La Cour supérieure du Québec dénonce une « injustice criante » dans l’administration de la justice au Nunavik
Un jugement de la Cour supérieure du Québec conclut que les citoyens du Nunavik (région inuite du Nord-du-Québec) sont victimes d’une « injustice criante » dans l’administration de la justice. Puisqu’il n’existe pas de centre de détention à proximité, les condamnés ne peuvent suivre une peine discontinue, soit de quelques jours par semaine.
Dans un jugement rendu le 28 août dernier, le juge Richard Grenier de la Cour supérieure du Québec considère que les citoyens du Grand Nord sont victimes de discrimination et que le ministère de la Sécurité publique fait preuve de négligence. C’est son analyse d’un dossier porté en appel qui a mené à ces conclusions.
Les événements remontent à septembre 2017, lorsqu’une femme de Kuujjuaq avait plaidé coupable de conduite avec les facultés affaiblies. Son avocate réclamait une peine discontinue, étant donné la nature de l’infraction.
Le juge de la Cour du Québec n’avait pas répondu favorablement à cette requête, puisque l’établissement de détention le plus proche se situe à Amos, soit à 1237 kilomètres de Kuujjuaq. L’avocate de la défense avait donc décidé de faire appel de cette décision.
Un jugement déposé
Dans son jugement, le juge Richard Grenier de la Cour supérieure martèle que tout citoyen a le droit de purger une peine discontinue et que les motifs administratifs ne justifient pas la violation des droits prévus dans la Charte des droits et libertés. « Cette situation discriminatoire et inadmissible nécessite l’intervention immédiate de cette Cour », peut-on lire dans le jugement.
La Cour supérieure ordonne donc que la peine de la contrevenante soit suspendue et exige une intervention du ministère de la Sécurité publique.
Désigner des établissements adéquats
Le juge donne un délai de six mois au ministère de la Sécurité publique pour qu’il désigne des établissements adéquats au Nunavik pour permettre les peines discontinues.
Le V-P du Barreau du Québec satisfait
Il s’agit d’un problème dénoncé par plusieurs institutions, dont le Barreau du Québec et le Protecteur du citoyen. En entrevue à l’émission Des matins en or, le vice-président du Barreau du Québec, Marc Lemay, s’est réjoui des conclusions du juge, rappelant que cet enjeu est soulevé depuis plusieurs années par le Barreau.
« [C’est un] laxisme qui existe depuis longtemps dans le Nord, on ne s’en occupe pas. C’est la première sentence qui vient d’être rendue, mais selon moi, il pourrait y en avoir d’autres », a-t-il affirmé en entrevue avec l’animateur David Chabot.
Selon Me Lemay, des solutions existent. « On pourrait transformer les quartiers cellulaires des postes de police en centre de détention, leur donner les mêmes pouvoirs », a-t-il expliqué.