L’Arctique émet aujourd’hui plus de CO2 qu’elle en absorbe

L’Arctique, région du monde particulièrement soumise aux effets du réchauffement climatique, émet désormais plus de dioxyde de carbone (CO2) qu’elle en stocke en raison notamment de la dégradation de sa végétation, selon un rapport américain de référence publié mardi.
La toundra arctique, qui connaît un réchauffement et une augmentation des feux de forêt, émet désormais plus de carbone qu’elle en stocke, ce qui aggravera les effets des changements climatiques, explique Rick Spinrad, le chef de l’Agence d’observation atmosphérique et océanique américaine (NOAA), qui publie ce rapport.
« C’est un signe de plus, prédit par les scientifiques, des conséquences d’une réduction inadéquate de la pollution par les combustibles fossiles », poursuit-il.
Présente dans une grande partie de l’Arctique, la toundra est un milieu écologique composé d’une végétation adaptée aux régions très froides recouvert de permafrost, aussi appelé pergélisol, un sol gelé qui contient d’importantes quantités de carbone.

Or, ces dernières décennies, les incendies de toundra n’ont cessé d’augmenter et ont connu un record en 2023, note l’agence.
En brûlant la végétation, ces feux libèrent du dioxyde de carbone dans l’atmosphère et modifient également les couches isolantes du sol, ce qui accélère le dégel à long terme du pergélisol.
L’année 2023 a été une année record pour le nombre d’incendies, en raison des feux au Canada, [notamment dans des zones de pergélisol, NDLR] […] qui ont émis près de 400 millions de tonnes de dioxyde de carbone, indique Brendan Rogers, coauteur du rapport.
Cela représente, à titre comparatif, « plus que les émissions annuelles de tous les autres pays, à l’exception de la Chine, des États-Unis, de l’Inde et de la Russie », précise-t-il.
Et après cette année record, 2024 arrive en deuxième place en matière d’émissions liées à des feux de forêt survenus au nord du cercle polaire arctique, note l’agence sur son site.
« Alarmant »
Par ailleurs, selon le rapport de la NOAA, basé sur des observations menées entre 2001 et 2020, les températures enregistrées à la surface de l’Arctique, mais aussi celles à au moins 15 mètres de profondeur, dans le pergélisol, n’ont cessé d’augmenter ces dernières années.
L’Arctique, région qui englobe le pôle Nord, est touché par un phénomène appelé « amplification », ce qui veut dire qu’elle se réchauffe plus vite que les latitudes moyennes. Ce mécanisme est dû à de nombreux facteurs, comme la perte de la couverture neigeuse et de la banquise, ou encore le réchauffement des océans.
Si l’augmentation des températures liée au réchauffement climatique stimule la productivité et la croissance des végétaux, qui absorbent du dioxyde de carbone, elle provoque également le dégel du pergélisol, relâchant ainsi du dioxyde de carbone et du méthane, deux des principaux gaz qui piègent la chaleur dans l’atmosphère.

Le fait que la toundra relâche à présent davantage de CO2 qu’elle en stocke est « un signe avant-coureur alarmant », a dit Brenda Ekwurzel, climatologue de l’ONG américaine Union of Concerned Scientists mardi.
Une fois atteints, un grand nombre de ces seuils d’impacts négatifs sur les écosystèmes sont irréversibles, a-t-elle dit.
Par ailleurs, l’Arctique devient aussi de plus en plus humide, selon la NOAA. L’été 2024 a été le plus pluvieux jamais enregistré.
Cette tendance accélère l’érosion côtière et menace les communautés autochtones qui dépendent de la stabilité de la glace et des pratiques de chasse traditionnelle.
Le rapport indique également que le nombre de caribous de la toundra a diminué de 65 % au cours des deux ou trois dernières décennies, la chaleur estivale perturbant leurs déplacements et leur survie, tout comme les changements dans les conditions d’enneigement et de glace en hiver.
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