Des lois canadiennes cruciales pour les Autochtones, sur la langue et l’enfance, sont ratifiées

La Loi concernant les enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations, des Inuit et des Métis doit changer la donne d’importante manière pour nombre d’entre eux. (André Forget/Getty Images)
Des représentants autochtones ont salué vendredi l’adoption finale à Ottawa de la Loi sur les langues autochtones (C-91) et de la Loi concernant les enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations, des Inuit et des Métis (C-92).

« Aujourd’hui, le parlement adoptera un projet de loi qui appuiera leurs efforts en vue de protéger, de préserver et de revitaliser leurs langues », a déclaré le premier ministre Justin Trudeau. « Il adoptera également un projet de loi pour réformer les services à l’enfance et à la famille. Ainsi, nous affirmons le droit des peuples autochtones de prendre leurs propres décisions concernant leurs enfants, leurs familles et leurs communautés. »

Les deux projets allaient en effet recevoir la sanction royale, leur donnant force de loi.

« Nous avons marqué l’histoire et nous franchissons une étape charnière dans nos efforts visant à revendiquer, revitaliser, conserver et renforcer nos langues », a déclaré le chef national l’Assemblée des Premières Nations (APN), Perry Bellegarde. L’APN et d’autres organisations autochtones avaient participé à l’élaboration du projet de loi C-91, déposé en février dernier.

« Lorsque des États appuient les langues autochtones, leurs probabilités de survie augmentent », a-t-il souligné dans un communiqué.

« Voilà un exemple de réconciliation en action et une façon pertinente de marquer l’année 2019, que les Nations unies ont désignée comme étant l’Année internationale des langues autochtones. »

Perry Bellegarde, chef national de l'APN
Perry Bellegarde, chef national de l’APN. (Mark Taylor/La Presse canadienne)

Le gouvernement crée du même coup le Bureau des langues autochtones.

Dirigé par un commissaire indépendant dont le mandat durera cinq ans, il sera responsable de l’application des grands principes de la loi et devrait donc « contribuer à la promotion des langues autochtones » et « soutenir les peuples autochtones dans leurs efforts visant à se réapproprier les langues autochtones et à les revitaliser, les maintenir et les renforcer », selon le texte législatif.

Selon l’UNESCO, les trois quarts des quelques 90 langues autochtones vivantes répertoriées au Canada sont à risque de disparition.

Protection des liens familiaux

Le projet de loi C-92 avait lui aussi été préparé avec la collaboration de différents groupes autochtones, dont l’APN. Et il avait aussi été déposé en février.

« Il s’agit d’un grand pas dans la bonne direction en vue de remédier à plusieurs décennies d’échecs qui ont fait en sorte qu’un trop grand nombre de nos enfants ont été arrachés à leur famille », a estimé M. Bellegarde, en avertissant toutefois qu’« aucune mesure législative ne pourra réparer l’incidence désastreuse et durable d’un système déficient ».

La Loi concernant les enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations, des Inuit et des Métis reconnaît les lois et pratiques des instances autochtones en matière de protection de l’enfance, dans le contexte de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Elle vise notamment à empêcher que les enfants soient inutilement retirés de leur collectivité et de leur foyer, prévoyant qu’ils ne doivent pas être pris en charge uniquement en raison de leurs conditions socio-économiques.

Le plus récent budget fédéral ne prévoyait aucune somme pour la mise en oeuvre de cette loi, alors qu’une enveloppe de 333,7 millions de dollars sur cinq ans y était consacrée aux langues autochtones.

« Cette mesure législative consiste à appliquer les lois, les politiques et les valeurs à des systèmes conçus et mis en œuvre par les Premières Nations et pour les Premières Nations, en s’employant avant tout à offrir à nos enfants toutes les occasions de grandir en se sentant valorisés et liés à leur famille, à leur culture et à leur nation », a expliqué le chef national de l’APN.

Derek Montour, président du conseil d’administration de la Commission de la santé et des services sociaux des Premières Nations du Québec et du Labrador (CSSSPNQL) a parlé d’une « avancée majeure pour les droits des enfants autochtones. Trop d’entre eux ont souffert en étant séparés de leur famille ou en étant pris en charge par ‘l’État’. »

« Maintenant, on a la conviction que les familles autochtones seront mieux soutenues et bénéficieront de services de qualité culturellement adaptés, notamment en matière de prévention. »

Derek Montour, président du conseil de la CSSSPNQL
Au tour des provinces et territoires

« J’exhorte toutes les provinces et tous les territoires à travailler directement avec les Premières Nations en vue de la mise en œuvre de cette loi », a ajouté Perry Bellegarde.

Ghislain Picard, chef l’Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador (APNQL), a affirmé pour sa part que « l’adoption de la Loi 92 constitue un pas majeur dans la relation entre nos gouvernements et le gouvernement du Canada », en précisant qu’elle « nous rapproche du plein exercice de notre droit à l’autodétermination ».

« Nous sommes prêts à relever les défis de la transition et nous n’attendons rien de moins de la part du gouvernement provincial. »

Ghislain Picard, chef l’APNQL
Ghislain Picard, chef de l’APNQL. (Alice Cliche/Radio-Canada)
Fin probable pour le projet de loi C-262

Les projets de loi C-91 et C-92 faisaient partie d’un trio de pièces législatives que l’APN considérait comme « cruciales ».

Toutefois, le troisième projet de loi, C-262, qui doit garantir que toutes les lois canadiennes respectent la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, n’a toujours pas été adopté et mourra vraisemblablement au feuilleton.

Il s’agit d’un projet d’initiative privée, déposé par le député néo-démocrate Romeo Saganash, qui y travaille depuis pas moins de 35 ans. Il avait d’ailleurs participé à la rédaction de la déclaration de l’ONU, dans les années 1980.

M. Saganash avait exprimé ses inquiétudes, en mars, devant la possibilité que son projet de loi ne soit abandonné.

Le Canada a ratifié la déclaration en 2016, près de 10 ans après son adoption par l’Assemblée générale des Nations Unies. Le projet de loi C-262 visait à forcer Ottawa à donner suite à cette ratification.

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