La fonte du pergélisol perturbe la préparation d’un plat traditionnel inuit

Un village près de l'eau.
Depuis des générations, les familles inuit d’Igloolik utilisent le pergélisol pour préparer l’igunaq, soit de la viande de morse fermentée. Cependant, le réchauffement climatique modifie la nature même du sol. (Photo d’archives) Photo : CBC/Meagan Deuling

Dans le Grand Nord canadien, la fonte du pergélisol, qui est un sol gelé en permanence, menace non seulement l’igunaq, un plat traditionnel inuit, mais aussi la santé des habitants.

Les chasseurs d’Igloolik, au Nunavut, savent depuis longtemps qu’ils doivent creuser sous la couche de gravier pour atteindre le pergélisol afin de préparer un plat traditionnel très apprécié : l’igunaq, soit de la viande de morse fermentée.

Tout d’abord, ils découpent le morse, cousent à nouveau sa chair et sa graisse dans sa peau, puis l’enterrent dans le sol gelé. La viande est laissée à fermenter pendant plusieurs mois avant d’être consommée. Idéalement, l’animal est enterré sur un lit de granit, ce qui permet une bonne circulation de l’air tout en le protégeant également de la lumière.

Toutefois, les chasseurs affirment que le sol ne réagit plus de la même manière. « Aujourd’hui », on doit creuser davantage, car le pergélisol n’est plus aussi accessible, explique le chasseur David Irngaut.

Des conséquences inquiétantes

En 2022, l’entreprise de recherche autochtone Firelight, en partenariat avec l’Institut climatique du Canada, a publié un rapport sur les conséquences de la fonte du pergélisol dans les communautés autochtones du Nord.

Le dégel déstabilise le sol, ce qui peut entraîner des affaissements et des glissements de terrain, menaçant ainsi les infrastructures et les routes. Mais cela a également un impact sur la conservation des aliments. Cette instabilité du terrain expose les couches plus profondes à l’air, accélérant ainsi la fonte et nuisant à la possibilité de faire fermenter la viande de morse.

Par conséquent, les maladies contractées par l’ingestion d’aliments récoltés risquent de devenir plus courantes, lit-on dans le rapport.

Des morses sur une banquise.
Les morses peuvent atteindre un poids de 1500 kg. Photo : The Associated Press / Joel Garlich-Miller

Des organismes de santé publique ont précédemment mis en garde contre les dangers du botulisme (intoxication alimentaire) associés aux variations de température pendant la période de fermentation. Cette maladie, causée par une bactérie, peut mener à la paralysie, de même qu’à des difficultés respiratoires.

En 2016, des cas de botulisme ont été signalés à Sanikiluaq et ils étaient directement liés à la consommation d’igunaq.

Ailleurs en territoire inuit, la Régie régionale de la santé et des services sociaux du Nunavik recommande de commencer le processus de fermentation en automne pour s’assurer qu’il se déroule pendant les mois les plus froids.

Outre le morse, Sandy Akavak, un chasseur de Kimmirut, soutient que le réchauffement climatique a également transformé la méthode de conservation du phoque. Auparavant, les Inuit laissaient les phoques fermentés dans l’ombre, ils ne les enterraient pas.

Cette méthode dépend d’une température froide constante, ce qui n’est plus garanti.

Enfin, les deux chasseurs, David Irngaut et Sandy Akavak, craignent que la méthode traditionnelle de préparation de ce plat délicieux disparaisse à jamais en raison du réchauffement climatique.

Avec les informations de Carl Cardinal

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