L’Inuk Tarralik Duffy, lauréate 2020 du prix commémoratif Kenojuak Ashevak

L’œuvre « Kapuivik is my home » de Tarralik Duffy. (Tarralik Duffy)
L’Inuk Tarralik Duffy a été nommée lauréate du prix commémoratif Kenojuak Ashevak pour 2021. L’artiste multimédia, dont l’œuvre est souvent connue pour son humour et ses références à la culture pop, recevra la somme de 10 000 $.

« J’étais émue, et je le suis encore », a déclaré Mme Duffy lors d’une entrevue téléphonique. « C’est tellement touchant et émouvant de savoir que les gens croient en moi et en mes idées. C’est un tel honneur. »

L’artiste est originaire de Salliq (Coral Harbour), dans le territoire arctique oriental du Canada, le Nunavut, et vit à Saskatoon, une ville du sud du pays. Ses œuvres vont de l’art graphique aux bijoux en passant par les vêtements.

Heather Campbell, directrice des initiatives stratégiques de la Fondation de l’art inuit, l’organisme qui a créé le prix, estime que l’une des nombreuses forces de l’œuvre de Mme Duffy est qu’elle s’adresse à une jeune génération d’Inuit.

« Le travail de Tarralik est si spécial parce qu’il est un excellent exemple de l’art que fait sa génération en ce moment », a dit au bout du fil Mme Campbell.

« Les générations précédentes, les premiers artistes inuit contemporains à partir des années 1950, se souviennent de leur enfance ou de leur vie de jeune adulte sur la Terre. Mais notre génération a vécu en ville la plupart du temps et Tarralik dépeint des objets quotidiens que l’on peut trouver dans n’importe quelle maison inuit du Nord, comme des récipients de lait Carnation ou des conserves de viande comme Klik. »

« Tout cela est très proche de notre génération et je pense que c’est aussi une des raisons pour lesquelles son travail est si spécial, a précisé la directrice. Elle ne fait pas seulement de l’art pour un public du Sud. Je pense surtout qu’elle fait de l’art pour les autres Inuit aussi. »

Kenojuak Ashevak (1927-2013) est une artiste inuit renommée qui a vécu la majeure partie de sa vie à Cape Dorset, dans le Nunavut. Ses images iconiques représentant les animaux et la faune de l’Arctique lui ont valu une réputation mondiale.

L’œuvre Klik de Tarralik Duffy. « J’aime les jeux de mots et dessiner ce qui m’entoure, explique l’artiste à propos de l’intégration d’éléments de la culture pop dans son travail. « Vous ne pouvez pas être au Nunavut sans voir des choses comme des canettes de boisson gazeuse, elles sont partout. Il y a une façon particulière d’empiler les choses sur les étagères au Nunavut, et cela contraste tellement avec la terre qui nous entoure. Ces choses sont donc très présentes à l’esprit. Et lorsque les idées me viennent en tête, je dois les suivre. » (Tarralik Duffy)
« Le plus grand des honneurs »

Le prix biennal Kenojuak Ashevak Memorial Award a été créé en 2014 afin de récompenser les artistes inuit en milieu de carrière. Le prix de cette année devait être remis en 2020, mais a été reporté en raison de la pandémie.

Tarralik Duffy indique que cette reconnaissance au nom d’Ashevak a rendu le prix particulièrement significatif pour elle.

« Son art est si vivant, sa présence est palpable dans ses créations, a lancé l’artiste. C’est une femme puissante, une force vive. J’ai toujours admiré son travail et je me souviens avoir voulu toucher ce qu’elle avait touché. Ce prix est donc le plus grand des honneurs. »

Le prix est entièrement financé par des donateurs et décerné par un jury inuit. Cette année, les jurés étaient Laakkuluk Williamson Bathory, une artiste de performance et la première lauréate du prix Kenojuak Ashevak Memorial, Jocelyn Piirainen, une conservatrice, et Ossie Michelin, un cinéaste et un écrivain.

Nouveauté cette année, la gagnante aura droit à une exposition individuelle au pavillon Qaumajuq du Musée des beaux-arts de Winnipeg (WAG), au Manitoba, ainsi qu’à une résidence. Le WAG fera également l’acquisition d’une de ses œuvres pour l’intégrer à la collection permanente.

« Le fait de créer quelque chose à partir de l’expérience inuit et de le partager est tellement excitant. J’ai hâte de donner tout ce que j’ai », a ajouté Tarralik Duffy.

L’œuvre « Qinalugaq/Beluga Bone Dangles » de Tarralik Duffy (Tarralik Duffy)

Selon la directrice Heather Campbell, le partenariat avec le WAG est une occasion importante pour l’art inuit contemporain d’atteindre un public encore plus large. « Nous sommes très enthousiastes à propos de ce travail que nous faisons avec le musée, a-t-elle souligné. Cela donne encore plus de visibilité à l’artiste qui remporte le prix et à l’art inuit en général. »

Notons que le prix a été décerné lors d’une cérémonie de remise de prix à l’aveugle mercredi soir. Il y avait également trois artistes en lice : Eldred Allen, Kablusiak et Couzyn van Heuvelen. Chacun a reçu 3000 $.

Eilís Quinn, Regard sur l'Arctique

Eilís Quinn est une journaliste primée et responsable du site Regard sur l’Arctique/Eye on the Arctic, une coproduction circumpolaire de Radio Canada International. En plus de nouvelles quotidiennes, Eilís produit des documentaires et des séries multimédias qui lui ont permis de se rendre dans les régions arctiques des huit pays circumpolaires.

Son enquête journalistique «Arctique – Au-delà de la tragédie » sur le meurtre de Robert Adams, un Inuk de 19 ans du Nord du Québec, a remporté la médaille d’argent dans la catégorie “Best Investigative Article or Series” aux Canadian Online Publishing Awards en 2019. Le reportage a aussi reçu une mention honorable pour son excellence dans la couverture de la violence et des traumatismes aux prix Dart 2019 à New York.

Son reportage «Un train pour l’Arctique: Bâtir l'avenir au péril d'une culture?» sur l'impact que pourrait avoir un projet d'infrastructure de plusieurs milliards d'euros sur les communautés autochtones de l'Arctique européen a été finaliste dans la catégorie enquête (médias en ligne) aux prix de l'Association canadienne des journalistes pour l'année 2019.

Son documentaire multimedia «Bridging the Divide» sur le système de santé dans l’Arctique canadien a été finaliste aux prix Webby 2012.

En outre, son travail sur les changements climatiques dans l'Arctique canadien a été présenté à l'émission scientifique «Découverte» de la chaîne française de Radio-Canada, de même qu'au «Téléjournal», l'émission phare de nouvelles de Radio-Canada.

Au cours de sa carrière Eilís a travaillé pour des médias au Canada et aux États-Unis, et comme animatrice pour la série «Best in China» de Discovery/BBC Worldwide.

Twitter : @Arctic_EQ

Courriel : eilis.quinn@radio-canada.ca

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