L’approvisionnement de denrées dans l’Arctique canadien, ce n’est pas une mince affaire

« La place est plus petite, c’est plus familial si vous voulez. Le monde vient ici, ça parle, ça jase. C’est pas comme un grand magasin », affirme le propriétaire, Marc Dubeau. (Claudiane Samson/Radio-Canada)
Le transport de denrées vers les collectivités isolées de l’Arctique canadien dont Iqaluit, au Nunavut, requiert une logistique hors du commun. Et malgré toutes les précautions qui sont prises, parfois rien ne se déroule comme prévu.

Pour l’épicier d’Iqaluit Marc Dubeau, les mois de mars et d’avril marquent la saison des commandes de livraison par bateau. Une routine qui durera, dit-il, jusqu’en octobre.

La baie de Frobisher étant sous la glace pour encore plusieurs mois, le premier arrivage se fera normalement autour de juillet.

Marc Dubeau dirige l’épicerie Baffin Island Canners créée par ses parents dans les années 1970. (Claudiane Samson/Radio-Canada)
« On fait venir les choses qui sont plus pesantes et qui se conservent comme la farine, le riz, le sucre, en grosse quantité, les produits de nettoyage aussi. Les choses qui coûteraient cher à faire venir par avion. »

Marc Dubeau, propriétaire de Baffin Island Canners

L’entreprise, fondée par ses parents dans les années 1970, Baffin Islands Canners, agit également à titre de grossiste auprès de restaurants ou d’organisations gouvernementales. Ces commandes volumineuses devront durer jusqu’en juillet de l’année suivante.

Des conteneurs de transport maritime remplis de denrées alimentaires sont empilés à l’extérieur d’une épicerie d’Iqaluit. (Claudiane Samson/Radio-Canada)

« Papier de toilette? Oh! 200 à 300 caisses, sinon plus. On a des conteneurs dehors, c’est plein plein plein, la bâtisse est pleine aussi », s’exclame Marc Dubeau.

S’il vient à manquer d’un produit en particulier, il lui faudra passer la commande afin qu’elle soit livrée par avion. Le prix en sera indéniablement modifié. « Ça peut aller jusqu’à 40 $ de différence sur un sac de farine entre le sealift et l’avion. C’est énorme. »

Mais le défi est également de s’assurer que les dates de péremption ne soient pas dépassées durant l’année. « Un mois, deux mois [passé la date de péremption] ça passe, mais plus que ça, les clients le disent. »

L’effet des subventions fédérales
Le programme fédéral de soutien financier au transport de denrées alimentaires au Nord est bien visible dans les épiceries d’Iqaluit. (Claudiane Samson/Radio-Canada)

« Sans Nutrition Nord, ça serait pas achetable », affirme d’emblée l’épicier entre les boîtes de nourriture empilées jusqu’au plafond de l’arrière-boutique.

Le programme, mis à l’épreuve par les critiques ces dernières années, vise à subventionner le transport de produits alimentaires frais tels les fruits et légumes, la viande ou les produits laitiers.

Robert Pelletier, le président de Consultants de l’Arctique, une entreprise de logistique de transport pour le Grand Nord, affirme que le programme contribue à payer la majorité des produits de ses clients.

Le grossiste expédie chaque année, uniquement par avion, plus de 2 millions de kilogrammes de denrées.

« À peu près 75 % des aliments qui vont monter par avion vont être couverts par ce programme-là. Pour certaines communautés plus loin, où le coût de transport aérien est astronomique, ça va être jusqu’à 100 % des denrées qu’ils vont faire monter par avion. »

Robert Pelletier, président, Consultants de l'Arctique

À Grise Fjord, le village le plus au nord du pays, le transport par avion d’une caisse de 24 canettes de boissons gazeuses, pourrait s’élever à 210 $, une somme qui ferait grimper le prix d’une seule canette à 17 $, selon le grossiste.

Toutefois, Robert Pelletier explique que les frais de transport ne sont qu’une partie du casse-tête de l’approvisionnement de denrées.

C’est par avion que sont acheminées les denrées dans les collectivités du Nunavut pendant la majeure partie de l’année. (Claudiane Samson/Radio-Canada)

Le débat entourant la fusion possible entre les deux seuls transporteurs aériens a mis l’accent sur la vulnérabilité des collectivités de l’Arctique face au transport. Le Bureau fédéral de la concurrence a déterminé en février dernier qu’une fusion risquerait de réduire la capacité de transport et l’augmentation des prix.

Et puis, le réchauffement climatique dans l’Arctique occasionne des difficultés pour le transport maritime. L’an dernier, dit Robert Pelletier, les glaces n’ont pas permis au bateau d’accoster à Pangnirtung, sur l’Île de Baffin.

« Le ‘Nord’, c’est pas comme le reste du monde. Il va y avoir des problèmes à cause de la température, à cause de la mécanique, à cause des urgences. On ne sait pas quel facteur, mais il va arriver quelque chose. »

Robert Pelletier, président, Consultants de l'Arctique
La décharge municipale d’Iqaluit a atteint sa capacité maximale et sera remplacée par un nouveau dépotoir d’ici 2020 au coût de 35 millions de dollars. (Claudiane Samson/Radio-Canada)
La gestion des déchets

Le transport de denrées nécessite un emballage supplémentaire qui se retrouvera, la plupart du temps, à la décharge municipale. Iqaluit ne possède pas, pour l’instant, de programme de recyclage ou de compostage.

Le dépotoir de cette municipalité a dépassé depuis plusieurs années sa durée de vie et sera remplacé d’ici 2020 par un nouveau, à l’extérieur de la ville. Un programme de tri et d’emballage de déchets en ballots pour s’assurer que les ordures ne s’envolent pas sur la baie sera aussi mis en place.

Certains grossistes placent les caisses de transport sous consigne de façon à ce qu’elles soient retournées une fois vides, des mesures pour tenter continuellement d’améliorer un service complexe.

Des conteneurs de transport maritime parsèment la rive de la baie de Frobisher. (Claudiane Samson/Radio-Canada)

Claudiane Samson, Radio-Canada

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