La recherche sur le climat dans l’Arctique canadien est sous-financée, selon un rapport

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Un rapport de l’organisation canadienne de recherche Evidence for Democracy et du Forum canadien sur le climat, rendu public mercredi, dresse un état des lieux du financement accordé par Ottawa aux projets de recherche sur le climat dans l’Arctique canadien. (Marie-Laure Josselin/Radio-Canada)
Le financement du gouvernement canadien destiné à la recherche sur le climat est insuffisant, particulièrement dans la région de l’Arctique, qui est frappée de plein fouet par la hausse des températures, conclut un récent rapport.

« La réduction de notre capacité de recherche scientifique sur le climat dans les régions du Nord et de l’Arctique non seulement entraîne une méconnaissance du Canada en matière de changements climatiques, mais elle échoue aussi à faire du Nord une priorité pour les politiques de gouvernance […] », peut-on lire dans le rapport de l’organisation canadienne de recherche Evidence for Democracy et du Forum canadien sur le climat, rendu public mercredi.

Pour parvenir à ce constat, les auteurs du rapport se sont appuyés sur des entrevues et un sondage menés auprès de 84 climatologues à travers le pays. Ils ont aussi procédé à une analyse des données fédérales qui portent spécifiquement sur le financement.

Dans 97 % des cas, les scientifiques sondés souhaitent un plus grand financement du gouvernement fédéral. Bon nombre d’entre eux s’inquiètent des retombées à long terme d’un manque d’investissements dont dépendent de nombreux projets de recherche dans l’Arctique canadien. Le coût élevé des déplacements est l’un des facteurs qui font grimper les dépenses des scientifiques qui s’y rendent pour effectuer de la recherche sur le terrain.

« La recherche fondamentale est extrêmement importante pour approfondir notre compréhension du climat », affirme le chercheur spécialisé en science atmosphérique et membre du conseil d’administration de l’organisation Evidence for Democracy, Dan Weaver, dans un communiqué de presse.

Surveillance en continu

Du dégel du pergélisol à la réduction de la superficie des glaces des mers, les changements qui ont cours dans l’Arctique canadien soulèvent de nombreuses questions auprès des scientifiques concernant l’adaptation des populations locales et des espèces animales qui y vivent.

Au mois d’avril, un récent rapport d’Environnement Canada révélait que le Nord canadien se réchauffait à un rythme trois fois plus élevé que le reste de la planète. La température moyenne y a augmenté de 2,3 °C entre 1948 et 2016, contre 1,7 °C dans l’ensemble du Canada.

Selon l’auteur principal du rapport et membre de l’organisation Evidence for Democracy, Tristan MacLean, le manque d’outils servant à la recherche en climatologie limite entre autres la capacité des scientifiques à effectuer de la surveillance en continu. « C’est un domaine multidisciplinaire très vaste dans lequel la recherche fondamentale peut révolutionner notre compréhension des systèmes climatiques, et pourtant nous en savons très peu sur l’efficacité des investissements actuels destinés à la climatologie », mentionne-t-il.

« Le gouvernement du Canada reconnaît l’importance de la rigueur scientifique dans la prise de décisions fondée sur des preuves et il s’engage à continuer de soutenir la climatologie au Canada », a pour sa part indiqué le ministère fédéral de l’Environnement et des Changements climatiques dans un échange de courriels.

La Station canadienne de recherche dans l’Extrême-Arctique (SCREA), à Cambridge Bay, au Nunavut. (Jimmy Thomson/CBC)
Concurrence à l’international

Plus de 80 % des scientifiques sondés ont exprimé leur inquiétude face à l’approche actuelle d’Ottawa concernant le financement de la recherche climatique. Le manque d’investissements dans ce secteur pousse les chercheurs hautement qualifiés à quitter le pays, ont par ailleurs conclu 77 % des répondants. D’autres scientifiques optent pour des secteurs de recherche qui bénéficient de meilleurs financements ou changent de choix de carrière, indique le rapport.

Selon l’un des répondants cités dans le document, les scientifiques qui travaillent aux États-Unis ou en Europe sont plus avantagés que leurs collègues canadiens, puisqu’ils bénéficient d’investissements constants. « Au Canada, le financement dans la recherche a des hauts et des bas, explique-t-il. Une certaine constance est nécessaire afin de maintenir une communauté scientifique compétente et active. »

Auparavant, la communauté scientifique pouvait compter sur la Fondation canadienne pour les sciences du climat et de l’atmosphère, fondée en 2000 pour financer des projets de recherche en milieu universitaire, ainsi que le programme Recherche sur les changements climatiques et l’atmosphère (RCCA), lancé en 2012 par le gouvernement de l’ancien premier ministre canadien Stephen Harper.

Le programme disposait d’un budget allant jusqu’à 35 millions de dollars sur cinq ans pour financer annuellement sept projets de recherche pilotés par une université du pays. En 2018, le gouvernement du premier ministre Justin Trudeau a toutefois décidé de ne pas le reconduire.

Depuis 2016, Ottawa travaille sur l’élaboration d’un cadre stratégique pour l’Arctique et le Nord qui doit orienter les priorités, les activités et les investissements du gouvernement fédéral dans la région d’ici 2030.

Le rapport comporte plusieurs recommandations qui vont de l’amélioration de la rétention des chercheurs en début de carrière à la mise en place d’une base de données publique portant sur le climat et la recherche dans l’Arctique.

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