William Tagoona nommé compagnon de l’Ordre des arts et des lettres du Québec

William Tagoona a marqué une génération complète d’artistes inuit. (Photo : Ordre des arts et des lettres du Québec/Benoît Rousseau)

L’artiste inuk William Tagoona a reçu le titre de compagnon de l’Ordre des arts et des lettres du Québec pour sa contribution au rayonnement de la culture inuit à travers sa longue carrière d’auteur-compositeur-interprète et journaliste.

«Je ne m’y attendais pas! Tu sais, on vit notre vie pour aider notre prochain, mais être récompensé pour ça, ce n’est jamais quelque chose à quoi on pense», confie William Tagoona.

Le résident de Kuujjuaq a reçu cet honneur lundi en compagnie d’une quinzaine d’autres artistes québécois. Parmi eux, Claude Dubois, les membres du groupe Les Cowboys Fringants et André Forcier.

Une quinzaine d’artistes ont ainsi été faits compagne et compagnon de l’Ordre des arts et des lettres du Québec. (Photo : Ordre des arts et des lettres du Québec/Benoît Rousseau)

«Je suis né dans un « shack » que mon père a construit. Jamais je n’aurais pensé finir dans cet endroit à côtoyer tous ces héros du Québec. Ça montre vraiment à quel point on vient de loin», explique William Tagoona.

Le prix est certainement flatteur pour l’artiste, mais c’est surtout pour lui une belle démonstration de la place grandissante des Inuit dans le paysage culturel au pays.

«On y arrive tranquillement! Je pense à des artistes comme Elisapie, qui nous a vraiment mis sur la carte. Plusieurs d’entre nous ont commencé dans les années 60 et 70, mais les jeunes ont vraiment pris le relais et leur succès a permis que même notre génération soit reconnue», ajoute-t-il

Un long périple

La carrière de Tagoona s’étale maintenant sur près de 60 ans. Elle a commencé lorsqu’il a créé avec des amis le groupe rock inuit The Harpoons à l’âge de 13 ans.

L’époque n’était alors pas très propice à la mise de l’avant de la culture inuit. Chanter en inuktitut lui était même interdit, alors qu’il fréquentait le pensionnat de Churchill, au Manitoba, au tournant des années 1960.

«Nous faisions des reprises des Beatles, nous faisions les Rolling Stones, The Animals», dit-il.

Le groupe The Harpoons s’était concentré sur des reprises de chansons rock populaires de l’époque. (Photo : William Tagoona)

Même s’il reconnaît avoir adopté la culture du Sud, cette initiation à la musique aura tout de même réveillé quelque chose en lui : une volonté de faire vivre son art dans sa langue maternelle.

Il aura toutefois fallu attendre les années 1970 pour que William Tagoona commence à diffuser publiquement sa musique en inuktitut. C’est à ce moment qu’il a commencé à davantage militer pour les droits des Inuit.

À partir de 1978, il a été l’un des premiers artistes inuit à enregistrer professionnellement ses chansons, qu’il diffusait sur les ondes de la CBC.

Il a ainsi ouvert la voie à de nombreux autres musiciens de la région, en inspirant l’idée de rehausser la qualité des enregistrements musicaux.

«Je pense que presque tous ceux à qui vous parlez diraient avoir entendu des artistes comme William Tagoona. Ces premiers enregistrements ont vraiment inspiré toute une industrie musicale dans le Nord», souligne l’ancien directeur de la station de CBC à Iqaluit Patrick Nagle.

Dans son studio maison de Kuujjuaq, William Tagoona continue d’enregistrer des artistes locaux. C’est là qu’il a par ailleurs produit plusieurs de ses albums, parmi la trentaine qu’il a lancés.

Une vie sur les ondes

En parallèle à sa carrière musicale, William Tagoona a aussi été l’un des premiers et plus prolifique journaliste inuit au pays.

Il a travaillé pendant plus de 30 ans à CBC North, notamment à l’animation de l’émission régionale Tuttavik à Kuujjuaq.

William Tagoona a animé l’émission régionale Tuttavik, sur les ondes de CBC North. (Photo d’archives/William Tagoona)

Tout au long de sa carrière, il a tenté de promouvoir les artistes de l’Inuit Nunangat, en mettant au défi CBC d’améliorer la représentativité autochtone sur les ondes.

C’était pour lui un devoir, afin de préserver la vitalité de la culture inuit.

C’est grâce à la musique que vous allez sauver la langue. Il ne s’agit pas seulement d’investir des millions de dollars dans un programme scolaire.

– William Tagoona

La préservation de l’inuktitut est demeurée centrale dans son implication citoyenne.

William Tagoona a à cœur la protection de la culture inuit. (Radio-Canada/Félix Lebel)

Depuis 2022, il est le président du conseil d’administration de l’Institut culturel Avataq, qui vise la préservation de la culture inuit.

L’institut s’est par ailleurs récemment lancé dans un grand chantier de protection linguistique, avec la création d’un secrétariat de la langue.

C’est un dossier qui continuera assurément d’occuper l’infatigable William Tagoona pour plusieurs années encore.

À lire aussi :

Félix Lebel, Radio-Canada

Journaliste à Sept-Îles

Vous avez remarqué une erreur ou une faute ? Cliquez ici !

Laisser un commentaire

Note: En nous soumettant vos commentaires, vous reconnaissez que Radio Canada International a le droit de les reproduire et de les diffuser, en tout ou en partie et de quelque manière que ce soit. Veuillez noter que Radio-Canada ne cautionne pas les opinions exprimées. Vos commentaires seront modérés, et publiés s’ils respectent la nétiquette.
Nétiquette »

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *