Le réchauffement climatique dans l’Arctique lié à une baisse des précipitations près de l’équateur
Les contrecoups des changements climatiques dans l’Arctique dépassent les limites du cercle polaire. Une récente étude de la Northern Arizona University, dans le sud des États-Unis, conclut que le réchauffement climatique dans l’Arctique a diminué la quantité de précipitations au niveau de l’équateur il y a près de 10 000 ans.
« Un changement dans la différence de températures entre l’équateur et le pôle Nord a influé sur la circulation des vents », mentionne le chercheur Département des sciences de la Terre et de la durabilité de la Northern Arizona University, Cody Routson, en entrevue téléphonique avec Regard sur l’Arctique.
Selon le chercheur et premier auteur de l’étude, les contrastes de températures entre ces deux régions sont essentiels au maintien de l’équilibre climatique. S’il est bouleversé et que les températures dans l’Arctique augmentent, les précipitations au niveau de l’équateur deviennent moins fréquentes, la puissance des cyclones diminue et le courant-jet polaire de l’hémisphère Nord s’affaiblit. En d’autres termes, explique Cody Routson, les conditions deviennent plus propices à une période prolongée de sécheresse.
L’étude, publiée le 27 mars dans la revue scientifique Nature, visait à mesurer l’impact des changements climatiques dans l’Arctique sur les latitudes moyennes du début jusqu’au milieu de la période de l’Holocène, l’époque géologique qui s’étend environ sur les 10 000 dernières années. Selon le groupe de chercheurs affiliés à des universités des États-Unis et de Belgique, si les mêmes mécanismes qu’ils ont observés se reproduisent, tout porte à croire que les ressources en eau au niveau de l’équateur n’iront qu’en s’amenuisant au fil du temps.
Le poids de l’Arctique
Avant d’entamer ses recherches, le chercheur n’avait pas l’intention de se concentrer sur l’Arctique, mais l’incidence climatique de cette région sur les latitudes moyennes était telle qu’il a rapidement réorienté son cadre d’analyse. « Initialement, je m’étais concentré sur une plus petite échelle de grandeur, indique Cody Routson. Ma recherche portait sur les 2000 dernières années et sur les différentes périodes de sécheresse qui s’y sont succédé. »
Le groupe de chercheurs a collecté des données publiques de 219 sites à travers le monde avant de catégoriser leurs résultats en trois périodes distinctes, soit les 100, 2000 et 10 000 dernières années. « Nous avons colligé plusieurs données qui n’avaient jamais été rassemblées avant », affirme-t-il.
Les scientifiques se sont aussi intéressés aux conséquences de plus faibles écarts de températures entre les deux régions sur le courant-jet polaire, une ceinture de vents polaires de l’hémisphère Nord qui se déplace à haute altitude et influe à la fois sur les masses d’air, sur les températures et sur les niveaux d’humidité autour de la Terre.
D’autres équipes de chercheurs se sont penchées sur la relation entre le climat des latitudes moyennes et le courant-jet polaire. Une précédente étude, parue en janvier 2018 dans Nature Communications, révélait que des anomalies du courant-jet polaire coïncidaient avec des événements météorologiques extrêmes survenus en Europe depuis 1960.
Différents mécanismes en cause
Même si le premier auteur de l’étude croit que les conclusions de son étude pourront servir à étudier les conséquences actuelles de la hausse des températures de l’Arctique sur d’autres régions du globe, Cody Routson mentionne que des nuances importantes sont à considérer. « Les mécanismes que nous observons aujourd’hui ne sont pas les mêmes qu’auparavant », fait-il remarquer.
Les chercheurs ont en réalité noté qu’une légère variation dans l’inclinaison de la Terre avait entraîné une réduction de la différence de températures entre l’Arctique et les latitudes moyennes. « Les précipitations annuelles ont diminué de 11 % à 29 % il y a environ 8000 ans », précise le chercheur.
Pour mener leur étude, les chercheurs ont reçu un financement notamment de la Fondation pour la science de l’Arizona et de la Fondation nationale pour la science.