Un groupe d’étudiants et de chercheurs internationaux étudie une nouvelle application du radar à synthèse d’ouverture. Ils s’en servent pour détecter la présence d’ours polaires dans leurs tanières. Si l’outil fait ses preuves, il pourra être utilisé pour limiter les perturbations humaines autour des tanières où grandissent les oursons et ainsi mieux protéger cette espèce menacée.
Symbole du réchauffement climatique, l’ours polaire est inscrit sur la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature pour son statut de vulnérabilité. Il est particulièrement menacé parla fonte des glaces et la fragmentation de la banquise, qui compliquent les efforts de chasse de ce grand carnivore blanc.
Dans le Nord, les explorations pétrolières et les activités de développement constituent également une menace pour les femelles et leurs oursons, invisibles dans leur tanière, à plusieurs mètres sous la glace.
Pour mieux protéger l’espèce, des chercheurs tentent de répondre à un défi de taille : déterminer à partir d’un hélicoptère où se trouvent les tanières occupées. Le but est de limiter les perturbations autour de celles-ci au moment où les oursons sont les plus vulnérables.
Pour cela, des chercheurs de l’Université Simon Fraser, en Colombie-Britannique, ont adapté un radar à synthèse d’ouverture (RSO). Ce radar utilise des micro-ondes, qui peuvent pénétrer dans la glace sèche, indique Bernhard Rabus, professeur à l’École de génie et des sciences appliquées de cette université et spécialiste des radars à synthèse d’ouverture.
Les micro-ondes émises par le radar sont renvoyées différemment si elles rencontrent un ours ou la glace et la neige qui l’entoure. Cela permet aux chercheurs de détecter leur présence, soutient Bernhard Rabus.
Détecter plus d’une tanière sur deux?
Des étudiants de l’Université Simon Fraser ont récemment testé le radar en Norvège pour évaluer son efficacité. Ils ont travaillé sur le projet en partenariat avec l’Université Brigham Young, aux États-Unis, ARTEMIS inc., et Polars Bears International.
L’analyse des images obtenues est toujours en cours, mais les chercheurs espèrent, à terme, pouvoir découvrir plus de tanières qu’avec des techniques d’imagerie infrarouge frontale normalement utilisées. Cette méthode, qui est notamment utilisée en Alaska par des compagnies pétrolières, manque 55 % des tanières d’ours, d’après uneétude menée sur le sujet.
« C’est une recherche encore active, on ne peut qu’espérer à ce point-ci », affirme Bernhard Rabus.
Défis à grande échelle
Si ce radar est prometteur, Ian Stirling doute qu’il puisse être utilisé à plus grande échelle pour évaluer, par exemple, le succès de reproduction des ours, en prenant en compte les changements climatiques et d’autres facteurs environnementaux.
Leur faible densité sur le territoire rend l’étude de l’espèce très difficile au-delà d’un secteur donné, explique-t-il. « J’ai fait beaucoup de recherches dans l’Arctique et on peut dépenser des sommes colossales et mettre un temps fou à établir un tout petit nombre d’ours, parce qu’ils sont très très éparpillés », ajoute-t-il.
Cela dit, cet outil pourrait avoir un potentiel pour la conservation de l’espèce dans des zones spécifiques où des activités humaines peuvent avoir un impact important sur les activités de reproduction des ours.
« Savoir où sont les ours pourrait être très important pour éviter de les déranger pendant la période critique où ils sont dans leur tanière. Une fois qu’ils l’ont quittée, ça n’a plus vraiment d’impact, le bruit que l’on fait, ou quoi que ce soit », soutient-il.
« Mais savoir où se trouvent les ours polaires reste important pour les éviter, ce qui pourrait être utile pour leur conservation », conclut Ian Stirling.