Air Inuit déçue du report des travaux de la piste d’atterrissage de Puvirnituq, au Nunavik

Le président d’Air Inuit, Noah Tayara, se dit déçu du report des travaux à l’aéroport de Puvirnituq, au Nunavik. La piste d’atterrissage en gravier empêche l’entreprise d’y faire atterrir ses nouveaux avions et limite la capacité de transport de marchandises dans les communautés inuit de la région.
Air Inuit a commencé à utiliser ses nouveaux Boeing 737-800, avec un premier vol inaugural le 17 juillet dernier. L’entreprise espérait pouvoir les utiliser pour le transport de marchandises à Puvirnituq, le plus gros village de l’ouest du Nunavik.
Avec le report des travaux de pavage de la piste principale de l’aéroport, l’entreprise devra toutefois attendre avant de profiter pleinement des avantages de ses nouveaux appareils.
Il est en effet impossible de faire atterrir un 737-800 à Puvirnituq, ou sur toute piste en gravier, sans endommager les moteurs à réaction de l’avion.
Seuls les anciens modèles Boeing 737-200 d’Air Inuit, munis de dispositifs anti-gravier, peuvent y atterrir. Ces appareils se font toutefois vieillissants et les pièces de rechange sont de plus en plus difficiles à trouver, explique Noah Tayara.
« Ils sont sécuritaires et nous pouvons les utiliser pour quelques années encore. […] Mais les nouveaux avions ont plus d’espace de transport, ils sont moins bruyants, consomment moins. Il y a tellement de raisons qui nous poussent à vouloir utiliser les nouveaux 737-800 », dit Noah Tayara.
Air Inuit prévoit malgré tout utiliser ses nouveaux appareils entre Montréal et l’aéroport de La Grande-Rivière, près de Radisson, pour le transport de marchandises et de personnes.
Un second avion 737-200 prendra ensuite le relais jusqu’à Puvirnituq en attendant que la piste soit refaite en 2025.
« Ça va prolonger la vie des 737-200. Chaque décollage et atterrissage sont comptés. Ça va réduire de moitié la durée des vols. […] Mais je le répète, ces appareils sont inspectés et homologués. […] La sécurité n’est jamais tenue pour acquise, c’est notre priorité », ajoute Noah Tayara.
Des aéroports limitants
La situation de Puvirnituq rappelle à quel point les pistes en gravier apportent leurs lots de contraintes pour les compagnies aériennes régionales.
Sur les 14 communautés du Nunavik, seule Kuujjuaq dispose d’une piste asphaltée. Les autres villages sont limités quant aux types d’appareils qui peuvent y atterrir.
Les plus petits avions à turbopropulseurs comme les Dash-8 et les Twin-Otter peuvent s’y rendre, mais ont une capacité de chargement bien inférieure aux plus gros avions à réaction, comme ceux de la série 737 de Boeing.

Cette contrainte a comme conséquence directe d’augmenter les coûts du transport dans la région.
« On a besoin que les gouvernements investissent plus d’argent dans ces infrastructures. On pourrait alors faire voler des avions de nouvelle génération et on passerait à des avions de 45 places, à d’autres de 75 places par exemple », indique Noah Tayara.
Des investissements pour augmenter la longueur des pistes et en améliorer la qualité générale seraient les bienvenus, selon lui, surtout dans les communautés plus grandes comme Kuujjuarapik, Salluit et Inukjuak.
Le gouvernement du Québec a par ailleurs annoncé un investissement de près de 90 millions, en avril dernier, pour des travaux de réfection aux aéroports de Puvirnituq, Salluit et Akulivik.
Coût de maintenance
En plus des coûts de transport, la poussière soulevée lors des atterrissages endommage prématurément les moteurs des avions, assure Noah Tayara.
Leur durée de vie s’en retrouve réduite d’environ 50 %, d’après ses estimations.
Pour la flotte d’appareil Dash-8 à turbopropulseur, Air Inuit dit avoir dépensé près de 14 millions supplémentaires pour des maintenances de moteurs durant les cinq dernières années. Des dépenses directement causées par les pistes de gravier.
« C’est cher! Changer un seul moteur, ça coûte près de 2 millions de dollars, et on n’a pas de subventions pour ça », dit-il.
Ces facteurs contribuent aux prix des billets d’avion qui sont exorbitants pour le Nunavik et les autres régions nordiques.
C’est par ailleurs un des arguments avancés récemment par la présidente de Canadian North, Shelly De Caria, pour expliquer le coût élevé des billets. Elle avait été convoquée en mai dernier à une audience du Comité permanent des transports, de l’infrastructure et des collectivités, à Ottawa.
« Les infrastructures limitées et les grandes distances augmentent considérablement les coûts d’exploitation. Ces facteurs font qu’il est difficile pour une compagnie aérienne de maintenir des liaisons fiables, à un prix abordable », avait-elle déclaré.