L’action climatique nettement insuffisante, notamment pour l’Arctique, selon un rapport présenté à Stockholm

Selon le dernier rapport du GIEC, les glaces de l’océan Arctique pourraient presque disparaître au moins une fois durant l’été d’ici l’an 2050. (David Goldman/Associated Press)
L’humanité doit rapidement combler le « fossé de 50 ans » entre les intentions, les moyens et les gestes pour empêcher que le climat de la Terre ne franchisse des « points de non-retour », notamment dans l’Arctique, selon un rapport dévoilé au Sommet de la Terre à Stockholm.

Le rapport (en anglais), intitulé Stockholm+50 : les clés d’un avenir meilleur, a servi de base de réflexion aux dirigeants réunis dans la capitale suédoise ces derniers jours. 

Il se veut un appel senti à l’action pour les citoyens, les chefs d’État et les entreprises.

« Aujourd’hui, nous pouvons voir que le bilan des actions n’est pas à la hauteur des ambitions d’il y a un demi-siècle », peut-on lire dans le document de quelque 160 pages.

« Notre évaluation du cadre de l’action environnementale conçue en 1972 montre que, si les connaissances, les objectifs et les accords n’ont fait que se multiplier, les mesures internationales d’accompagnement – financement, coopération technique et organisations dotées de mandats forts – restent trop faibles pour atteindre les objectifs et mener à des actions conformément avec nos connaissances. » 

En 1972, les participants au premier sommet sur l’environnement à Stockholm avaient adopté une série de principes pour une gestion écologiquement rationnelle de l’environnement, dont la déclaration de Stockholm et le Plan d’action pour l’environnement. Les dirigeants mondiaux s’étaient ensuite donné rendez-vous tous les 10 ans dans le but de faire le point sur l’état de la planète.

« Jusqu’à présent, seulement environ un dixième des objectifs environnementaux et de développement durable ont été atteints, et les résultats et les impacts pour une planète plus saine restent insuffisants », poursuit le document, qui est le fruit du travail du Conseil de l’énergie, de l’environnement et de l’eau (CEEW), une institution de recherche à but non lucratif basée en Inde, et de l’Institut de Stockholm pour l’environnement (SIE), un institut de recherche et d’élaboration de politiques, basé en Suède.

Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, à gauche, le président kényan Uhuru Kenyatta, au centre, et la première ministre suédoise Magdalena Andersson assistent au sommet des Nations unies sur le climat à Stockholm, le 2 juin. (Jessica Gow/TT/AP)

La prochaine décennie sera cruciale, note le rapport, notamment pour éviter que des points de basculement ou de non-retour ne soient franchis et entraînent le climat dans une spirale de réchauffement irrémédiable. 

Ces points de basculement sont entre autres la disparition de la glace sur l’océan Arctique, la fonte de la calotte glaciaire au Groenland et en Antarctique, la fonte du pergélisol, la disparition de la toundra et la transformation de la forêt boréale en Amérique du Nord et en Eurasie. 

À ces changements majeurs aux pôles, il faut ajouter la perte de forêts tropicales et de grands bouleversements que subiront des régulateurs du climat planétaire comme le phénomène El Niño.

Cela survient au moment où les humains n’ont jamais émis autant de dioxyde de carbone. Les niveaux de concentration de ce gaz à effet de serre dans l’atmosphère sont 50 % plus élevés que la moyenne de l’ère préindustrielle, selon les derniers chiffres de la NOAA dévoilés vendredi.

Des clés pour agir

« L’incohérence des politiques, la faiblesse du multilatéralisme et le manque de responsabilité doivent être résolus pour permettre une action efficace », souligne le rapport à grands traits.

Reconnaître les conflits d’intérêts, renforcer la coopération et réduire les rapports inégalitaires entre le Nord et le Sud, riches et pauvres, et accélérer les transferts technologiques sont toutes des actions incontournables, selon le rapport.

Nous sommes passés d’une situation où, en 1972, le sous-développement et la rareté étaient des moteurs d’exploitation non durable des ressources à un modèle dans lequel le surdéveloppement et la richesse épuisent les ressources de la Terre, est-il précisé.

Exploitation minière (Chris Wattie/Reuters)

Le document, qui contient également une synthèse des connaissances climatiques actuelles, met de l’avant une vingtaine d’actions, dont : 

  • revoir l’impact nos chaînes de production et d’approvisionnement;
  • redéfinir les besoins et les attentes par rapport aux produits de consommation;
  • rendre faciles et accessibles les modes de vie durables (en faire la norme);
  • réformer le secteur de la finance pour le rendre durable et responsable;
  • mobiliser des financements privés adéquats pour l’action climatique;
  • reverdir les villes;
  • développer et investir dans l’éducation basée sur la nature et le contact avec le milieu naturel;
  • assurer un bien-être et une prospérité pour tous.
Mettre à profit le savoir et l’expertise des peuples autochtones

Une section du rapport appelle à reconnaître les connaissances locales autochtones et les « droits de la nature » pour lutter adéquatement contre les changements climatiques et préserver l’environnement.

Une plus grande reconnaissance des savoirs autochtones « peut redéfinir notre relation avec la nature, grâce à une conservation plus efficace de la nature, et une gouvernance environnementale plus juste », est-il mentionné.

« Malgré la reconnaissance dans les accords internationaux de l’importance des connaissances traditionnelles ou autochtones pour la conservation de la diversité biologique et culturelle, peu de politiques nationales les incluent explicitement », souligne le document.

De plus, « l’attribution de droits légaux à la nature peut être un moyen de limiter l’extraction des ressources, mais peut aussi conduire à la reconnaissance des valeurs intrinsèques de la nature et au changement de comportement au fil du temps ».

Le rapport prône ainsi l’attribution de la personnalité juridique à la nature pour assurer une meilleure protection du monde naturel.

« L’accent dans les lois serait mis sur les intérêts de la nature (dont font partie les humains) plutôt que sur les intérêts des humains », est-il mentionné.

Le rapport cite notamment les cas de l’Équateur et de la Bolivie qui ont incorporé les droits de la nature dans leur Constitution. La Nouvelle-Zélande a aussi fait des avancées à ce sujet. 

En Colombie, la rivière Vilcabamba, en tant qu’entité juridique, a gagné en cour en 2011 lors d’un litige concernant un projet de développement qui aurait substantiellement changé son cours, cite le rapport. 

L’élevage de rennes, pratiqué de manière ancestrale par les Samis, est une forme de pratique culturelle protégée. (Photo : Stoyan Nenov/Reuters)

Trop souvent encore, les projets de développement font fi des droits autochtones, notent les auteurs, et ne sont donc pas menés dans une optique de développement durable.

Par exemple, en Scandinavie, des projets miniers ou encore de construction d’éoliennes viennent compromettre les intérêts des Samis. On note un manque de consultation, la fragmentation des terres et des impacts négatifs sur les élevages de rennes.

La reconnaissance des savoirs autochtones et de droits à la nature, en plus d’aider à combattre les changements climatiques, peut faciliter l’autodétermination des peuples, estiment les auteurs.

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