Cinq demandes d’admission à l’école francophone refusées dans un territoire du Nord canadien

L’École Allain-St-Cyr est l’école francophone de Yellowknife, capitale des Territoires du Nord-Ouest, dans le Nord canadien. (Mario De Ciccio/Radio-Canada)
La ministre de l’Éducation des Territoires du Nord-Ouest, Caroline Cochrane a revu et refusé cinq demandes d’admission d’enfants non-ayants droit dans les écoles francophones de Yellowknife et de Hay River, vendredi.

La ministre de l’Éducation et son équipe auront attendu jusqu’au dernier jour des vacances d’été et au dernier jour avant la dissolution de l’Assemblée législative pour transmettre leur décision par écrit aux parents et à la Commission scolaire francophone des Territoires du Nord-Ouest.

Cet été, la Cour suprême des Territoires du Nord-Ouest avait ordonné à la ministre de revoir son refus d’admettre un enfant à l’École Allain-St-Cyr en septembre 2018.

Le juge Paul Rouleau avait conclu que la ministre n’avait pas pris en considération certains facteurs, comme l’épanouissement de la communauté francophone, défendu par l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés, dans sa prise de décision.

Le gouvernement ténois porte la cause en appel, mais la ministre avait tout de même dit qu’elle reverrait sa décision ainsi que celle qui concerne d’autres cas qui ont été rejetés au cours des derniers mois.

Ce nouveau refus a été communiqué aux parents et à la commission scolaire vendredi après-midi.

Caroline Cochrane est la ministre de l’Éducation, de la Culture et de la Formation des Territoires du Nord-Ouest. (Mario De Ciccio/Radio-Canada)
Qu’est-ce qu’un ayant droit?

L’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés donne le droit à certains parents, les ayants droit, de faire instruire leurs enfants dans la langue de la minorité linguistique, là où le nombre le justifie.

Les ayants droit sont :

  • les parents dont la langue maternelle est le français;
  • les parents qui sont allés à l’école primaire en français;
  • les parents dont l’un des enfants fréquente ou a fréquenté une école de langue française.

La décision « déçoit extrêmement » la CSFTNO et son président, Simon Cloutier, qui ont expliqué vouloir prendre le temps de revoir chaque décision de plusieurs pages avant de les commenter davantage.

« Tout ce que je peux dire, pour l‘instant, c’est que c’est clair qu’il y a un problème majeur avec la ministre de l’Éducation, mais aussi avec les hauts fonctionnaires qui [la] conseillent », s’est contenté de dire Simon Cloutier.

« C’est difficile à croire, qu’en 2019, on soit encore en train de se battre pour des choses aussi simples que ça. »

Simon Cloutier, président de la CSFTNO
Aux Territoires du Nord-Ouest, la CSFTNO doit évaluer, approuver une demande d’admission de parents non-ayants droit avant de la recommander à la ministre de l’Éducation. (Mario De Ciccio/Radio-Canada)
Communauté pas « en péril »

Dans une entrevue accordée à Radio-Canada, le sous-ministre adjoint à l’Éducation, John MacDonald, a expliqué que beaucoup de travail avait été fait pour en venir à cette décision.

Selon lui, le ministère a révisé tous les facteurs que le juge avait notés dans sa décision. Il s’est, entre autres, penché sur les statistiques d’admission dans les écoles du territoire et la démographie de la communauté francophone.

« À ce stade, il est devenu très clair que, selon les chiffres que nous avons, rien ne met en péril la force ou la vitalité de la communauté francophone et que, dans ces circonstances, il n’est pas nécessaire d’admettre des non-ayants droit dans une école de langue française », a-t-il soutenu.

Selon John MacDonald, pour respecter l’article 23 de la Charte, la ministre doit s’assurer que les admissions ne sont pas trop restrictives au point d’en devenir un détriment pour la vitalité de l’école et de la communauté francophone.

L’École Boréale de Hay River et l’École Allain-St-Cyr de Yellowknife, sont les deux écoles francophones des T.N.-O. (Mario De Ciccio/Radio-Canada)

Cependant, elle doit aussi veiller à l’offre d’un « programme de français langue première de qualité supérieure » dans les deux écoles dit-il.

C’est le but de la directive ministérielle, rappelle-t-il, qui avait été établie en 2016 après des consultations avec la communauté.

« Certaines personnes sont extrêmement préoccupées et soucieuses de veiller à ce que l’environnement scolaire et l’enseignement soient entièrement en français de très haute qualité, dit-il. Ça fait partie du calcul qui entre dans la recommandation pour la décision. »

La commission scolaire a souvent revendiqué être la mieux placée pour déterminer ce qui est dans l’intérêt de ses écoles.

Le sous-ministre précise pour sa part que son ministère respecte l’apport de la CSFTNO, mais ajoute que le système éducatif est composé de différents acteurs qui ne voient parfois pas les choses de la même façon.

Une réponse de dernière minute

Cette décision est venue quelques jours à peine avant la rentrée scolaire dans les écoles francophones alors que certaines écoles de Yellowknife avaient déjà recommencé.

Le sous-ministre adjoint admet que la révision des cinq cas a pris du temps, mais que ce temps était nécessaire pour bien évaluer les demandes d’admission en portant une attention particulière aux points soulignés par la Cour.

La rentrée scolaire aura lieu mardi le 3 septembre dans les écoles de la CSFTNO. (Mario De Ciccio/Radio-Canada)

« Je crois que ce travail avait été fait dans notre première recommandation [à la ministre] et dans la décision initiale de la ministre. Mais maintenant, nous avons tout mis en oeuvre pour démontrer que cela a été le cas pour chaque demande. »

Il insiste sur le fait que dans l’avenir, le gouvernement s’assurera d’expliquer dans ses réponses aux demandes d’admission son raisonnement et les facteurs évalués pour en venir à une décision.

La directive ministérielle critiquée

Depuis le début du litige, la CSFTNO a souvent mentionné vouloir relancer le débat sur la gestion des admissions de ses écoles.

Plus tôt vendredi, dans une réponse écrite à une question posée en Chambre par le député de Frame Lake, Kevin O’Reilly, la ministre Caroline Cochrane a indiqué qu’il faudra attendre les conclusions de l’appel du gouvernement avant de se prononcer sur la directive ministérielle. Ce sera à la prochaine Assemblée législative de choisir, dit-elle.

Mario De Ciccio, Radio-Canada

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