Le programme de remplacement des brise-glaces canadiens atteindrait 7,25 milliards de dollars
Dans une analyse financière indépendante publiée par le directeur parlementaire du budget, on apprend que le coût total de la conception à la mise en service des deux nouveaux brise-glaces lourds de la Garde côtière atteindra 7,25 milliards de dollars.
Annoncé en 2008 pour renforcer la présence canadienne dans l’Arctique, ce programme vise à remplacer la flotte vieillissante de brise-glaces polaires (lourds) par deux navires modernes capables d’ouvrir des voies de navigations dans les eaux de l’Arctique qui sont de plus en plus convoitées, notamment par la Russie, les États-Unis, le Danemark et même la Chine.
À l’origine, le Diefenbaker, premier des deux brise-glaces entièrement conçus et construits au Canada, devait prendre la mer en 2017. Aujourd’hui, sa mise à l’eau est attendue quelque part en 2030, si tout va bien.
Selon le rapport du directeur parlementaire du budget (DPB), Yves Giroux, lors de la dernière estimation du programme faite par le gouvernement fédéral, en 2013, le coût total du premier bateau était estimé à 1,3 milliard de dollars. Le programme n’a jamais été réévalué après la commande d’un deuxième brise-glace polaire identique. Le coût de chaque navire serait aujourd’hui de 3,6 milliards, selon les estimations de M. Giroux.
Le premier bateau doit être construit par le chantier Seaspan’s Vancouver Shipyards, alors que la construction du deuxième devrait être confiée au chantier Davie de Québec.
Si on tient compte des commandes de 15 nouvelles frégates, de deux ravitailleurs, des patrouilleurs arctiques et du renouvellement de six brise-glaces plus légers, qui font concurrence au programme des brise-glaces lourds dans les chantiers navals, le DPB estime que la construction du premier des deux navires devrait commencer en 2023-2024 et le second en 2024-2025. La livraison des deux bâtiments devrait avoir lieu de 2029 à 2031.
« Selon une analyse de sensibilité, si le début de la construction des deux navires dans chacun des chantiers navals partenaires est retardé d’un an ou deux, le coût total du projet pourrait augmenter de 235 millions de dollars ou de 472 millions de dollars, respectivement », prévient cependant Yves Giroux.
En attendant, les besoins dans l’Arctique sont assurés par le NGCC Terry Fox et le NGCC Louis S. St-Laurent, dont la durée de vie utile est prolongée à grands frais en attendant des navires plus modernes.
La construction de navires capables de patrouiller et d’évoluer dans les eaux difficiles de l’Arctique revêt une importance stratégique pour le Canada, qui doit proclamer et maintenir sa souveraineté dans le passage du Nord-Ouest, qui devient de plus en plus navigable en raison de la fonte des glaces due aux changements climatiques. Ce qui en fait une route potentielle hautement convoitée par les puissances étrangères.
L’entrée en service de six nouveaux patrouilleurs extracôtiers de la Marine royale canadienne, adaptés aux glaces, a commencé cette année, mais ces bâtiments, plus petits, n’ont pas les capacités ni le rôle des grands brise-glaces polaires de la Garde côtière.
Le Canada en retard dans l’Arctique
La Russie investit massivement dans la modernisation et l’expansion de sa flotte arctique avec la construction d’une série de brise-glaces nucléaires. Les Danois, qui possèdent le Groenland, patrouillent quant à eux dans l’Arctique avec des navires modernes.
Les États-Unis, de leur côté, développent une flotte de nouveaux brise-glaces qui doivent commencer à naviguer en 2024 dans les eaux de l’Arctique.
Même la Chine, qui ne possède aucun territoire en zone arctique, a confirmé ses ambitions dans les eaux polaires avec la construction d’une flotte de brise-glaces.
Le Canada, de son côté, reste en mode rattrapage avec un programme de navires polaires plombé par la guerre que se livrent les chantiers canadiens, une stratégie nationale hésitante sur les mers et les batailles politiques régionales au sein du gouvernement.