80 % des enseignants du Nunavut victimes de violence cette année, selon un sondage

L’Association des enseignants du Nunavut (AEN) affirme que 90 % de ses membres ont été témoins d’une forme de violence dans les écoles du Nunavut cette année, tandis que plus de 83 % en ont été victimes directement.
Ces données sont tirées d’un sondage mené par l’AEN sur une période de deux semaines au mois de mai et pour lequel 218 personnes ont répondu, soit environ 30 % de l’ensemble des membres.
«Si un autre ministère du Nunavut menait une enquête comme celle-ci et que les résultats montraient que 90 % des personnes étaient témoins de violence, ils fermeraient probablement le ministère», croit le président de l’AEN, Justin Matchett, qui a partagé les résultats du sondage avec CBC/Radio-Canada.
«Les enseignants doivent venir travailler et se sentir à l’aise et en sécurité dans leur rôle», poursuit-il. «Ils ne peuvent pas faire leur travail efficacement lorsqu’ils sont confrontés à ce genre de situations.»
Selon Justin Matchett, les enseignants demandent au gouvernement de leur fournir une formation plus étoffée et de mettre à leur disposition plus de ressources pour faire face à certains incidents.
Désamorcer une situation verbalement ne fonctionne pas toujours. Et malheureusement, nous avons eu des enseignants qui se cachaient dans des salles de classe parce qu’ils étaient attaqués. Et cela n’est pas acceptable.
– Justin Matchett, président de l’Association des enseignants du Nunavut
Il croit par ailleurs que le gouvernement territorial doit préconiser une approche plus holistique pour soutenir les élèves, soulignant qu’une des premières étapes était de réformer le cursus scolaire du Nunavut, qui s’appuie actuellement sur celui de l’Alberta.
«Le cursus scolaire au Nunavut est obsolète et ça en est gênant. Nous avons besoin d’un cursus mis à jour et axé sur la santé mentale», soutient-il.
Des incidents de violence toujours sous-déclarés
En 2022, le ministère de l’Éducation a mis sur pied une base de données lui permettant de colliger les incidents violents dans des écoles. Mis sur pied dans la foulée d’une enquête de CBC, cet outil de signalement en ligne oblige les éducateurs, le personnel et les élèves à faire part des incidents au fur et à mesure qu’ils surviennent.
Malgré cela, Justin Matchett affirme que l’AEN suspectait que la violence dans les écoles continue d’être largement sous-déclarée : «Les réponses ont montré que plus de 50 % de nos membres disent ne pas signaler [ces incidents].»
L’outil a toutefois été sous-utilisé au cours de sa première année, ne recensant que 362 incidents de violence. Un chiffre bien en deçà des plus de 1000 incidents que CBC a répertoriés dans son reportage d’enquête, en 2021.
«Je sens que rien ne sera fait»
Près d’un quart de tous les répondants ont déclaré ne pas se sentir soutenus par l’AEN ni par le gouvernement du Nunavut.
«J’ai fait un signalement dans le passé et rien n’en est ressorti», a écrit un répondant.
«Je sens que rien ne sera fait à ce sujet, donc cela devient réprimé et normalisé», a ajouté un autre membre.
Justin Matchett a d’ailleurs dit que l’AEN s’inquiétait de la normalisation de la violence dans les écoles, non seulement parmi le personnel, mais aussi aux yeux des élèves.
Un autre répondant a quant à lui qualifié le système de signalement de «perte de temps».
Le ministère de l’Éducation n’a pas répondu à notre demande de commentaire.
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