Un chasseur veut une action internationale contre les changements climatiques

Un homme regarde au loin, dans son salon.
Jack Anawak est né en 1950 et partage ses observations des changements du territoire. Photo : Radio-Canada / Anaïs Elboujdaïni

Ancien député fédéral et territorial, Jack Anawak souhaite des actions concrètes à plus grande échelle pour freiner les conséquences des changements climatiques qui nuisent au mode de vie traditionnel des Inuit.

L’homme originaire de Naujaat, un hameau sur le cercle arctique, où la chasse et la pêche étaient les seuls moyens de survivre, se souvient qu’à la fin octobre, en 1997, l’eau de la baie de Frobisher était déjà gelée.

La glace aurait été gelée et vous feriez de la motoneige sur l’eau glacée, explique-t-il. Les gens seraient ici à chasser le phoque sur la glace. En 28 ans, il y a déjà eu beaucoup de changements.

Une personne en motoneige au loin.
Jack Anawak a pris cette photographie de la baie de Frobisher à partir d’Iqaluit en 2018, où il indique que l’eau est suffisamment glacée pour y voir une personne faire de la motoneige sur la surface gelée. Photo : Photo fournie par Jack Anawak
Une photo de bâtiments près de la baie Frobisher.
Jack Anawak a pris cette photo du même endroit en octobre 2025, qui donne sur la baie de Frobisher, à Iqaluit. Photo : Photo fournie par Jack Anawak

Cette arrivée tardive de la glace en milieu côtier n’est pas anodine, notamment pour le Nunavut, dont le littoral compte pour 43 % de tout le littoral canadien, selon l’Association inuit Qikiqtani (QIA).

Frédérick Bouchard, professeur au Département de géomatique appliquée de l’Université de Sherbrooke et membre du Centre d’études nordiques, étudie le Grand Nord canadien depuis plusieurs années.

Le fait qu’il y ait moins de glace qu’avant fait en sorte que les côtes sont davantage exposées à l’érosion côtière, notamment à l’action des vagues, un phénomène baptisé érosion thermique et qui peut faire perdre plusieurs mètres de côtes par année à certains endroits, évoque M. Bouchard.

Un défi mondial

Jack Anawak ne veut pas être nostalgique : il sait que l’heure est à l’adaptation. Il souhaite que les plus hautes instances, à l’instar des Conférences des Parties (COP), soient des lieux d’action pour ralentir les conséquences des changements climatiques.

La COP30 se déroule jusqu’au 21 novembre au Brésil et le Conseil circumpolaire inuit (CCI) y a envoyé trois délégués cette année pour défendre les intérêts des Inuit.

L’organisation répète ce qu’elle avance chaque grande messe du climat : il faut un financement dédié à la lutte au dérèglement du climat et que le point de vue inuit soit pris en compte.

Il ne peut y avoir de régression, soutient la présidente internationale du CCI, Sara Olsvig, par voie de communiqué. Dans l’Arctique, les Inuit subissent de plein fouet les conséquences du changement climatique.

Le réchauffement de l’Arctique se fait réellement ressentir davantage qu’ailleurs. Selon des recherches, la région se réchauffe de trois à quatre fois plus rapidement que le reste de la planète.

Au Nunavut, le contraste est frappant : des données d’Environnement et Changement climatiques Canada établissent qu’entre 1948 et 2016, la température du territoire a augmenté de 2,7 degrés Celsius comparativement à 1,7 degré Celsius pour le reste du Canada lors de la même période.

M. Anawak souhaite également des solutions locales concrètes, comme la fin de l’utilisation du diesel pour chauffer le Nunavut, un souhait en partie exaucé par l’annonce d’Ottawa jeudi (nouvelle fenêtre) qui financera un projet d’hydroélectricité pour Iqaluit.

Ce projet vise à réduire la dépendance au diesel dans la capitale territoriale, qui importe à l’heure actuelle 15 millions de litres de diesel annuellement.

Il y a beaucoup de choses à craindre, remarque Jack Anawak. Mais le leadership doit venir d’autant de pays que possible pour dire : « Faisons vraiment quelque chose à ce sujet. »

S’adapter rapidement

Un événement comme la COP30, qui se tient 10 ans après l’adoption des Accords de Paris sur le climat (nouvelle fenêtre), est une des seules manières de mener à des changements mesurables, selon M. Anawak.

Parce que les conséquences ne sont pas anodines, surtout pour les chasseurs qui sont habitués à sortir sur un territoire dont ils peinent de plus en plus à prédire le comportement, dit-il.

Un garçon sur une motoneige.
Sur ses réseaux sociaux, Jack Anawak partage cette photo datant des années 1990. Il dit qu’il pouvait aller à Naujaat, son village natal, vers la mi-juin en utilisant une motoneige. « Maintenant, à cause du changement climatique, il faut quasiment y aller de la mi-mai à la fin mai », avant la fonte des glaces. Photo : Photo fournie par Jack Anawak

C’est beaucoup plus dangereux de sortir sur la terre parce que certains endroits gèlent beaucoup plus tard que prévu. Plusieurs personnes finissent par être prises en allant pêcher ou sur les motoneiges parce que la neige est moins épaisse qu’à l’habitude.

Autre impact pour la pêche traditionnelle

Frédérick Bouchard étudie à Cambridge Bay le dégel du pergélisol qui mène à une forte érosion des berges. L’érosion entraîne des sédiments dans l’eau des rivières et en augmente la turbidité.

Il y a un endroit à l’embouchure d’une des rivières qui est proche du village où les gens historiquement allaient pêcher au harpon, souligne-t-il. Il faut évidemment, pour faire ça, que l’eau soit assez claire pour qu’on voie le poisson.

Mais puisque l’eau est trouble, ça rend la pêche traditionnelle problématique à certains moments de l’année, un impact concret des changements climatiques, remarque le chercheur.

Pour Jack Awanak, le sentiment de perte continue et il s’affaire à le documenter sur ses réseaux sociaux, notamment en partageant des photos.

J’ai une photo récente d’un glacier et ce n’est plus qu’une fine bande, le glacier a presque entièrement disparu. Et je me souviens, à la fin des années 1970, j’avais vu ce glacier et il couvrait presque toute la vallée.

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Anaïs Elboujdaïni, Mario De Ciccio, Radio-Canada

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