Femmes autochtones : un soulagement pour les familles du Nord canadien

Les audiences de l’ENFFADA à Yellowknife, aux Territoires du Nord-Ouest, s’étaient tenues en janvier 2018. (Claudiane Samson/Radio-Canada)
Deux ans presque jour pour jour après le début des travaux dans les territoires du Nord canadien de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles disparues et assassinées (ENFFADA), le rapport final est accueilli avec soulagement.

Les premiers témoins de l’ENFFADA ont été entendus à Whitehorse, dans le nord-ouest du Canada, en mai 2017. Starr Drynock faisait partie du nombre.

Elle n’a jamais connu sa mère, dont le corps a été retrouvé dans une rivière alors qu’elle n’était qu’un bébé. La police à l’époque a conclu au suicide, mais la famille a toujours plutôt cru à un meurtre.

« C’était la première fois que je parlais ouvertement et publiquement de son histoire et ce qui lui était arrivé. Ça m’a soulagée. […] J’ai réalisé que je n’étais pas seule. Il y avait d’autres familles, d’autres gens qui avaient traversé la même chose que moi. Alors c’était plus facile d’accepter et d’en parler », dit-elle.

Starr Drynock avait donné son témoignage lors de l’audience de l’enquête à Whitehorse en mai 2017. (Jonathan Hayward/La Presse canadienne)

Le dépôt du rapport, lundi, a de nouveau suscité beaucoup d’émotions pour Starr Drynock, qui salue le fait que la société agisse.

« J’espère voir des changements au sein du gouvernement et je vois déjà nos communautés travailler ensemble pour mettre un terme à tout cela. »

La jeune femme est toutefois d’avis que le terme génocide utilisé dans le rapport est le terme juste qui décrit le mieux ce que vivent les femmes autochtones.

« Lisez le rapport »

Laura Mackenzie avait pour sa part témoigné lors de l’audience à Rankin Inlet, au Nunavut (côte ouest de la baie d’Hudson), en 2018. Elle avait parlé de sa tante, qui s’était suicidée après avoir vécu des années d’abus sexuels par un membre de la famille.

Laura Mackenzie a témoigné lors de l’audience à Rankin Inlet, au Nunavut, en 2018. (Radio-Canada)

Aujourd’hui, elle est surtout impressionnée par les recommandations des commissaires qu’elle qualifie de « soigneusement conçues ».

« Je recommande à tout le monde de lire le rapport et de se demander : ‘Qu’est-ce que je peux faire moi-même pour ma communauté et pour le Canada en entier?’ »

Laura Mackenzie, témoin de l’ENFFADA

Elle dit toutefois ne pas être convaincue que les recommandations seront mises en place si le gouvernement change après les élections fédérales d’octobre.

Des recommandations qui auraient été utiles

La nièce d’Anne Catholique, Charlene Catholique de Lutselk’e, avait 15 ans lorsqu’elle a été portée disparue près de Behchoko, dans les Territoires du Nord-Ouest (Nord canadien), en 1990.

Dix-sept ans plus tard, la Cour suprême des Territoires du Nord-Ouest a conclu qu’il existait des motifs raisonnables de présumer que Charlene était morte.

Une oeuvre collective de broderie a été créée par des femmes de tout le territoire pour commémorer les victimes des Territoires du Nord-Ouest. (Claudiane Samson/Radio-Canada)

Selon Anne Catholique, si les recommandations déposées lundi avaient été en place avant la disparition de sa nièce, le résultat ne serait pas le même.

Anne Catholique est satisfaite du rapport et apprécie particulièrement l’appel à recruter davantage d’Autochtones dans les services de police.

« Lorsqu’un enquêteur autochtone travaille dans le cadre de l’enquête, la famille se sent à l’aise […] car c’est comme un frère ou une sœur. C’est plus impliqué et attentionné. »

Anne Catholique
Le Yukon satisfait

Le gouvernement du Yukon a accueilli favorablement par voie de communiqué le rapport final.

La ministre responsable de la Direction de la condition féminine, Jeanie Dendys, a affirmé que son gouvernement a soutenu dès le départ et tout au long les travaux de l’Enquête.

La commissaire Michèle Audette écoute un témoignage lors des premières audiences à Whitehorse en 2017. (Jonathan Hayward/La Presse canadienne)

« On attendait les résultats depuis longtemps […] C’est très complexe et beaucoup de travail qui représente beaucoup pour nos familles qui ont perdu des êtres chers. »

Le territoire affirme avoir déjà entamé le travail entourant certaines recommandations contenues dans le rapport intermédiaire et entend maintenant réviser les nombreuses mesures suggérées dans le rapport final.

Les Inuits bien représentés

Des 231 appels à la justice du rapport final, 46 concernent spécifiquement la santé, les communautés, les terres, la justice, l’éducation, la sécurité et la culture des Inuits.

Le président de l’Inuit Tapiriit Kanatami, Nathan Obed, croit que les appels à la justice pourront servir aux gouvernements et aux organismes pour mettre en place de meilleures mesures pour réduire les risques de violence auxquels font face les femmes et les filles inuites.

Natan Obed, le président de l’Inuit Tapiriit Kanatami, présent à la réunion des premiers ministres à Montréal, vendredi 7 décembre 2018. (Ismaël Houdassine/Radio-Canada)

« Ce travail commence par les hommes inuits – et particulièrement ceux d’entre nous qui sommes en position d’influence, qui ont la responsabilité de prendre la parole et les mesures nécessaires pour mettre fin à la violence envers les femmes et les filles dans nos demeures, nos collectivités et la société », a déclaré Nathan Obed par communiqué.

Le rapport prône d’ailleurs une meilleure sensibilisation pour lutter contre la banalisation de la violence familiale et sexuelle à l’égard des femmes, en particulier chez les hommes et les garçons inuits.

Claudiane Samson et Mario De Ciccio, Radio-Canada

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