Nord québécois : des apprenties couturières perpétuent la fabrication traditionnelle de parkas

Winifred Nungak espère transmettre l’amour de la couture à ses élèves. (Félix Lebel/Radio-Canada)
Plusieurs jeunes de Kuujjuaq, au Nunavik, participent ces jours-ci à un atelier de fabrication de parkas traditionnelles. Au-delà de la fierté de porter une de leurs créations, ces apprenties couturières contribuent à la transmission d’un savoir ancestral et d’un pan important de la culture inuit.

Sous la supervision de la couturière professionnelle Winifred Nungak, ces élèves sont concentrées sur chaque petit détail. La fabrication d’une parka, ou « atigik » en inuktitut, comporte plusieurs étapes, qui doivent être suivies à la lettre pour obtenir un résultat satisfaisant.

« Les participantes doivent d’abord choisir un design et les couleurs qu’elles préfèrent. Ensuite, on passe en revue toutes les règles de la couture […] C’est important de prendre son temps ici, ce n’est pas une course », explique leur tutrice, Winifred Nungak.

Les participantes fabriquent un « atigik », soit une parka qui pourra résister aux hivers froids du Nunavik. (Félix Lebel/Radio-Canada)

La formation qu’elle offre est le résultat d’années de pratique, d’essais, d’erreurs, mais surtout de persévérance. Dans le cahier de formation qu’elle apporte lors de ces ateliers, une section entière est consacrée à son parcours, dans le but d’inspirer les jeunes couturières, afin qu’elles croient à leur rêve.

Son diplôme en design de mode du Collège LaSalle, obtenu en 2013, trône en première page. Plusieurs articles de journaux sont rassemblés et témoignent de ses expériences professionnelles.

« Je conserve ces articles pour montrer à mes élèves que, si elles persévèrent, elles peuvent se rendre loin. C’est important pour moi d’inspirer ces jeunes femmes et qu’elles croient en leurs rêves », explique la designer et enseignante.

Au fil des années, Winifred Nungak a assemblé un portfolio avec plusieurs de ses créations pour inspirer les participantes dans leur choix de design. (Félix Lebel/Radio-Canada)

Derrière sa machine à coudre, Alexia Kritik, 13 ans, met justement en pratique ces enseignements. C’est la première fois qu’elle fait de la couture, mais déjà, les techniques de sa professeure sont bien intégrées et elle manipule la machine à coudre avec aisance.

« J’ai déjà vu ma mère coudre, mais je n’étais pas attentionnée et je ne me souvenais plus des étapes. Avoir une professeure, des instructions, cela permet vraiment de mieux comprendre comment faire. C’est plus facile que je pensais. Et quand j’ai des questions, Winifred nous aide beaucoup », explique Alexia Kritik.

Une fois sa parka terminée, la jeune Alexia ne compte pas s’arrêter là. Elle a déjà prévu d’en fabriquer une deuxième, qu’elle compte offrir en cadeau.

Toute l’attention de la participante à l’atelier de couture est rivée sur la manche de sa parka, dont elle assemble les derniers morceaux. (Félix Lebel/Radio-Canada)
Perpétuer la tradition

Les matériaux ont bien évolué depuis l’époque où les vêtements d’hiver traditionnels étaient fabriqués avec du cuir de phoque et de caribou. L’esprit à l’origine de cette pratique ancestrale reste toutefois le même : des femmes prennent en main la responsabilité de vêtir les membres de leur famille pour les protéger de l’hiver du Nord.

La professeure montre différents modèles de parkas que ses élèves pourraient reproduire. (Félix Lebel/Radio-Canada)

C’est l’une des raisons principales pour lesquelles Winifred Nungak parcourt la région afin d’offrir ces ateliers.

« Au fil des années, j’ai [constaté] à quel point c’est important de transmettre ces connaissances et ces techniques traditionnelles. Un jour, ces jeunes femmes vont devenir mères et vont pouvoir fabriquer les manteaux pour leur famille », explique-t-elle.

En plus des techniques de couture, Winifred Nungak enseigne les mots en inuktitut pour désigner chaque partie des parkas. Cette portion de son programme s’inscrit aussi dans sa volonté de transmission culturelle.

« Parfois, j’entends les élèves dire : “Passe-moi le bras!” Mais ce n’est pas un bras, c’est une manche. Les mots sont importants, et il y a un terme en inuktitut pour chaque partie d’une parka », ajoute-t-elle.

Enseigner les mots traditionnels pour désigner chaque partie d’une parka est très important pour Winifred Nungak. (Félix Lebel/Radio-Canada)

Cette rigueur est appréciée par la coordonnatrice du centre de couture de Kuujjuaq, Tina Kleist. Cette dernière a près de 30 ans d’expérience en couture de vêtements d’hiver et accompagne les élèves dans leur formation.

« C’est vraiment bien structuré. Elle y va étape par étape, et elle est très bonne avec les participants. Elle explique les techniques de la bonne façon et est patiente […] C’est un beau cadeau que de prendre son temps pour transmettre ces pratiques. C’est vraiment important », ajoute-t-elle.

Tina Kleist coordonne le centre, qui est un espace consacré à la couture pour les membres de la communauté de Kuujjuaq. (Félix Lebel/Radio-Canada)

« Moi-même, je fabrique les vêtements d’hiver pour mes six enfants et tous mes petits-enfants. En apprenant la méthode, elles vont un jour aussi pouvoir le faire », conclut-elle.

Depuis 2014, Winifred Nungak a offert 17 cours de couture de ce genre dans plusieurs communautés du Nunavik. Plus d’une centaine de jeunes femmes ont ainsi appris à fabriquer des parkas grâce à ses enseignements.

Un bilan qui la rend particulièrement fière et la pousse à continuer ses efforts dans la formation pour les jeunes du Nunavik.

Félix Lebel, Radio-Canada

Journaliste à Sept-Îles

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