Dans le Grand Nord canadien, des résidents heureux d’être « enfin » connectés à l’Internet haute vitesse

Le système de Starlink offre des vitesses de connexion bien supérieures au fournisseur régional, Tamaani. (Félix Lebel/Radio-Canada)
Exaspérés d’attendre la finalisation d’un réseau moderne de fibre optique au Nunavik, de plus en plus de résidents ont commencé à utiliser les services de l’entreprise Starlink, qui leur offre enfin une connexion Internet satellitaire rapide et qui bouleverse de petits pans de leur vie.

Lent, désuet, frustrant : les mots ne manquent pas aux Nunavimmiut pour qualifier l’inefficacité du réseau Internet du fournisseur public régional, Tamaani.

C’est le cas notamment de Johnny Sanders, qui n’a pas hésité à s’acheter l’antenne de Starlink lorsque le service a été offert dans la région.

Johnny Saunders souhaite maintenant sa connexion Internet pour partager sa musique. (Félix Lebel/Radio-Canada)

« C’était frustrant. Lorsque tu voulais écouter un film, tu devais arrêter à quelques reprises et attendre que ça télécharge. Mais maintenant, tu peux être plusieurs à utiliser Internet et tu n’attends plus. C’est incroyable », dit le résident de Kuujjuaq.

L’arrivée de l’Internet haute vitesse de Starlink lui a aussi facilité de petites tâches du quotidien, comme le magasinage en ligne et l’obtention de services gouvernementaux.

Johnny Saunders estime que l’amélioration de la connectivité au Nunavik est surtout un moyen extraordinaire de faciliter la communication entre les communautés et le partage d’informations sur son territoire.

Les antennes rectangulaires de l’entreprise Starlink sont maintenant omniprésentes dans le paysage de Kuujjuaq. (Félix Lebel/Radio-Canada)

« Ça change tellement de choses pour la communication, notamment. On parle maintenant à des gens qui ont une antenne de Starlink sur leur bateau à la chasse. On sait qu’ils sont en sécurité, qu’ils vont être de retour bientôt. Ça change bien des choses, très rapidement », ajoute-t-il.

Sécurité améliorée

Amarré sur un bloc de banquise entre les villages de Quaqtaq et de Kangirsuk, Willie Gadbois est l’un de ceux qui a choisi d’apporter son antenne de Starlink avec lui pour sa partie de chasse au béluga.

L’antenne est branchée sur le réseau électrique de son bateau et lui permet de communiquer avec ses proches. Il peut alerter les autres chasseurs de la présence d’animaux et de l’état des glaces.

L’antenne se connecte sur la ceinture satellitaire de Starlink et offre une vitesse de connexion Internet très rapide. (Willie Gadbois)

« Avant, cela prenait des téléphones satellites, cela coûtait les yeux de la tête. Maintenant, avec mon antenne, je peux aller camper et parler avec ma famille le soir, regarder mes courriels […] Je trouve cela formidable », indique Willie Gadbois.

Cette nouvelle connectivité permet aussi d’améliorer la sécurité des familles qui s’aventurent sur le territoire pour les activités traditionnelles, selon lui.

L’antenne de Starlink est de plus en plus utilisée dans les différents campements de la région, au détriment de la radio haute fréquence traditionnelle.

Les radios à haute fréquence permettent d’envoyer et de recevoir des messages à plusieurs dizaines de kilomètres, mais sont de moins en moins utilisées sur le territoire, selon Willie Gadbois. (Djavan Habel-Thurton/archives/Radio-Canada)

« Pour survivre, au moins, tu es capable de communiquer avec les gens dans les villages. S’il te manque des choses, comme de la nourriture, tu peux parler avec les gens si tu as des problèmes », ajoute-t-il.

Fibre optique en construction

L’unique fournisseur Internet régional, Tamaani, est conscient de la lenteur du réseau offert aux résidents.

La situation s’expliquerait par un plus grand nombre de clients inscrits par rapport à la capacité du réseau.

Selon Daryl Combden, directeur de l’Administration régionale Kativik (ARK), Tamaani aurait dû arrêter d’accepter de nouveaux clients il y a environ cinq ans pour éviter une surcharge du réseau.

Daryl Combden espère que les Nunavimmiut vont finir par retourner auprès du fournisseur Tamaani lorsque la fibre optique sera déployée dans la région. (Félix Lebel/Radio-Canada)

« On ne pouvait pas simplement dire non aux gens qui souhaitaient avoir une connexion Internet, donc on a intentionnellement surchargé notre réseau en sachant que la bande passante allait être diluée encore plus. C’était une décision difficile, mais au moins on a permis aux gens d’avoir une petite pointe de tarte, plutôt que rien du tout », explique-t-il.

L’arrivée récente du fournisseur Starlink au Nunavik a porté un coup dur à l’entreprise publique.

Tamaani estime qu’environ 22 % de sa clientèle, soit plus de 600 foyers, auraient migré chez le compétiteur, ce qui représente une perte mensuelle de 50 000 $ en revenus depuis l’été 2022.

Malgré ces pertes, elle accueille favorablement l’arrivée de ce compétiteur.

« Starlink a apporté une bande passante qu’on ne pourrait pas donner pour le moment […] On accueille cette bande passante, mais on reste déterminés à apporter notre fibre optique dans la région. Cela va surpasser ce que Starlink peut offrir », affirme le directeur de l’administration de l’ARK, Daryl Combden.

Une fois entièrement déployé, le câble de fibre optique va permettre d’offrir une connexion Internet rapide pour les entreprises, les foyers et les services publics régionaux. (Administration régionale Kativik)

Le déploiement du réseau de fibre optique, qui a coûté plus de 300 millions de dollars, est toujours en construction dans la région.

Pour le moment, seuls quelques villages de la baie d’Hudson y sont connectés, notamment Kuujjuarapik, Umiujaq, Inukjuak et Puvirnituq.

Il faudra attendre jusqu’en 2026 pour que l’ensemble des communautés du Nunavik soient branchées au réseau de fibre optique, qui va offrir des vitesses de navigation supérieures à Starlink et à moindre coût.

Félix Lebel, Radio-Canada

Journaliste à Sept-Îles

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