Musique du Nord canadien : Carmen Braden aux confluents de la gloire et de la persévérance
C’est un tourbillon ces jours-ci dans la vie de la compositrice des Territoires du Nord-Ouest Carmen Braden.
Il y a deux semaines, elle a été sacrée compositrice classique de l’année au gala Western Canadian Music Awards. Quelques jours plus tôt elle lançait son second album studio en carrière, Songs of Invisible Summer Stars. Et ces jours-ci, le prestigieux Chœur de chambre du Canada présente sur différentes scènes du pays sa composition « Where Waters Meet ».
« Ce prix constitue pour moi un appui et un encouragement à persévérer dans la musique, note-t-elle à propos de son Canadian Music Award, et particulièrement dans les compositions plus expérimentales et moins mainstream. C’est très excitant. »
Car si on lui colle l’étiquette de « classique » la musique de Carmen Braden sort nettement des sentiers battus. Aux instrumentations de cordes et d’instruments à vent (le hautbois est à l’honneur sur Songs of Invisible Summer Stars), elle marie des enregistrements de sons de la nature qu’elle capte sur le territoire. Dans l’œuvre de Carmen Braden le Nord prend place au sein de l’orchestre.
Les sons du territoire, explique-t-elle, « ça vous transporte directement dans le lieu. Les instruments, c’est différent. L’instrument a beaucoup d’histoire et une voix particulière. Comme compositrice, on écrit avec cette voix en tête. Mais cela est vrai aussi, par exemple, du son de la glace. Pour moi, la glace, c’est l’instrument du lac. »
Une pièce pour la réconciliation
La somme de cette audace et de cette créativité est récompensée par des invitations, comme celle que lui a faite le Chœur de chambre du Canada qui lui a commandé une importante composition. La pièce en cinq mouvements « Where waters meet » se veut la porte d’entrée de l’ensemble choral basé à Ottawa vers une réconciliation avec les peuples autochtones du Canada.
Pour réussir cette lourde tâche avec le respect qu’une pareille entreprise implique, la compositrice a consacré deux ans d’effort et de collaboration avec le Chœur de chambre, mais surtout avec des artistes autochtones.
De textes sur la thématique de l’eau ont d’abord été demandés à l’autrice Ojibwé Yolanda Bonnel. L’un d’eux porte sur la présence continue de sources d’eau contaminés dans certaines communautés autochtones et l’autre évoque une rivière en Ontario où plusieurs jeunes autochtones ont trouvé la mort.
« Les deux poèmes sont très beaux. C’est effectivement très lourd, oui, mais grâce à la force des images de Yolanda Bonnel, on arrive à en dégager de la beauté. Ce fût pour moi un honneur immense que de mettre ces textes en musique. »
Le violoniste déné Wesley Hardisty a également été intégré au projet. Sur scène il accompagne le chœur qui interprète la musique de Carmen Braden. L’artiste se dit très choyée d’avoir pu prendre part à un tel projet. « Ça a été extraordinaire et très enrichissant, sur le plan artistique et sur le plan humain aussi. Ça a demandé un long processus et aussi un travail d’humilité. »