À quoi sert la COP24 en Pologne?

Le ministre polonais de l’Environnement Michal Kurtyka prend la parole lors de la session d’ouverture de la COP24 à Katowice, en Pologne. (Janek Skarzynski/Getty Images)
La 24e Conférence des Nations unies sur les changements climatiques (COP24) a débuté lundi à Katowice, en Pologne. Au cours des deux prochaines semaines, des représentants de 195 pays tenteront de donner un nouveau souffle à l’Accord de Paris. Face à l’urgence climatique, force est de constater que les gestes posés ne sont pas toujours à la hauteur du défi décrit par les scientifiques. Dans ce contexte, à quoi servira la COP24?

Commençons d’abord par réduire les attentes : la Conférence ne sauvera pas le sort de la planète, n’aboutira pas à une conclusion spectaculaire qui fera la une des médias et ne passera pas à l’histoire comme étant la rencontre qui a fait basculer la planète dans un monde sobre en carbone.

Cela dit, on aurait tort de penser que la rencontre ne servira à rien. Au contraire. La COP24 est la suite nécessaire d’un processus qui a débuté il y a près de trente ans et qui s’est accéléré depuis la signature de l’Accord de Paris en 2015 : celui d’une prise de conscience universelle des effets d’une planète qui se réchauffe.

Sauf que, loin d’être un aboutissement, l’Accord de Paris n’aura été qu’une première étape, essentielle, à laquelle tous les pays de la planète, sans exception, ont souscrit.

Comment faire respecter un accord non contraignant?

En vertu de l’Accord de Paris, chacun des 195 pays signataires s’est engagé à soumettre une cible de réduction des émissions de gaz à effet de serre, une première.

Sauf que l’entente a un grand défaut : elle n’entraîne aucune obligation contraignante. Tous les pays ont soumis des cibles de réduction des émissions de gaz à effet de serre, mais aucune sanction n’est prévue s’ils ne tiennent pas parole.

C’est à ce titre que la COP24 de Katowice est importante : elle vise à mettre en place des règles pour s’assurer que les pays honorent leurs promesses.

Les scientifiques nous répètent quotidiennement que le temps presse, et le plus récent rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) nous en a donné une preuve convaincante. Si on veut contenir le réchauffement planétaire à moins de 2 degrés Celsius, il y a urgence, les bonnes intentions ne suffisent plus.

Transparence, finances et pression morale

L’enjeu principal de la conférence sera d’améliorer la transparence et le suivi des engagements climatiques des pays. Il s’agit de se mettre d’accord sur une structure pour que les pays rendent des comptes. Quelles sont les mesures mises en place? Quels sont les effets concrets de ces mesures sur la réduction totale des émissions?

Les pays devront aussi s’entendre sur l’aide accordée aux pays en développement. Les signataires de l’Accord de Paris se sont engagés à fournir 100 milliards de dollars par année aux pays les plus vulnérables à partir de 2020 afin de les aider à lutter contre les changements climatiques et à s’y adapter.

Un stade de Katowice où se déroule la COP24, en Pologne. (Kacper Pempel/Reuters)
Qui paiera? Qui recevra? Qui va gérer le flux d’argent?

Des questions épineuses sur lesquelles les pays tenteront de s’entendre à Katowice. Cette transparence est une étape essentielle pour instaurer une dynamique de confiance. Car, en rendant publiques les informations, on espère que les cancres du climat, face à une pression morale plus importante, soient incités à agir.

« Ça a l’avantage que les pays, sur le plan international, sont confrontés à une réputation qu’ils doivent préserver », dit Annie Chaloux, professeure à l’École de politique appliquée de l’Université de Sherbrooke.

Et plus nombreux seront les pays à rendre publiques leurs actions, plus forte sera la pression morale pour les autres d’agir.

« Le problème des changements climatiques, c’est vraiment comme un genre de restructuration de l’économie, donc c’est quelque chose qui fait peur », dit Catherine Potvin, professeure au Département de biologie de l’Université McGill et ancienne négociatrice climatique pour le Panama.

« Chaque pays regarde le voisin en disant :  » Il fait quoi, le voisin?  » Et je pense qu’une des choses les plus importantes, c’est d’avoir la possibilité de parler à ses voisins et de voir ce qu’ils font. »

Catherine Potvin, professeure à l'Université McGill

Finalement, le but sera non seulement de forcer les pays à respecter leurs promesses, mais aussi de mettre en place un mécanisme pour les inciter à rehausser leurs ambitions. L’Accord de Paris prévoit que les cibles de réduction d’émissions soient révisées à la hausse tous les cinq ans.

Comme nous l’apprenait ONU Environnement la semaine dernière, les cibles de réduction des émissions qui sont actuellement avancées nous mènent plutôt vers un réchauffement d’environ 3 degrés Celsius. Il faudra faire plus, rapidement.

Les négociations climatiques : un mal nécessaire

C’est pourquoi la COP24 de Katowice est importante, tout comme l’était la COP23 l’année dernière ou que le seront la COP25 l’année prochaine et toutes celles à venir.

Parce que l’enjeu climatique dépasse de loin les seules questions environnementales.

Il combine la finance, l’aide aux pays en développement, la coopération scientifique, la technologie, le développement de l’agriculture et de nombreux autres outils qui visent à régler un problème difficile : comment faire pour convaincre les êtres humains de changer leur mode de vie pour retrouver une planète sobre en carbone?

Pensez-y : aucun enjeu actuel ne fait l’objet d’une négociation aussi large et aussi complexe que la question des changements climatiques. Le seul fait de rassembler tous les pays de la planète – il n’en manque pas un! – dans un accord sur le climat, c’est un exploit en soi.

195 pays, dont certains sont extrêmement pauvres, d’autres en guerre, d’autres dirigés par des dictatures ou peuplés de minorités autochtones, criblés de dettes ou enrichis par l’exploitation pétrolière.

Ne serait-ce que pour cette improbable union d’intérêts si divergents, les conférences des Nations unies sur les changements climatiques valent la peine qu’on s’y intéresse de près.

Étienne Leblanc, Radio-Canada

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