Efforts de revégétalisation des sites miniers : les défis du Yukon

L’épilobe, que l’on retrouve abondamment au Yukon, fait partie des plantes dont les semences sont récoltées pour aider à la revitalisation des sites miniers. (Radio-Canada/Vincent Bonnay)

Au Yukon, plusieurs projets de collectes de semences visent à revégétaliser des sites perturbés par l’industrie minière. Si la méthode est bien connue ailleurs au pays, le territoire fait face à plusieurs difficultés et explore encore la meilleure méthode à adopter.

L’un de ces programmes se fait en partenariat avec Yukon Seed and Restoration (YSR), une entreprise mise sur pied en 2018 entre la Première Nation Na-Cho Nyäk Dun, l’entreprise de développement de la Première Nation Selkirk et l’Université du Yukon.

«Nous observons généralement ce qui se trouve dans la région et décidons ce qui est le plus adapté pour un environnement qui a été perturbé», explique la directrice générale de YSR, Kristina Gardner, en soulignant que les connaissances des Premières Nations sont prises en considération.

«L’idée est d’arriver avec une solution mixte qui dépend aussi du type de sol qu’il nous reste [après le passage de la mine], que ce soit une bonne couche de terre ou de la roche», dit-elle.

Le projet de mine Casino a dû se soumettre au plus haut niveau d’examen de l’Office d’évaluation environnementale et socio-économique du Yukon. (Radio-Canada/Sarah Xenos)

La revégétalisation est l’un des volets préconisés par l’équipe derrière le projet minier Casino, qui vise à extraire du cuivre, de l’or, de l’argent et du molybdène à environ 300 kilomètres de Whitehorse, pour minimiser son impact environnemental.

«Le travail que nous faisons en ce moment pour ce qui est de la récolte de semences est davantage axé sur une réclamation progressive de notre programme d’exploration», soutient Shena Shaw, la vice-présidente des affaires environnementale et communautaire de l’entreprise minière. L’industrie souhaiterait ainsi revégétaliser les sites exploités dans le cadre du projet, à mesure du processus d’exploration.

Shena Shaw ajoute que l’idée est de progressivement restaurer les chemins et les emplacements de forage en cueillant et en faisant germer des semences natives de la région, plutôt que d’importer des espèces non indigènes.

La nécessité d’une banque de semences locales

La revégétalisation, notamment de sites miniers, n’est toutefois pas une solution miracle puisque les programmes sont encore pour la plupart au stade exploratoire. À l’heure actuelle, l’un des grands défis auquel fait face le Yukon, c’est l’absence d’une banque de semences disponible à l’échelle commerciale.

Le titulaire de la chaire de recherche industrielle en assainissement des mines nordiques à l’Université du Yukon, Guillaume Nielsen, explique que très souvent, la revégétalisation dans le Grand Nord se fait en important à grande échelle des graines qui viennent du sud du pays, ce qui peut limiter leur taux de germination.

On peut comprendre facilement l’utilité d’avoir des graines de chez nous pour être plantées chez nous. Surtout quand on a un climat subarctique si spécifique, il faut que nos plantes soient adaptées à notre climat.

– Guillaume Nielsen, titulaire de la chaire de recherche industrielle en assainissement des mines nordiques

Kristina Gardner confirme que son entreprise ne possède qu’une collection de semences extrêmement modeste.

«Une chose que nous espérons, c’est que le Yukon développe une banque de semences avec notre collaboration, mais c’est un projet plus grand que ce que nous faisons en ce moment», dit-elle.

Un frein à la revitalisation

Répandre des semences n’est pas la meilleure méthode à adopter, selon Nicole Fenton, titulaire de la chaire industrielle sur la biodiversité en contexte minier à l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue et spécialiste de la biodiversité nordique.

«Il faut dire que le taux de germination de la majorité des espèces sauvages est très bas, alors c’est tout un défi», souligne-t-elle.

«La façon d’avoir la meilleure restauration d’un écosystème [pour retrouver un espace] similaire à ce qui était là avant, c’est de ramener la terre», ajoute Nicole Fenton.

Il faudrait donc enlever une couche de terre qui contient naturellement des graines des plantes natives et la conserver afin de s’en servir pour restaurer les sites perturbés par l’activité minière. Le problème au Yukon, c’est qu’il n’y a pas beaucoup de matière organique.

Guillaume Nielsen est titulaire de la chaire de recherche industrielle en assainissement des mines nordiques à l’Université du Yukon. (Radio-Canada/Sarah Xenos)

«On a une couche qui est très petite au Yukon, donc, comment est-ce qu’on apporte, d’un point de vue économique, une quantité de matière organique suffisante pour pouvoir faire de la revégétalisation? Ça, c’est une autre problématique», concède Guillaume Nielsen.

Pour Nicole Fenton, il est aussi important d’inclure et de penser à tous les bryophytes, les lichens et les insectes en plus de récolter les semences des plantes lorsque vient le temps de mettre en place un projet de revégétalisation.

«Ce sont des groupes qui sont vraiment importants dans les [zones boréales] et dans le nord du Canada. Alors, quand on n’inclut pas ces groupes-là, on est en train de rater une bonne partie de la biodiversité», assure-t-elle.

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