L’épuisement professionnel de policiers, une menace au maintien de l’ordre au Nunavut
L’épuisement professionnel de certains agents de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) dans des communautés aux prises avec des problèmes sociaux pourrait avoir alimenté de récentes interventions controversées, affirme Amanda Jones qui dirige la GRC au Nunavut.
La surintendante principale affirme qu’elle tente de trouver des solutions pour améliorer les relations entre les Inuit et la police.
« Un agent est toujours responsable », soutient-elle. « Après avoir tenu l’agent responsable [il faut] s’assurer que la communauté est en sécurité, puis se demander : “ Y a-t-il un facteur explicatif sur lequel je devrais me pencher pour m’assurer que le bien-être des agents est aussi pris en compte? ” »
LaGRCest dans l’eau chaude ces derniers jours depuis la publication d’une vidéo montrant l’arrestation musclée d’un homme à Kinngait. Ce dernier a par la suite été hospitalisé à Iqaluit après avoir été attaqué par un autre détenu durant sa détention.
« Notre historique n’a pas toujours été positif »
Au cours des dernières années, la Commission des services juridiques du Nunavut a envoyé plusieurs lettres au gouvernement territorial concernant le traitement de détenus inuit par des agents de la GRC.
Dans la plus récente lettre, qui remonte au mois de janvier, le directeur général de la Commission, Benson Cowan, relate l’expérience dedeux femmes fouillées à nu par des agents de la GRC au Nunavut.
« La nature systémique d’une telle conduite est si omniprésente que seul un examen approfondi serait efficace pour comprendre la véritable portée et la nature du problème », peut-on lire dans la lettre adressée à la surintendante principale, Amanda Jones.
Cette dernière s’est rendue l’année dernière dans toutes les communautés du territoire pour faire le point. Elle admet que la situation est problématique.
« Notre historique n’a pas toujours été positif », reconnaît Amanda Jones. « Il y a beaucoup de choses sur lesquelles nous devons nous pencher et que nous devons comprendre. »
Conditions de travail difficiles
Selon la surintendante, 13 des 25 détachements de la GRC au Nunavut sont formés de deux agents, ce qui implique qu’un policier est toujours de garde ou en poste. « Vous êtes toujours sur le qui-vive », dit-elle. « Vous n’avez jamais de temps mort. »
Elle affirme que les agents travaillent dans des collectivités qui font régulièrement face à des crimes violents, des cas de suicide et des abus sexuels. À cela vient s’ajouter l’importante consommation d’alcool et de drogues chez certains habitants.
Amanda Jones qualifie de « troublante » la récente vidéo montrant l’arrestation d’un homme à Kinngait. « Ce type d’interventions est inacceptable », dit-elle.
Des changements à venir
Sur ses 131 agents réguliers, la Division V de la GRC au Nunavut compte trois agents inuit. Elle précise que deux candidats inuit sont également en processus d’embauche.
Cet automne, la GRC offrira à des nouveaux agents une formation de deux semaines qui abordera des notions culturelles et historiques, comme l’abattage de chiens de traîneaux dans les années 1960.
« Même les agents nous ont manifesté leur désir d’être mieux outillés », rapporte Amanda Jones. « Ils ressentent parfois de la frustration lorsqu’ils ignorent pour quelles raisons certains Inuit s’emportent contre eux. C’est peut-être lié au passé, mais c’est toujours très présent. »
Dans les trois territoires du Nord, la GRC évalue aussi la possibilité de créer des postes de policiers auxiliaires chargés de faire le pont entre les communautés et les forces policières. Selon la surintendante principale, la difficulté de cette initiative repose sur la capacité de formation et sur le manque de financement.
Le principal défi, ajoute Amanda Jones, est de recruter les agents adéquats : « Vous devez être engagé dans la communauté pour réussir et pour être heureux. Vous devez comprendre la culture et vous y intéresser. »
Avec des informations de La Presse canadienne