Femmes autochtones : un soulagement pour les familles du Nord canadien

Deux ans presque jour pour jour après le début des travaux dans les territoires du Nord canadien de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles disparues et assassinées (ENFFADA), le rapport final est accueilli avec soulagement.
Les premiers témoins de l’ENFFADA ont été entendus à Whitehorse, dans le nord-ouest du Canada, en mai 2017. Starr Drynock faisait partie du nombre.
Elle n’a jamais connu sa mère, dont le corps a été retrouvé dans une rivière alors qu’elle n’était qu’un bébé. La police à l’époque a conclu au suicide, mais la famille a toujours plutôt cru à un meurtre.
« C’était la première fois que je parlais ouvertement et publiquement de son histoire et ce qui lui était arrivé. Ça m’a soulagée. […] J’ai réalisé que je n’étais pas seule. Il y avait d’autres familles, d’autres gens qui avaient traversé la même chose que moi. Alors c’était plus facile d’accepter et d’en parler », dit-elle.

Le dépôt du rapport, lundi, a de nouveau suscité beaucoup d’émotions pour Starr Drynock, qui salue le fait que la société agisse.
« J’espère voir des changements au sein du gouvernement et je vois déjà nos communautés travailler ensemble pour mettre un terme à tout cela. »
La jeune femme est toutefois d’avis que le terme génocide utilisé dans le rapport est le terme juste qui décrit le mieux ce que vivent les femmes autochtones.
« Lisez le rapport »
Laura Mackenzie avait pour sa part témoigné lors de l’audience à Rankin Inlet, au Nunavut (côte ouest de la baie d’Hudson), en 2018. Elle avait parlé de sa tante, qui s’était suicidée après avoir vécu des années d’abus sexuels par un membre de la famille.

Aujourd’hui, elle est surtout impressionnée par les recommandations des commissaires qu’elle qualifie de « soigneusement conçues ».
Elle dit toutefois ne pas être convaincue que les recommandations seront mises en place si le gouvernement change après les élections fédérales d’octobre.
Des recommandations qui auraient été utiles
La nièce d’Anne Catholique, Charlene Catholique de Lutselk’e, avait 15 ans lorsqu’elle a été portée disparue près de Behchoko, dans les Territoires du Nord-Ouest (Nord canadien), en 1990.
Dix-sept ans plus tard, la Cour suprême des Territoires du Nord-Ouest a conclu qu’il existait des motifs raisonnables de présumer que Charlene était morte.

Selon Anne Catholique, si les recommandations déposées lundi avaient été en place avant la disparition de sa nièce, le résultat ne serait pas le même.
Anne Catholique est satisfaite du rapport et apprécie particulièrement l’appel à recruter davantage d’Autochtones dans les services de police.
Le Yukon satisfait
Le gouvernement du Yukon a accueilli favorablement par voie de communiqué le rapport final.
La ministre responsable de la Direction de la condition féminine, Jeanie Dendys, a affirmé que son gouvernement a soutenu dès le départ et tout au long les travaux de l’Enquête.

« On attendait les résultats depuis longtemps […] C’est très complexe et beaucoup de travail qui représente beaucoup pour nos familles qui ont perdu des êtres chers. »
Le territoire affirme avoir déjà entamé le travail entourant certaines recommandations contenues dans le rapport intermédiaire et entend maintenant réviser les nombreuses mesures suggérées dans le rapport final.
Les Inuits bien représentés
Des 231 appels à la justice du rapport final, 46 concernent spécifiquement la santé, les communautés, les terres, la justice, l’éducation, la sécurité et la culture des Inuits.
Le président de l’Inuit Tapiriit Kanatami, Nathan Obed, croit que les appels à la justice pourront servir aux gouvernements et aux organismes pour mettre en place de meilleures mesures pour réduire les risques de violence auxquels font face les femmes et les filles inuites.

« Ce travail commence par les hommes inuits – et particulièrement ceux d’entre nous qui sommes en position d’influence, qui ont la responsabilité de prendre la parole et les mesures nécessaires pour mettre fin à la violence envers les femmes et les filles dans nos demeures, nos collectivités et la société », a déclaré Nathan Obed par communiqué.
Le rapport prône d’ailleurs une meilleure sensibilisation pour lutter contre la banalisation de la violence familiale et sexuelle à l’égard des femmes, en particulier chez les hommes et les garçons inuits.
- Des organismes inuits satisfaits du rapport final de l’enquête sur les violences contre les femmes autochtones
- Femmes autochtones au Canada : Un rapport spécifique sur les ratés au Québec
- Des services par et pour les Inuits, recommande le rapport final de l’enquête sur les violences contre les femmes autochtones