« Très mauvaise nouvelle » : de l’eau de mer s’infiltre sous le glacier Thwaites

Des villes côtières comme Miami et La Nouvelle-Orléans, et même des pays entiers, dont le Bangladesh, sont menacés par la fonte des glaciers.
Or, il existe pour la première fois des preuves visuelles selon lesquelles de l’eau de mer s’infiltre sous le glacier Thwaites, ce qui accélère sa fonte. Ce glacier, surnommé le glacier de l’Apocalypse, contient un volume de glace équivalent à une élévation du niveau de la mer de 0,6 mètre à l’échelle mondiale.
Les auteurs d’une étude publiée dans la revue scientifique Proceedings of the National Academy of Sciences plus tôt cette semaine ont utilisé des données provenant d’une constellation de satellites afin d’en arriver à ces conclusions.
Selon Christine Dow, une des autrices du rapport, l’élévation du niveau des mers est dorénavant inévitable. Il n’y a pas d’échappatoire possible pour l’instant.
Le glacier en question est rattaché à l’Antarctique occidental. Sa fonte aura un impact qui sera ressenti partout sur la planète, tout particulièrement dans les villes côtières, précise Mme Dow, qui est titulaire de la Chaire de recherche du Canada en hydrologie glaciaire et dynamique de la glace à l’Université de Waterloo.
Problématique, de Miami au Bangladesh
« C’est une très mauvaise nouvelle pour le glacier, car chaque fois qu’il y a de l’eau de mer sous la glace, celle-ci fond beaucoup plus vite qu’elle ne le ferait autrement », explique Mme Dow.
Et cette fonte forcera l’élévation du niveau de la mer partout dans le monde.
Ce glacier est gigantesque : il a une largeur d’environ 120 kilomètres et couvre une superficie de 192 000 kilomètres carrés, selon le site web thwaitesglacier.org.
Selon Mme Dow, les communautés côtières seront les premières à voir les effets de ce phénomène.
« [Le mois dernier], La Nouvelle-Orléans a subi de grosses inondations. Cette région est très proche du niveau de la mer. D’autres régions, comme Miami ou le Bangladesh, vont connaître de nombreux problèmes, sans oublier, bien sûr, ces îles du Pacifique Sud qui ne sont que quelques mètres au-dessus du niveau de la mer. »
Chaque fois qu’il y aura [des hausses] de plus de quelques centimètres, toutes ces régions vont souffrir. Et Vancouver sera la prochaine sur la liste. Elle n’est pas non plus très éloignée du niveau de la mer.
Christine Dow, Chaire de recherche du Canada en hydrologie glaciaire et dynamique de la glace
« Et il ne s’agit pas seulement d’effets sur les communautés côtières. Cela va toucher les courants océaniques, ce qui va toucher l’air au-dessus, ce qui va toucher la façon dont notre air se déplace au-dessus de nous et modifier les pluies et les sécheresses », précise-t-elle.

Une constellation de satellites
L’équipe internationale a utilisé les données du fabricant finlandais de microsatellites ICEYE afin d’en arriver à ses conclusions.
« ICEYE exploite la première constellation de petits satellites radar à synthèse d’ouverture dans le monde, lit-on sur le site web de l’Agence spatiale européenne. La constellation fournit des images sous différents angles plusieurs fois par jour pour des zones d’intérêt spécifiques. »
Eric Rignot, auteur principal de l’étude et professeur de sciences du système terrestre à l’Université de la Californie à Irvine, explique dans un communiqué de presse publié sur le site web de cette université que, par le passé, les chercheurs n’avaient accès aux données que de manière sporadique.
« Avec ces quelques observations, il était difficile de comprendre ce qui se passait. Lorsque nous disposons d’une série chronologique continue et que nous la comparons au cycle des marées, nous constatons que l’eau de mer arrive à marée haute et se retire, puis qu’elle va parfois plus loin sous le glacier et se retrouve piégée », ajoute-t-il.
M. Rignot espère que ces résultats permettront d’approfondir les recherches sur les changements qui se produisent sous les glaciers de l’Antarctique.
« La communauté scientifique est très enthousiaste à l’idée de se rendre dans ces régions polaires éloignées pour recueillir des données et pour mieux comprendre ce qui s’y passe, mais le financement n’est pas au rendez-vous », souligne M. Rignot.
« En 2024, nous disposons du même budget en dollars réels que dans les années 1990. Nous devons développer la communauté des glaciologues et des océanographes physiques afin d’aborder ces questions d’observation le plus tôt possible. Mais pour l’instant, nous essayons de gravir l’Everest avec des chaussures de tennis. »
Cédric Lizotte avec des informations de CBC
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