Une mésentente avec l’Alaska sonne le glas de la course Yukon Quest 1000
Le conseil d’administration qui gère la partie yukonnaise de la course de chiens de traîneau Yukon Quest se dit très déçu de la décision prise par ses homologues alaskiens d’annuler leur partenariat après que les deux parties ont échoué à se mettre d’accord sur des règles de repos pour les chiens.
Cette mésentente signe la fin de la course mythique de 1000 milles (1610 kilomètres) telle qu’elle existe depuis 1984.
La Yukon Quest est organisée chaque année par deux organismes à but non lucratif : la Yukon Quest International Association, du côté canadien, et la Yukon Quest International Ltd, du côté américain. À cause de la pandémie, plusieurs courses de distances différentes ont été organisées cette année des deux côtés de la frontière. En 2021, la Yukon Quest avait été annulée.
Lundi, la partie alaskienne a fait savoir par voie de communiqué que les deux organismes étaient « incapables de s’entendre sur des propositions de changements de règlements importants relatifs à la course et qui s’appliqueront dès 2023 ».
Dans un communiqué publié mardi, l’entité yukonnaise se dit « en désaccord catégorique avec l’évaluation de cette situation ».
Selon les Canadiens, cette annonce est faite alors que les deux organismes étaient en pleine négociation sur les soins apportés aux chiens pour les courses futures. Ces discussions ont commencé dès la fin des courses de cette année.
La Yukon Quest International Association explique que, lors d’une réunion à la fin du mois d’avril, elle a accepté d’organiser la course de 1610 kilomètres de 2023 en utilisant les règles de 2020, comme l’ont demandé les Alaskiens, mais en exigeant que des données supplémentaires soient recueillies.
Elles concernent les intervalles de course et de repos et la fiabilité des traceurs, le décompte de l’équipement vétérinaire utilisé pendant la course, ainsi que la prise en considération de l’ajout d’un contrôle vétérinaire obligatoire supplémentaire.
« Ces informations supplémentaires seraient utilisées à l’avenir pour prendre des décisions éclairées et scientifiques sur la meilleure façon d’améliorer la santé des chiens avant, pendant et après les courses. »
Le conseil d’administration yukonnais ajoute que ces demandes ne représentaient pas des conditions pour la tenue des courses de la Yukon Quest en 2023. Il affirme aussi que les changements proposés n’auraient pas modifié la nature de la course.
Il précise néanmoins qu’il doit continuer d’en examiner les règles et les règlements, notamment dans la mesure où elles ont des conséquences sur les chiens.
« Les courses telles que la Yukon Quest ont le devoir et la responsabilité de montrer l’exemple dans la communauté plus large des conducteurs de traîneaux à chiens, en mettant l’accent sur la santé des chiens. »
Le communiqué précise que, malgré tout, des courses de 161 kilomètres (100 milles), de 402 kilomètres (250 milles) et de 724 kilomètres (450 milles) se tiendront à partir du 18 février du côté yukonnais de la frontière.
Opposition de valeurs
Frank Turner, un ancien meneur de traîneaux à chiens qui siège au conseil d’administration du côté canadien, ne cache pas sa déception devant la situation qu’il qualifie de « sorte de divorce ».
Il croit qu’une culture différente de part et d’autre de la frontière est en partie à la source du désaccord.
Il explique que ses collègues canadiens et lui souhaitaient mettre davantage l’accent sur la santé des chiens. Un membre du conseil d’administration alaskien leur a alors répondu qu’ils adoptaient trop rapidement une position progressiste.
« Nous avons essayé d’évoquer nos préoccupations et de leur suggérer de mentionner les leurs ainsi que leur vision pour la Quest. Tout ce que nous avons eu en retour, c’est cette réponse : « Nous ne voulons pas de changement. Nous voulons que cela reste comme cela a toujours été. » »
Mark Weber, le vice-président de l’organisme alaskien de la course, pour sa part, affirme qu’il ne refuse pas catégoriquement toute modification aux règlements. Il estime que le problème vient du fait que le conseil yukonnais n’est pas passé par les procédures et les règles établies par l’organisme.
« En gros, on nous a mis face à un ultimatum », soutient-il, ajoutant que son organisme a refusé à l’unanimité les changements « radicaux » proposés.
« À ce moment-là, le président de la course nous a dit qu’on allait dissoudre l’organisme parce qu’il n’y avait aucune chance qu’il participe à ce projet de quelque manière que ce soit », dit Mark Weber.
Il ajoute que le repos obligatoire pour les équipes demandé par le Yukon se traduisait par 120 heures, quand une année typique de course requiert un repos total de 52 heures.
Mark Weber affirme que, ces dernières années, les courses sont centrées sur le bien-être des chiens et des équipes en général. « En ce qui nous concerne, nous comptons sur le professionnalisme du personnel vétérinaire, des commissaires de course et des meneurs eux-mêmes pour réglementer le temps de repos, les conditions et le souci de la sécurité des animaux. »
Son conseil d’administration travaille dans le but d’organiser une Yukon Quest 1000 du côté alaskien pour l’hiver 2023.
Avec des informations de Claudiane Samson et de Paul Tukker