Persévérer dans le sport et les études grâce à l’équipe de hockey inuit Natturaliit
L’équipe de hockey inuit Natturaliit poursuit son développement et sa mission de favoriser la persévérance scolaire chez les jeunes Nunavimmiut expatriés à Montréal, en plus de leur offrir un espace où ils peuvent se retrouver culturellement.
Mary Jane Alaku termine à peine une séance d’étude lorsqu’elle nous accueille dans son appartement de l’ouest de Montréal. La jeune Inuk a quitté sa communauté d’Inukjuak pour étudier au Cégep John-Abbott en administration des affaires.
«Je n’avais pas le choix de venir étudier à Montréal. Chez nous, les possibilités d’études sont très limitées, les services sont au strict minimum. Je suis ici pour apprendre, c’est important pour moi», explique l’étudiante qui rêve un jour de se lancer en affaires dans sa communauté.
Partir de chez elle n’a pas été facile, et le choc culturel en arrivant à Montréal l’a complètement bouleversé.
«Quand tu déménages ici, tu t’ennuies rapidement de l’air frais, des grands espaces et de la nature sauvage», ajoute-t-elle.
Heureusement, Mary-Jane garde un contact privilégié avec sa culture grâce au programme de hockey Natturaliit.
Une école de vie
Natturaliit a été mis sur pied à Kuujjuaq, en 2014, par les passionnés de hockey Danny Fafard et Paul Parson. Le but premier du programme était de permettre aux jeunes Nunavimmiut de se rendre à Montréal quelques fois par année pour compétitionner.
Au fil du temps, la vocation de l’équipe a changé. Natturaliit est maintenant basée à Pierrefonds de façon permanente et se concentre sur les étudiants postsecondaires. L’organisation a grossi et dispose même de son propre vestiaire ainsi que de son autobus aux couleurs de l’équipe.
«On a réussi à avoir du financement régional. Et depuis, ça n’arrête pas de grandir», explique le directeur de l’équipe Danny Fafard.
Ce dernier souhaite permettre aux jeunes de se développer grâce au sport, autant sur la patinoire qu’à l’extérieur.
Persévérer dans le hockey les pousserait à développer une bonne discipline de travail qui leur est utile dans leur parcours scolaire.
«Parfois, je leur demande ce qu’ils remarquent comme changement quand ils retournent dans leur communauté. Ils me disent qu’ils voient leurs amis différemment, mais au fond, c’est eux qui ont changé. Ils évoluent», dit-il.
Ce dernier est par ailleurs toujours émerveillé par la capacité d’adaptation de ces jeunes joueurs, dont la vie change considérablement lorsqu’ils quittent le Nunavik pour les études.
«Il faut être fait fort quand tu quittes le Nord pour venir à Montréal. C’est un environnement totalement différent, mais ils se débrouillent bien!», indique le directeur.
Pour Mary Jane Alaku, le fait de pratiquer son sport favori et de se retrouver entre Inuit, le temps d’un match, serait déterminant dans sa réussite scolaire.
«Ça te fait sentir à la maison. Tu peux parler dans ta langue, ça fait du bien […]. Sans l’équipe, je ne pense pas que je serais encore à Montréal», affirme la hockeyeuse.
Une équipe en évolution
Sur les 17 joueurs de l’équipe Natturaliit, 11 sont inuit. Ce mélange d’origine donne lieu à des discussions enrichissantes.
«Le but c’est de devenir une équipe complètement inuit, mais vois-tu, les athlètes me disent qu’ils aiment ça le mélange. C’est l’fun de les voir échanger, ça parle de culture. Ils posent des questions sur la chasse. Il y a un bel échange», mentionne-t-il.
Pour la première fois cette année, l’équipe a accueilli des joueuses. C’était devenu nécessaire face à la demande croissante des hockeyeuses, qui sont nombreuses au Nunavik.
Danny Fafard évalue par ailleurs la possibilité de démarrer une équipe entièrement féminine.
«Comme partout au pays, le hockey féminin se développe. On travaille à faire une équipe de filles aussi. On va commencer avec des joueuses inuit et compléter avec des joueuses locales», explique-t-il.
Une relève bien en place
Après avoir entraîné l’équipe pendant plusieurs années, Danny Fafard a aujourd’hui laissé ce rôle à deux anciens joueurs, Nicolas Kulula-Lance et Tuniq Berthe.
Les deux entraîneurs comprennent la réalité des joueurs, pour avoir eux-mêmes vécu le déracinement de leur région natale.
«Être en gang avec nos chums du nord, être plus proche de notre culture, de parler notre langue, ça fait du bien […]. Pour les jeunes, ça garde le corps en bonne santé et le moral aussi. Ça enlève tout le stress de la vie de Montréal», note-t-il.
Danny Fafard espère un jour qu’un de ses anciens joueurs, comme Nicolas, puisse prendre les rênes de Natturaliit. Le but étant qu’encore plus de jeunes s’engagent à réussir dans leurs études grâce aux bienfaits du sport.
À lire aussi :