De la chaleur issue du noyau terrestre accélérerait la fonte des glaces en Arctique
La fonte accélérée des glaces en Arctique est en grande partie attribuable au réchauffement climatique selon de nombreuses études, mais de nouvelles recherches révèlent que d’autres phénomènes l’amplifieraient.
Des chercheurs ont ainsi découvert la présence sous le Groenland d’une remontée de roches chaudes, appelée panache mantellique, provenant des profondeurs de notre planète.
Ce panache aurait pour effet de faire fondre la glace par dessous, selon Dr Genti Toyokuni, co-auteur de l’étude publiée en deux parties dans Journal of Geophysical Research.
Plusieurs points de sortie, une seule origine
L’activité géothermique dans l’Arctique n’est pas inconnue des scientifiques.
Des recherches précédentes ont démontré que l’Islande et l’île Jan Mayen, une île volcanique norvégienne située entre les mers de Norvège et du Groenland, avaient chacune des volcans actifs avec leurs propres panaches mantelliques. Les volcans constituent généralement le point de sortie des panaches mantelliques.
L’archipel norvégien du Svalbard est quant à lui considéré comme une zone géothermique où un flux de chaleur élevé réchauffe les eaux souterraines.
Toutefois, l’origine de ces activités et leur relation a été très peu explorée jusqu’ici.
Ainsi, les chercheurs de l’université japonaise de Tohoku ont découvert un lien entre ces différents points : le panache du Groenland. Ils ont observé qu’il s’élevait de la limite noyau-manteau, la zone de séparation entre le noyau terrestre et le manteau, jusqu’à la zone de transition du manteau sous le Groenland.
Les scientifiques ont notamment remarqué que le panache du Groenland a deux branches additionnelles dans le manteau inférieur qui alimentent d’autres panaches dans la région. Cela fournit notamment de la chaleur aux régions actives d’Islande et de Jan Mayen et à la zone géothermique du Svalbard.
Rappelons que la Terre est constituée d’une croûte sur laquelle nous marchons, puis, plus en profondeur, d’un manteau suivi de la limite noyau-manteau et enfin du noyau. Le manteau terrestre est quant à lui divisé en un manteau supérieur et inférieur. La zone de transition du manteau, située vers 410 et 660 kilomètres de profondeur, se situe entre les deux.
La tomographie sismique
Afin de parvenir à ces résultats, l’équipe du Dr Genti Toyokuni s’est basée sur des mesures de la structure de la vitesse sismique en 3D de la croûte et de l’intégralité du manteau sous ces régions.
« La façon la plus directe de cartographier la structure interne du manteau est d’utiliser les ondes sismiques », explique une étude de l’ENS de Lyon sur la dynamique du manteau terrestre. « Les sismologues exploitent principalement les temps de parcours des différentes ondes enregistrées sur des milliers de sismographes de par le monde. »
Cette méthode, la tomographie sismique, est similaire à un scanner du corps humain. Elle permet de créer des modèles en trois dimensions qui révèlent la structure à grande échelle du manteau terrestre.
Pour réaliser son étude, Dr Toyokuni a installé des sismographes sur la calotte glaciaire du Groenland dans le cadre du réseau de surveillance de la calotte glaciaire du Groenland (Greenland Ice Sheet Monitoring Network en anglais). Mis en place en 2009, le projet réunit des chercheurs de 11 pays.
L’équipe conjointe États-Unis–Japon est principalement responsable de la construction et de la maintenance des trois stations sismiques sur la calotte glaciaire.
Le co-auteur de l’étude ne compte toutefois pas s’arrêter là et espère pouvoir analyser le processus thermique plus en détail.
« Cette étude a dévoilé le tableau d’ensemble. Ainsi, l’analyse des panaches à un niveau plus localisé devrait révéler encore plus d’informations », conclut-il.