Une Journée nationale des peuples autochtones assombrie au Yukon

En raison de la hausse des cas de COVID-19 au Yukon, la Journée nationale des peuples autochtones sera célébrée de façon très modeste cette année encore. (Vincent Bonnay/Radio Canada)

L’éclosion d’infections au SRAS-CoV-2 au Yukon a forcé la réécriture du programme prévu pour la Journée nationale des peuples autochtones.

L’événement le plus important prévu pour le 21 juin devait être la démolition du pensionnat pour Autochtones de Lower Post, en Colombie-Britannique, à quelques kilomètres de sa frontière avec le territoire.

Nombreux sont les résidents et survivants du pensionnat de Lower Post qui attendaient cette date avec impatience pour voir le pensionnat pour Autochtones être enfin détruit. Le conseil de Daylu Dena, installé à Lower Post, a pourtant dû annoncer jeudi son intention de reporter l’événement, notamment en raison de la hausse des cas de COVID-19 qui agite le Yukon voisin depuis deux semaines.

Une autre raison est également invoquée dans un communiqué envoyé par le conseil : des restes d’animaux ont été découverts, jeudi matin, sur un chantier de construction de la communauté.

L’annonce de la démolition a pourtant été faite il y a plusieurs mois. Le chef adjoint du conseil, Harlan Schilling, en a aussi parlé de nouveau lors de la marche à Whitehorse en mémoire des 215 enfants de Kamloops, le 31 mai dernier. Pour lui, la démolition aurait dû être un moment historique, surtout dans ce contexte particulier.

Le chef adjoint du conseil de Daylu Dena, Harlan Schilling, se tient dans le bâtiment de ce qui a été le pensionnat pour Autochtones de Lower Post, en activité entre 1951 et 1975. (Vincent Bonnay/Radio Canada)
Une longue attente

Il affirme que cela fait déjà très longtemps que les survivants des pensionnats voulaient se débarrasser du bâtiment. Plusieurs avaient évoqué l’idée qu’il soit brûlé, notamment pour que cela purifie le lieu où il se trouve.

La communauté compte construire un nouveau bâtiment à son image là où se trouvait l’ancien pensionnat.

Ce pensionnat est un nuage au-dessus de nos têtes depuis longtemps.Harlan Schilling, chef adjoint du conseil de Daylu Dena
Le pensionnat pour Autochtones de Lower Post, dans le nord de la Colombie-Britannique, devait-être démoli le 21 juin, Journée nationale des peuples autochtones. (Vincent Bonnay/Radio Canada)

Le chef adjoint affirme pourtant croire qu’il ne faut pas oublier ce qu’il s’est passé à Lower Post. « Je crois fermement que nous ne devons pas effacer l’histoire; nous devons apprendre d’elle et avancer, explique-t-il. Nous ne pouvons pas changer le passé, mais en travaillant avec les différents ordres de gouvernement, s’ils veulent vraiment la réconciliation, alors nous pouvons avancer et avoir une voix. »

Adeline Webber déplore également le report de la démolition du pensionnat de Lower Post, que certains de ses frères ont fréquenté.

« C’est un événement auquel on tenait à voir un membre de notre famille participer, affirme Mme Webber. Mais il se passe beaucoup de choses actuellement et avec cette annulation, peut-être aura-t-on le temps de mieux se préparer. »

Deux des frères d’Adeline Webber, l’administratrice du Yukon et membre du conseil des Tlingits de Teslin, sont allés au pensionnat pour Autochtones de Lower Post. (Wayne Vallevand/Radio Canada)

L’administratrice du Yukon et membre du conseil des Tlingits de Teslin affirme que la Journée nationale des peuples autochtones était particulièrement attendue cette année en raison de la pandémie et de la récente découverte au pensionnat de Kamloops.

« J’aime beaucoup les activités de danse et de tambour qui se tiennent habituellement au centre culturel Kwanlin Dün, dit-elle. Tout le monde porte fièrement ses habits traditionnels avec amis et famille qu’on voit moins souvent, surtout en ces temps de COVID! »

« Rester dans sa bulle »

La Journée nationale des peuples autochtones ne sera pas non plus celle qu’espérait Doris Bill, la cheffe de la Première Nation Kwanlin Dün. Alors que cette femme avait espéré pouvoir participer aux festivités en personne, elle explique qu’elle a finalement préféré enregistrer un message qui sera diffusé le 21 juin.

Doris Bill encourage néanmoins les membres de Kwanlin Dün à célébrer la journée en restant, dans leur bulle, avec leurs proches, et à profiter de la nature que le territoire a à offrir.

Je ne pense pas que les gens danseront le 21 juin; pour nous, ça sera surtout une occasion de parler de qui nous sommes, de ce que nous traversons.Doris Bill, cheffe de la Première Nation Kwanlin Dün
La cheffe de la Première Nation Kwanlin Dün, Doris Bill, conseille aux membres de sa communauté de célébrer la Journée nationale des peuples autochtones en petits comités alors que plusieurs cas de COVID-19 ont été répertoriés récemment au Yukon. (Vincent Bonnay/Radio Canada)

Surtout, Doris Bill espère que la journée sera l’occasion pour beaucoup de s’éduquer à propos de l’histoire des Autochtones du Canada, surtout après le traumatisme engendré par la localisation de 215 emplacements qui sont de possibles lieux de sépulture d’enfants au pensionnat de Kamloops.

« Nous vivons un moment très difficile, ajoute Doris Bill, mais plus nous en parlons, plus nous éduquons les gens. Je pense que ça nous aide également; ça nous aide à laisser échapper un peu de la douleur, de la colère, de la frustration que nous ressentons depuis très longtemps. »

Activités alternatives

À Dawson, les célébrations annuelles du 21 juin donnent lieu tous les ans, en plus des performances, à une cérémonie de dénomination traditionnelle pour les nouveau-nés, un moment fort de l’événement, dit la cheffe de la Première Nation Tr’ondëk Hwëchin, Roberta Joseph.

La cheffe de la Première Nation Tr’ondëk Hwëch’in, Roberta Joseph, est déçue qu’une partie des activités prévues pour la Journée nationale des peuples autochtones doivent être annulées. (Photo : CBC)

Elle explique que le centre culturel de la Première Nation a tout de même organisé une chasse au trésor et que la radio communautaire locale diffusera lundi un balado pour célébrer la journée.

« Il fallait trouver un moyen pour souligner la Journée nationale des peuples autochtones, dit la cheffe. C’est vraiment important pour nos nations. »

Des restrictions chez les Premières Nations

Plusieurs Premières Nations du Yukon, comme les Kwanlin Dün, les Vuntut Gwitchin et les Carcross-Tagish, ont imposé des restrictions pour leurs membres et, surtout, pour les visiteurs, afin de freiner la propagation de la COVID-19.

Même si la source de l’éclosion annoncée dimanche reste inconnue, les autorités sanitaires ont lié la hausse des cas aux récentes cérémonies des finissants du secondaire, dont les finissants autochtones.

Avec des informations de Claudiane Samson et Vincent Bonnay

Laureen Laboret, Radio-Canada

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