Dans le Grand Nord canadien, l’entreprise Énergie Yukon vise une production quasi entièrement renouvelable en 10 ans
La société d’État Énergie Yukon a déposé devant l’Assemblée législative son grand projet de développement en infrastructures pour la prochaine décennie dont la facture est estimée à plus d’un demi-milliard de dollars.
Le plan, résolument ambitieux, vise à répondre à la demande anticipée en énergie de la prochaine génération de Yukonnais tout en atteignant les objectifs de réduction de gaz à effet de serre établis par le gouvernement territorial dans sa grande stratégie sur les changements climatiques.
Le plan prévoit une dizaine de projets dont certains sont déjà en cours de planification. D’autres, à plus long terme, nécessitent encore l’obtention d’un financement.
Le PDG d’Énergie Yukon, Andrew Hall, a bon espoir que le plan dans son ensemble obtiendra l’aval des gouvernements. « C’est un plan qui en termes relatifs est atteignable. […] Le plan en soi est moins ambitieux que ceux des territoires voisins. »
Pour maximiser la génération d’énergie au territoire, le plan prévoit plusieurs partenariats avec les producteurs indépendants d’électricité, comme les projets de ferme solaire ou éolienne de certaines Premières Nations.
Stockage d’énergie sur piles au montant de 30 millions de dollars
Ce projet, dont le financement a été sécurisé, sera situé près de la centrale de Whitehorse après que certains résidents se sont opposés à l’emplacement proposé dans un secteur au nord de la capitale. Les piles auront une capacité de 8 mégawatts / 40 mégawattheures.
Augmentation du stockage d’eau des lacs du sud du Yukon
Ce projet, qui a initialement soulevé l’ire des riverains, propose d’augmenter le niveau des lacs de 30 cm, ce qui permettra à la centrale de Whitehorse de générer 6,5 gigawattheures annuellement.
Expansion de la minicentrale d’Atlin, en Colombie-Britannique
Bien qu’il s’agisse d’un projet à plus long terme, Andrew Hall affirme que les négociations sont déjà en cours depuis plusieurs mois auprès de la Première Nation Taku River Tlingit, la propriétaire de la centrale.
Centrale d’accumulation par pompage du lac Moon
Ce projet propose d’installer une turbine au bas d’une dénivellation de 3900 mètres entre le lac Moon et le lac Tutshi dans le sud du territoire. Le PDG d’Énergie Yukon affirme que le site est de classe mondiale
pour un projet d’accumulation par pompage, aussi appelé pompage-turbinage (Nouvelle fenêtre)et qui consiste à pomper l’eau vers le lac et faire tourner la turbine en hiver quand le besoin en énergie est le plus important.
Ligne de transmission vers Skagway, en Alaska
Cette ligne de 138 kilovolts permettrait de vendre l’excès en électricité dont dispose Énergie Yukon en été pour alimenter le village alaskien enclavé qui peine à fournir en énergie les nombreux bateaux de croisière qui s’y arrêtent.
Le Yukon, contrairement aux territoires voisins, dépend déjà en majeure partie de l’hydroélectricité, mais l’ouverture de nouvelles exploitations minières, l’augmentation de la population et la dépendance accrue au chauffage électrique engendrent chaque hiver un manque à gagner énergétique qui force Énergie Yukon à se tourner vers la génération au diesel ou au gaz naturel.
Essentiellement, c’est ce que le plan propose d’améliorer, mais Andrew Hall admet qu’il ne sera jamais complètement possible d’éliminer l’énergie fossile.
« Quand on regarde la modélisation, nous atteignons 97 % en moyenne [d’énergie renouvelable] », un niveau, rappelle-t-il, qu’a connu le territoire dans les années 1990 et qui a placé le Yukon dans une position enviable au pays.
Quant aux tarifs, le PDG estime que la facture des Yukonnais se compare à l’heure actuelle à celle des résidents de Toronto, mais demeure bien en deçà de celles des habitants des deux autres territoires.
Énergie Yukon attend présentement la réponse de la Régie des entreprises du service public pour une augmentation des tarifs qui, selon Andrew Hall, aura très peu d’incidence sur la facture des consommateurs. « À peine 70 cents de plus pour les résidents, et une baisse d’un ou deux dollars pour les commerces. »
Les responsables visent donc à obtenir du gouvernement fédéral la majeure partie du financement pour les projets en infrastructures, de façon à assurer un impact minimal sur les Yukonnais.
Le plan note toutefois l’incertitude entourant cette source de financement et prévoit certains plans alternatifs sous forme de partenariats auprès des Premières Nations ou d’autres groupes, comme la Société de conservation du Yukon.
Ainsi, selon les projets retenus au fil des ans, la facture totale pourrait atteindre 651 millions de dollars, ou 163 millions de dollars avec l’aide du fédéral.