Dans le Grand Nord canadien, l’augmentation du nombre de permis pour voir les ours polaires fait débat
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À Churchill, au Manitoba, l’année dernière, le gouvernement a remis deux nouveaux permis à l’entreprise touristique Lazy Bear Expeditions pour accéder aux ours polaires. Cette décision est décriée par les Premières Nations et les environnementalistes.
Le processus d’attribution a manqué de transparence et aura un effet négatif sur l’environnement, selon les deux groupes.
Aucun nouveau permis permettant d’utiliser le réseau de sentiers hors de l’aire de gestion de la faune n’avait été délivré depuis 1984. Leur nombre était limité à 18 afin de préserver l’écosystème et la qualité de l’offre touristique.
« Nous sommes extrêmement déçus des mesures prises par le gouvernement », a déclaré le PDG de Frontiers North Adventures, John Gunter.
L’entreprise a détenu 12 des 18 permis pour la conduite de véhicules dans la toundra pendant des décennies.
Gunter n’a pas été averti que le gouvernement envisageait d’augmenter le nombre de permis.
Le propriétaire de Lazy Bear Expeditions, Wally Daudrich, n’a pas répondu aux demandes de commentaires.
Daudrich a fait campagne pour les conservateurs fédéraux dans la circonscription de Churchill en 2011.
C’est un donateur annuel des progressistes-conservateurs, avec un montant maximal de 5000 $ en 2019, selon les rapports annuels d’Élections Manitoba.
Des contestations
La Première Nation crie de Fox Lake, dont les terres traditionnelles comprennent la partie sud de la zone de gestion de la faune de Churchill, affirme également ne pas avoir été informée de l’attribution de nouveaux permis.
« Il n’y a eu aucune consultation avec notre conseil de gestion des ressources ou notre communauté », dit son chef, Morris Beardy.
L’autre entreprise possédant ces permis, Great White Bear Tours, a attaqué le gouvernement en justice l’année dernière pour tenter d’obtenir la révocation des permis de Lazy Bear, qui auraient été remis de « manière discriminatoire, partiale et injuste ».
Aucune date d’audience n’a encore été fixée.
Un peu de soutien
Dennis Compayre, pisteur d’ours polaires dans la région depuis 40 ans, se réjouit de la rupture du monopole détenu par les deux autres sociétés.
« Wally Daudrich est un travailleur acharné qui a essayé de pénétrer dans le secteur, mais bien sûr, on lui a claqué la porte au nez », affirme M. Compayre. « Ces deux entreprises bénéficient de grandes libertés et d’avantages que personne d’autre n’a. »
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Selon lui, les 18 permis ne sont pas tous utilisés chaque jour. Ainsi, si M. Daudrich sort avec ses deux véhicules toundra, cela ne dépasserait pas le nombre de véhicules initialement plafonné.
Cette limite a été imposée en raison de préoccupations concernant l’impact de cette circulation de véhicules sur la végétation et les zones humides.
La province révise le tourisme à Churchill
Une demande d’entrevue quant au processus d’attribution des permis avec le ministre de l’Agriculture, Blaine Pedersen, a été refusée.
Un porte-parole a déclaré dans un communiqué que le secteur de l’écotourisme de Churchill a « grandi et évolué » depuis l’introduction des restrictions initiales et que le gouvernement est en train de revoir l’ensemble du secteur dans la région, y compris le système de permis.
Il a également maintenu qu’il n’était pas nécessaire de consulter les groupes autochtones lorsqu’il s’agit d’administrer l’aire de gestion de la faune, car cela « ne concerne pas l’exercice des droits autochtones ou issus de traités. »
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John Gunter soutient que ce n’est pas le moment d’ajouter plus de circulation dans un écosystème qui est déjà aux prises avec le réchauffement climatique et à la diminution des observations d’ours.
Un examen indépendant commandé en 2015 par le précédent gouvernement néo-démocrate s’est penché sur le tourisme à Churchill.
Il a recommandé de maintenir le nombre de 18 véhicules autorisés afin de ne pas aggraver les facteurs environnementaux qui pourraient avoir un impact sur le nombre d’ours dans la région.
La Société pour la nature et les parcs du Canada s’est dite « très inquiète » que le gouvernement choisisse d’aller à l’encontre du plan de gestion de la région.
Avec les informations de Kristin Annable