Le camp en nature près de Yellowknife aide certains sans-abri, mais pas tous

(Radio-Canada / Julie Plourde)
Des participants du camp en nature, lancé par le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest comme solution à court terme à l’itinérance, disent apprécier cette initiative. Toutefois, selon un organisme local, ce camp près de Yellowknife ne répond peut-être pas aux besoins des plus vulnérables.
Situé à environ 45 minutes de voiture le long de la route Ingraham, le camp en nature accueille en ce moment 10 personnes, un nombre qui fluctue de jour en jour depuis son ouverture, le 12 novembre. Le camp a été conçu pour en accueillir jusqu’à 30 de façon temporaire, pendant 10 semaines.
C’est l’organisme à but non lucratif NWT Integration & Community Services qui a obtenu le contrat de gestion du camp.
Son directeur, Eric Neba, raconte que les journées sont remplies d’activités, comme fendre du bois de chauffage ou cuisiner. Les participants peuvent aussi faire de la pêche sur la glace, du trappage et du perlage, appuyés par des aînés autochtones.
Du counseling et des services médicaux d’urgence sont aussi des services offerts aux participants, qui sont, pour la majorité, des personnes sans domicile fixe. L’utilisation de substances psychotropes est aussi interdite, une condition préalable à la participation.
« On a des gens qui sont plus ou moins sobres, qui sont prêts à atteindre ce but dans leur vie », explique Eric Neba.

(Radio-Canada / Julie Plourde)
Une bénédiction
Eric Neba est persuadé que ce modèle de camp, qui s’appuie sur des éléments de la culture autochtone et la nature, est un succès. La majorité des participants sont Autochtones, dit-il, et son organisme travaille de près avec eux depuis quelques années.
« C’est un programme dont on a bien besoin. [Les participants] sont habitués à être dans la nature. Un programme comme celui-ci est en fait très utile pour leur sécurité et leur processus de guérison », explique-t-il.
Tiffany Thrasher peut en témoigner. Aux prises avec des problèmes de dépendance et de santé mentale, elle a arrêté de consommer quelques jours avant d’arriver au camp.
La femme de 29 ans vivait dans une tente l’été dernier au centre-ville de Yellowknife, où elle ne se sentait pas en sécurité. Elle estime que l’environnement que lui offre ce camp l’aide à guérir de ses démons.
« Être dans la nature, cela a un côté vraiment guérisseur. Je me sens plus près de Jésus et du Créateur », raconte-t-elle.
Être ici et être nourrie, avec un feu et un toit sur ma tête, c’est une bénédiction.
Tiffany Thrasher, participante

(Radio-Canada / Sarah Krymalowski)
William Allister, 55 ans, résidait au refuge pour hommes de l’Armée du Salut avant de s’installer au camp. Également aux prises avec des problèmes de dépendance, il dit que l’éloignement de la ville lui fait du bien.
« C’est tranquille, apaisant. C’est beau ici, et je me sens en sécurité. Et [c’est bien] d’être loin de la ville et de ses tentations », raconte-t-il.
Après quelques jours de sobriété seulement, il se sent plus fort et plus confiant, grâce au soutien des employés du camp.
Des solutions pour les personnes en crise
Le coût de ce camp est de 642 000 $, financé majoritairement par Ottawa. Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest n’a pas confirmé si cette initiative sera prolongée après 10 semaines ni quel soutien sera offert aux participants par la suite.
Le directeur de l’Armée du Salut de Yellowknife, Tony Brushett, estime toutefois que ce camp ne répond pas aux besoins de beaucoup de personnes sans-abri. Il dit qu’il n’a pas fait partie des discussions ayant mené à sa création.
Selon lui, la meilleure solution à la crise de l’itinérance à Yellowknife aurait été de créer un refuge de 30 à 40 lits en ville avec des services en santé mentale et en traitement des dépendances. Beaucoup de clients sont bannis temporairement des refuges, car ils sont violents ou en crise.
Ce refuge sur la route Ingraham est ouvert à ceux qui sont complètement à l’opposé de ce spectre : des gens qui ne consomment pas, qui sont pour la plupart sobres et abstinents.
Tony Brushett, directeur de l’Armée du Salut de Yellowknife
« Nous ne sommes pas outillés pour gérer des gens qui sont en crise de santé mentale ou en crise causée par les drogues », dit Tony Brushett.
« Mon rêve à court terme était d’avoir quelque chose ici en ville jusqu’en avril ou en mai, jusqu’à ce que la température soit plus clémente », dit-il.
Tony Brushett dit qu’il s’inquiète pour ces personnes bannies des refuges. On a eu des nuits à -40 avec le facteur éolien. J’espère que, si ces personnes sont dans la rue, elles sont au moins dans des conditions qui leur permettent d’être à l’aise la nuit.
Avec les informations de Sarah Krymalowski
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