Pour un partage des savoirs agroalimentaires

Les serres dans le Grand Nord canadien sont un exemple d’initiative agricole arctique. Les différents acteurs du milieu travaillent souvent en vase clos. (Todd Korol/Reuters)
Alors que le fédéral propose un nouveau programme de subvention pour l’innovation en agriculture nordique, la Territorial Agrifood Association participe à deux projets pour partager les savoirs dans ce domaine.

La taille du territoire, combinée à la multiplicité des juridictions, fait en sorte que plusieurs projets agroalimentaires nordiques se développent en vase clos, sans qu’il y ait transmission des expériences et des bonnes pratiques à travers un réseau ou une organisation.

« Trouver une façon de partager expérience et idées serait excellent », estime Andrew Spring, un chercheur de l’Université Wilfrid Laurier qui collabore à des projets agricoles à Kakisa et à Déli?ne. Il y a de petits réseaux, constate-t-il, mais pas à grande échelle.

« Nous faisons la même chose encore et encore parce que nous nous parlons rarement, déplore M. Spring. Je ne sais même pas si CIRNAC [Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada] et CanNor [Agence canadienne de développement économique du Nord] se parlent ! »

Les choses pourraient changer. La Territorial Agrifood Association, qui représente les joueurs de l’agroalimentaire des Territoires du Nord-Ouest, est associée à deux projets de partages de savoir, l’un à l’échelle canadienne, l’autre au niveau territorial.

Naurvik est le nouveau projet de serre à Gjoa Haven de l’Artic Research Foundation dont la capsule agricole est alimentée par l’énergie éolienne et solaire. (Thomas Surian)

Professeur de l’Université Memorial de Terre-Neuve-et-Labrador, Adrian Unc est l’initiateur d’un projet en instance de financement fédérant des institutions académiques de plusieurs provinces ainsi que l’Université du Yukon.

Il s’agit de construire une base de données sur les projets agroalimentaires en milieu boréal et arctique, autant pour partager que pour développer le savoir et l’innovation. Le professeur Unc souhaite également former à l’agriculture le plus grand nombre possible d’étudiants nordiques.

Selon ce spécialiste des sols, beaucoup de personnes au Nord pratiquent l’agriculture en dilettante. « Au Yukon, par exemple, note-t-il, il y a quelques gestionnaires de projets, mais pas vraiment de scientifiques […] Les collectivités ne peuvent supporter ça financièrement. Nous voulons créer une sorte de réseau institutionnel virtuel […] à travers le Canada qui intègre les ressources et les aptitudes requises au lieu d’avoir ça en un seul lieu. »

Les partenaires du projet demandent au gouvernement canadien, par l’entremise du fonds Nouvelles frontières en recherche, un montant de 16 M$ pour six ans. La réponse des bailleurs de fonds devrait être connue en septembre.

Archives agricoles et webinaires

À une échelle ténoise et avec la participation du Collège Aurora, la Territorial Agrifood Association fait de la création d’un portail de la connaissance pour soutenir l’agroalimentaire local, les individus et les compagnies, une de ses priorités.

« Nous n’avons pas encore décidé à quoi ça ressemblerait, explique la directrice générale de l’Association, Amy Lemay, mais nous voulons numériser de vieux rapports et documents, comme une bibliothèque des archives agricoles des T.N.-O. […] Une autre idée serait de diffuser des webinaires sur différentes thématiques de l’agriculture et de l’agroalimentaire. Ce serait ouvert au grand public. »

Mme Lemay ignore la date de mise en ligne du portail. Par contre, le site Internet de son association devrait l’être en avril.

1 million $ pour l’innovation

Défi innovation alimentaire dans le Nord, le nouveau programme de subvention de l’Agence canadienne de développement économique du Nord, a pour objectif de « soutenir des projets communautaires novateurs axés sur les systèmes locaux et autochtones de production alimentaire et visant à améliorer la sécurité alimentaire dans les territoires ».

L’innovation est ici entendue dans un sens large, qui peut autant toucher la production, la mise en marché, la distribution que le transport des aliments.

Dans la phase 1, dont l’échéance est le 31 mars, les demandeurs peuvent obtenir jusqu’à 250 000 $ de financement. Dans la phase 2, cette somme atteint 1 million $. Jusqu’à trois des projets financés durant la phase 1 pourraient recevoir ce financement. On saura en 2021 quels projets ont été retenus.

Une serre hydroponique aménagée dans un conteneur, dans le village nordique de Kuujjuaq, produira de 300 à 400 plants de légumes par semaine. Courtoisie de Nathan Cohen-Fournier)
Entrepreneuriat et innovation

Les serres communautaires d’Inuvik présentent un projet. « Il y a un peu de frustration sur le fait d’investir une énorme quantité de temps sans être payés pour participer à ces programmes de subvention, concède la directrice de l’organisme, Ray Solotki, et ce serait mieux s’il y avait un financement de base disponible pour chaque région. »

Quant à elle, Amy Lemay juge qu’il s’agit d’un bon programme, avec toutefois certaines faiblesses. « Les critères d’éligibilité devraient mettre l’emphase sur l’entrepreneuriat, considère-t-elle. Si l’appliquant principal est une petite ou moyenne entreprise, la subvention maximale est de 100 000 $. »

Or, pour Amy Lemay, « être un bon entrepreneur donne de meilleures possibilités de résoudre le problème de la sécurité alimentaire, à travers la la réduction de la pauvreté et la création d’emploi. Je pense qu’il aurait dû y avoir un financement égal. » Elle considère en outre que l’innovation a une plus grande chance de fonctionner lorsqu’elle est appuyée par des qualités entrepreneuriales.

Denis Lord, L'Aquilon

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