Un nouveau rapport met en lumière des crimes haineux contre les Samis en Suède

Le drapeau sami (Jonathan Nackstrand/AFP/Getty Images)

Traduction du texte d’Eilís Quinn, Eye on the Arctic

Le Conseil national suédois pour la prévention des crimes (Brå) a publié son premier rapport sur les crimes haineux contre la communauté samie. Le document souligne des similarités et des différences notables avec des crimes commis contre d’autres minorités. 

Le fait que des rennes sont délibérément ciblés dans les régions samies est un exemple qui distingue ces incidents des crimes haineux typiques, selon le rapport. Les auteurs de ces crimes, souvent des propriétaires de terres, des chasseurs ou des agriculteurs, estiment qu’ils sont limités par les droits d’élevage des rennes et qu’ils ne veulent pas de ces animaux dans certaines régions.

«C’est le crime qu’on a vu le plus souvent dans les rapports de police», dit Lisa Wallin, la directrice de projet pour l’étude. «Il y a eu des délits de fuite, des chiens ont été lancés à la poursuite ou carrément à l’attaque de rennes. Certains animaux se sont même fait passer dessus par des motoneiges ou se sont fait tirer dessus.»

Ces crimes surviennent normalement dans des régions éloignées du nord de la Suède et le manque de témoins fait qu’ils demeurent irrésolus. «Cela rend la recherche et l’enquête sur ces crimes très difficile», ajoute Mme Wallin.

En Norvège, l’élevage de rennes fait partie de la culture des Samis, qui occupent depuis des temps immémoriaux les parties septentrionales de la Norvège, de la Suède et de la Finlande. (Photo d’archives/Heiko Junge/AFP/Getty Images)

Répercussion dans les communautés

Les éleveurs de rennes sont aussi sujets à des menaces et à de plus en plus d’incidents racistes lors des procédures légales pour protéger les droits du peuple sami, selon le rapport. Des exemples incluent du vandalisme ou des incendies de mangeoires de rennes et la destruction de véhicules. 

Des éleveurs disent même s’être eux-mêmes fait tirer dessus. 

Les chercheurs ont trouvé que ces crimes ont un impact important sur la communauté samie, comme une augmentation du sentiment d’insécurité et d’inquiétude. Plusieurs membres de la communauté peuvent être hésitants de porter des vêtements traditionnels samis en public ou de révéler leur identité dans des contextes sociaux par peur des conséquences. 

«Même si les crimes ciblent souvent spécifiquement la communauté d’éleveurs de rennes, cela affecte l’ensemble de la minorité samie en raison de l’importance culturelle des rennes», indique Lisa Wallin. 

Le fait de tuer un renne représente un vœu d’éradiquer les droits samis et par extension le peuple sami.

– Lisa Wallin, directrice de projet pour l’étude sur les crimes haineux contre les Samis

Une autre différence avec des crimes haineux «normaux» soulevée par le rapport est que les auteurs des crimes et les victimes se connaîtraient souvent.

Ce facteur influe de manière significative sur la décision de rapporter le crime à la police et d’entreprendre des actions légales, selon le rapport. «Ces crimes se produisent souvent dans des petites communautés. Dans ces circonstances, il est très difficile de les rapporter puisque vous allez revoir ces personnes tous les jours par la suite», explique Mme Wallin. 

Une unité spécialisée sur les crimes haineux est nécessaire dans le Nord

Le rapport recommande notamment une plus grande éducation à propos des Samis, de leur culture et des lois sur les rennes, dans toute la société.

Toujours selon le rapport, une approche plus proactive des forces de l’ordre serait de mise pour que les Samis soient plus à l’aise de rapporter les crimes dont ils sont victimes. 

Il recommande aussi qu’une unité spécialisée en crime haineux soit stationnée en Arctique. «Nous avons trois unités de ce type. Mais elles sont toutes dans des régions métropolitaines et aucune ne se trouve dans le Nord», soutient Mme Wallin.

Besoin urgent de données

Les auteurs de l’étude disent que les Samis sont souvent laissés en dehors des études sur le racisme et sur les préjudices contre les minorités. Des études en profondeur sur l’expérience des Samis seraient donc urgentes pour établir une base de données et pour établir des tendances.

Le Parlement sami affirme que cette étude est la bienvenue et qu’il s’agit d’une validation de ce qu’ils observent et rapportent depuis longtemps. 

Stefan Mikaelsson, un membre de l’assemblée plénière du Parlement sami, estime que le besoin de statistiques sur les crimes haineux contre les Samis est urgent. (Photo : Parlement sami)

Stefan Mikaelsson, un membre de l’assemblée plénière du Parlement sami, estime que le besoin de statistiques sur les crimes haineux contre les Samis est urgent. «Le manque de données officielles sur la culture samie devrait être embarrassant pour la Suède», affirme celui qui est aussi vice-président du conseil d’administration. 

Il espère que ce rapport mènera à des actions concrètes. 

«Le Parlement sami aimerait voir un véritable engagement de la part des représentants du gouvernement et des autorités de l’État, ainsi qu’un changement de comportement des procureurs de l’environnement et des forces de police », a-t-il déclaré.

Selon lui, un meilleur financement des organisations samies, de l’élevage de rennes et du Parlement sami permettrait de montrer un plus grand respect suédois dans les municipalités du Nord. 

Le rapport commandé par le gouvernement suédois est le quatrième qui s’intéresse aux crimes contre des minorités en particulier. Les rapports précédents se sont intéressés aux minorités juives, afro-suédoises et musulmanes. 

Brå est une agence gouvernementale dont le rôle est de produire des statistiques sur les crimes en Suède, de faire de la recherche sur les tendances criminelles et de participer aux efforts de prévention du crime. 

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