améliore.»

Le nouveau régime national de soins dentaires sera mis en œuvre par étapes, en commençant par les personnes âgées et les enfants de moins de 18 ans. Il sera ensuite étendu à tous les Canadiens admissibles à revenu faible ou moyen en 2025.

Pour être admissible au programme, une personne doit avoir un revenu familial inférieur à 90 000 $ et ne pas avoir accès à un régime d’assurance privé. Elle doit également avoir rempli sa déclaration d’impôts à jour afin que le gouvernement puisse vérifier ses revenus.

Le programme actuel des services de santé non assurés (SSNA) couvre certains frais de santé, comme la plupart des soins dentaires de routine, pour les membres des Premières Nations ayant le statut et les Inuit.

«Même si l’Association dentaire canadienne considère les SSNA comme un solide accès aux soins dentaires, ils sont encore insuffisants et très restrictifs», dit Sheri McKinstry.

Le programme des SSNA a été critiqué pour l’incohérence de sa couverture et a apporté des modifications à sa politique dentaire en 2018 après que le gouvernement fédéral a dépensé 110 000 $ en justice pour lutter contre une famille albertaine à propos d’une facture de 8000 $ pour des appareils dentaires.

Le Régime canadien de soins dentaires peut aider à couvrir certains des frais remboursables qui ne sont pas couverts par les SSNA, dit Sheri McKinstry.

Elle ajoute que les Métis et les membres non inscrits des Premières Nations sont peut-être ceux qui ont le plus à gagner avec ce plan, car ils n’ont pas accès aux SSNA. «Il y a toujours eu une inégalité entre les groupes autochtones», assure-t-elle.

Santé Canada et Services aux Autochtones Canada n’ont pas répondu aux demandes de CBC.

Les traces que laissent des soins de mauvaise qualité

Les obstacles systémiques aux services dentaires ne sont pas nouveaux, souligne Catherine Carstairs, professeure d’histoire à l’Université de Guelph.

Elle est coautrice d’un article paru dans la revue Canadian Historical Review, qui porte sur les soins bucco-dentaires dispensés aux populations autochtones entre 1945 et 1979.

«Le ministère des Affaires indiennes, comme on l’appelait à l’époque, a vraiment nié qu’il avait l’obligation de fournir des soins de santé bucco-dentaire aux populations autochtones», dit-elle. Dans l’ensemble, les soins de l’époque étaient austères et axés sur la réduction des coûts, indique-t-elle.

Catherine Carstairs note qu’il existait des disparités évidentes entre les soins prodigués aux enfants des colons, qui bénéficiaient de services comme des plombages, alors que les enfants autochtones se faisaient plus souvent extraire les dents.

«Beaucoup de gens ont perdu des dents qui auraient pu être sauvées», soutient-elle. Catherine Carstairs souligne que les documents d’archives qu’elle a examinés contenaient des récits de personnes qui essayaient de recevoir des prothèses dentaires, mais qui devaient économiser jusqu’à 25 $ pour aider à payer le service, ou qui se voyaient refuser des fonds par les services de santé du gouvernement.

«Même s’il y avait un dentiste dans la communauté, il ne voulait souvent pas prendre de patients autochtones parce qu’il savait qu’il était remboursé à des taux bien inférieurs à son barème d’honoraires général», affirme-t-elle.

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Espaces autochtones, Radio-Canada

Pour d’autres nouvelles sur les Autochtones au Canada, visitez le site d’Espaces autochtones.

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