Comprendre les lemmings, le « garde-manger » de l’Arctique canadien

Les lemmings sont parmi les mammifères les plus abondants de l’Arctique canadien. (Musée canadien de la nature)
Les lemmings et leur forte fluctuation de population ont de grandes conséquences sur le reste de la faune de l’Arctique canadien, selon un mammalogiste du Musée canadien de la nature, Dominique Fauteux. Il est dans le Nord canadien cet été pour mieux comprendre les cycles d’abondance de ce petit rongeur, à la base de la chaîne alimentaire de la toundra.

Partout à travers l’Arctique, les lemmings sont reconnus pour leur changement constant de population. Ces petits mammifères sont les plus abondants de la région, mais leurs nombres ont tendance à exploser et ensuite décliner drastiquement dans l’espace de quatre à cinq ans.

En 1958, le documentaire oscarisé de Walt Disney, Le Désert de l’Arctique, avait faussement attribué ce déclin cyclique au suicide des lemmings qui se jettent d’une falaise dans l’océan Arctique lorsqu’ils deviennent trop abondants.

Le documentaire et le mythe du suicide collectif ont depuis été réfutés, mais les experts ont encore de la difficulté à expliquer ces grandes fluctuations.

Selon des recherches effectuées en Norvège, les déclins de lemmings pourraient se produire quand ceux-ci dévorent toute la mousse dont ils ont besoin pour se nourrir.

Il existe quatre espèces de lemmings dans l’Arctique canadien, notamment le lemming brun. (Dominique Fauteux)

Ce n’est toutefois pas une chose que Dominique Fauteux a remarqué dans ses recherches dans le Nord canadien.

Après une étude de trois ans sur l’île Bylot dans le Haut-Arctique du Nunavut, le chercheur en est venu à l’hypothèse que la prédation est un facteur majeur réduisant la survie des lemmings.

Les lemmings sont à la base de la chaîne alimentaire de la toundra. Ils vivent et se nourrissent des plantes sous la neige l’hiver, mais deviennent ensuite une prise facile pour les prédateurs lors de la fonte de la neige au printemps.

Le mammalogiste Dominique Fauteux travaille dans l’Arctique depuis 2011. (Musée canadien de la nature)

« Ils sont tellement importants, qu’ils vont même avoir des effets indirects sur d’autres espèces de proies, comme les bruants et les oiseaux de rivage, explique le chercheur. Lorsqu’il y a beaucoup de lemmings autour d’eux, ce sont les lemmings qui vont être chassés, donc ça permet un plus haut taux de succès de reproduction pour les oiseaux. »

Le chercheur dit maintenant vouloir comprendre pourquoi la population de lemmings prend du temps à se rétablir une fois que les prédateurs migrent ailleurs.

Son équipe suit à présent la population de lemmings dans trois régions différentes de l’Arctique. L’analyse de ces données démographiques permettra de mieux comprendre la dynamique des cycles d’abondance.

En hiver, le lemming variable a de plus longues griffes que le lemming brun, qui lui permet de mieux creuser dans la neige. (Dominique Fauteux)
Une colonie de lemmings

Cet été, le chercheur capturera aussi une dizaine de lemmings à Cambridge Bay pour construire une colonie dans une chambre froide de la nouvelle Station canadienne de recherche dans l’Extrême-Arctique.

Cette colonie de lemmings permettra à Dominique Fauteux et à ses collaborateurs de Savoir polaire Canada d’étudier l’adaptation morphologique et comportementale des lemmings à l’approche de l’hiver.

En simulant des conditions hivernales, l’équipe espère pouvoir mieux étudier les interactions en ce qui concerne la population.

La Station canadienne de recherche dans l’Extrême-Arctique à Cambridge Bay en mars 2018, avant son ouverture officielle. (Mario De Ciccio/Radio-Canada)
Changements climatiques

Le mammalogiste se dit inquiet de l’impact qu’auront les changements climatiques sur la population de lemmings dans l’Arctique.

Avec les hivers de plus en plus doux, le gel et le dégel peuvent former une croûte dure sur la neige, qui complique la tâche des lemmings à creuser pour se nourrir ou s’abriter.

« Le lemming fait partie d’un tout de l’écosystème, donc tout changement qui va affecter le lemming risque d’affecter tous les animaux qui en dépendent. »

Dominique Fauteux, mammalogiste du Musée canadien de la nature

Selon Dominique Fauteux, des chercheurs en Europe et en Scandinavie ont déjà remarqué des cycles de population moins abondants dans leurs régions.

Si la population ne semble pas avoir été touchée au Canada pour l’instant, le chercheur veut s’assurer de bien comprendre les facteurs qui pourraient mener à ce déclin.

Mario De Ciccio, Radio-Canada

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