Dans le Grand Nord canadien, transmettre le savoir autochtone aux jeunes une vidéo après l’autre

Jocelyn Joe-Strack souhaite créer un pont entre le savoir autochtone et universitaire, et la jeune génération grâce à TikTok. (Vincent Bonnay/Radio-Canada)
Jocelyn Joe-Strack est titulaire de la chaire de recherche sur les connaissances autochtones à l’Université du Yukon, un poste qui ne semble pas, à première vue, la destiner à devenir une experte des réseaux sociaux. Pourtant, c’est l’une des 30 personnes au Canada à utiliser l’accélérateur TikTok pour les créateurs autochtones.

Le postulat de départ est assez simple : « Je travaille avec beaucoup de jeunes et ils n’en avaient que pour TikTok. » Jocelyn Joe-Strack, membre de la Première Nation Champagne et Aishihik, est scientifique, microbiologiste et hydrologue de formation, et c’est la raison pour laquelle la curiosité l’a poussée à explorer le phénomène TikTok.

« Je ne suis pas vraiment une grande amatrice des réseaux sociaux, mais, un jour, je me suis dit qu’il fallait que je regarde cela de plus près. » Elle a donc ouvert l’application et commencé à faire défiler les pages.

J’ai réalisé qu’il y avait beaucoup de trucs stupides avant de découvrir tous les créateurs autochtones et les mots-clics #indigenoustiktok ou #nativetiktok.Jocelyn Joe-Strack

Elle s’est alors rendu compte qu’il existait toute une communauté au sein de laquelle elle pouvait se projeter. Après quelque temps, passé l’appréhension, elle s’est lancée, racontant des histoires, publiant des fragments de son quotidien tout en essayant d’être elle-même. Quelques mois plus tard, son compte auntyjocey avait près de 25 000 abonnés.

Étant proche de la fin de la trentaine, elle n’est donc pas de la nouvelle génération qui a grandi avec les réseaux sociaux, mais elle s’est prise au jeu et affirme que la plupart des réponses sont positives et que les gens s’intéressent et posent des questions afin d’en savoir plus sur le savoir des Premières Nations et les connaissances autochtones de la terre.

«Je me vois plus comme une tante pour beaucoup de jeunes avec qui je fais du mentorat, je prends soin d’eux, partage des enseignements de la vie, mais aussi du savoir plus universitaire et autochtone», explique Jocelyn Joe-Strack. (Vincent Bonnay/Radio-Canada)

Ses connaissances et le contenu qu’elle publie lui ont permis d’être retenue par le National Screen Institute et TikTok Canada pour leur Indigenous accelerator. C’est un programme de 6 semaines pour tout apprendre de la création vidéo avec l’aide de créateurs autochtones reconnus qui a des millions d’abonnés au compteur.

Il y a de nombreux moments où je me sens dépassée, mais en même temps emballée, à l’idée d’être suffisamment cool pour être dans l’air du temps sur TikTok.Jocelyn Joe-Strack

La cadre universitaire peut sembler rigide, mais ce n’est pas le cas de l’Université du Yukon, qui la soutient dans sa démarche, car une partie de son rôle est « de mobiliser la connaissance ». « Je dois créer des ponts entre les systèmes de connaissances », explique-t-elle.

À ce titre, elle s’engage pour la résurgence de la vision et des façons de faire autochtones : « TikTok s’est avérée une plateforme fantastique où je peux simplement partager un peu de ma démarche pour rassembler les connaissances, la culture du partage et l’enseignement entre les jeunes et des aînés et autochtoniser les établissements universitaires. »

Un autre bienfait de ce nouveau médium, selon elle, est sa concision. « J’ai fait beaucoup de discours publics sur des sujets comme les solutions autochtones aux changements climatiques, les inégalités. Avec TikTok, j’avais le sentiment de devoir remplacer une présentation de 45 minutes par une version condensée de 30 secondes, mais, en fait, ce sont juste des moments où j’ai quelque chose à exprimer, que ce soit un instant de vie, une pensée, ou un beau sentiment à partager. »

Je crois que la spiritualité ou les arts peuvent être bien mieux transmis sur quelque chose comme TikTok qu’à travers un article ou Twitter.Jocelyn Joe-Strack

À travers son travail universitaire, elle souhaite revitaliser la culture de la narration traditionnelle du Yukon, car elle est convaincue de la force des histoires des ancêtres et des aînés, et que selon elle, « entendre ces histoires peut aider à changer le regard d’une personne sur la vie, simplement en découvrant juste une histoire ».

Vincent Bonnay, Radio-Canada

Vidéojournaliste au Yukon pour Radio-Canada

Vous avez remarqué une erreur ou une faute ? Cliquez ici !

Laisser un commentaire

Note: En nous soumettant vos commentaires, vous reconnaissez que Radio Canada International a le droit de les reproduire et de les diffuser, en tout ou en partie et de quelque manière que ce soit. Veuillez noter que Radio-Canada ne cautionne pas les opinions exprimées. Vos commentaires seront modérés, et publiés s’ils respectent la nétiquette.
Nétiquette »

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *