Les transporteurs aériens du Nord réclament plus de financement pour réduire les prix
Face aux prix exorbitants du transport aérien dans les régions éloignées du Canada, les principaux transporteurs des régions nordiques réclament une augmentation des subventions et des investissements dans les infrastructures aéroportuaires pour réduire la facture de leurs clients.
Ils ont été convoqués jeudi par le Comité permanent sur le transport de l’infrastructure et des collectivités à Ottawa.
Le groupe transpartisan tente de faire la lumière sur le manque de compétition dans le secteur de l’aviation au pays, ce qui contribuerait au coût élevé des billets d’avion pour les résidents des régions éloignées.
Questionnée à ce sujet, la PDG de Canadian North, Shelly De Caria, a souligné les nombreuses contraintes auxquelles les transporteurs font face dans le nord du pays.
Les conditions météorologiques extrêmes, les infrastructures limitées et les grandes distances augmentent considérablement les coûts d’exploitation. Ces facteurs font qu’il est difficile pour une compagnie aérienne de maintenir des liaisons fiables à un prix abordable.
– Shelly De Caria, PDG de Canadian North
Augmenter le nombre de transporteurs dans une région donnée ne serait pas une solution viable, selon elle, pour réduire le coût des billets en raison de la faible densité de population dans les régions rurales.
Shelly De Caria a expliqué, à titre d’exemple, que la population totale des 25 communautés desservies par Canadian North est de seulement 130 000 personnes, soit la taille approximative des villes de Kelowna ou de Sherbrooke.
«Les réalités économiques de l’aviation nordique ne peuvent être négligées. Le marché n’est pas suffisant pour attirer les autres compagnies aériennes qui se concentrent généralement sur les vols plus grands et plus faciles», a-t-elle ajouté.
De meilleures infrastructures
Les transporteurs présents lors de la rencontre ont plaidé pour qu’Ottawa investisse plus dans la mise à niveau des infrastructures aéroportuaires dans les régions éloignées.
Un des exemples évoqués jeudi serait d’asphalter les pistes de gravier, puisqu’il est impossible pour la plupart des gros avions à réaction d’y atterrir. Les compagnies aériennes n’ont d’autres choix que d’utiliser des avions à turbopropulseurs, plus petits, et donc plus difficiles à rentabiliser.
La présidente de Canadian North a donné l’exemple de l’aéroport de Cambridge Bay, au Nunavut, dont la piste est en gravier. Cela oblige l’entreprise à utiliser deux avions à hélices de type «ATR», pour le transport de fret et de passagers, plutôt qu’un seul gros avion à réaction.
«Cela a un impact sur la communauté. Avoir une piste pavée aiderait à faire atterrir un plus gros Boeing», a déclaré Mme De Caria.
Le directeur d’Air North, Joseph Sparling, abonde dans le même sens, soulignant que le gouvernement fédéral devrait assumer une plus grande part de financement dans les aéroports nordiques.
Il a aussi plaidé pour une réduction des coûts liés à l’utilisation des services des aéroports, surtout basés sur le principe de «l’utilisateur payeur», ce qui fait augmenter les prix des billets au Nord, selon lui.
«L’infrastructure pour les services aériens devrait être traitée de la même manière que nos autoroutes, et ça devrait être payé par le public. Il est grand temps que le modèle change», a dit M. Sparling, ajoutant que son entreprise ne retire qu’une marge d’environ 5 % de profit sur les billets d’avion.
Politiques réglementaires
Aussi présent lors des audiences, le maire de Gaspé et président du comité sur le transport aérien à l’Union des municipalités du Québec (UMQ), Daniel Côté, a réitéré l’importance pour les régions d’améliorer la qualité du service aérien.
Daniel Côté a demandé au gouvernement fédéral d’en faire une priorité, au même titre que le secteur ferroviaire.
La proposition la plus forte du maire de Gaspé était toutefois qu’Ottawa mette fin au «libre marché» dans l’industrie aérienne régionale, en raison du caractère essentiel de ce secteur pour les résidents.
«C’est un service essentiel pour pouvoir développer notre économie dans les régions et pour que notre population ait accès à des services», a déclaré M. Côté.
Il propose plutôt un modèle d’appels d’offres, qui permettrait davantage de concurrence dans le secteur de l’aviation. Des organismes de gestion régionaux pourraient s’occuper de ces appels d’offres, qui seraient mieux adaptés aux besoins des communautés.
«Ça serait la chose la plus profitable, on pourrait faire jouer la concurrence en amont, comme ça se fait dans plusieurs régions des États-Unis et en Australie occidentale. Ce sont de beaux modèles qu’on a documentés à l’UMQ», a indiqué Daniel Côté.
Cette rencontre était la première d’une série de six séances d’étude de la loi sur la concurrence et les voyages aériens vers les localités nordiques, rurales et éloignées du Canada.
La prochaine audience aura lieu la semaine prochaine.
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