Élections québécoises : Inuit et Cris réagissent à la victoire de la CAQ dans Ungava
Les attentes sont grandes dans les communautés inuit et cries de la circonscription d’Ungava au lendemain de la victoire décisive de Denis Lamothe, de la Coalition avenir Québec (CAQ).
La grande cheffe de la Nation crie d’Eeyou Istchee, Mandy Gull-Masty, n’était pas surprise des résultats électoraux du 3 octobre.
Denis Lamothe a été élu avec une avance confortable de plus de 1000 voix, à l’image du succès de la Coalition avenir Québec aux élections provinciales.
Mandy Gull-Masty ne cache pas sa déception après la défaite de la candidate de Québec solidaire, Maïtée Labrecque-Saganash.
La militante crie, originaire de Waswanipi, est arrivée deuxième dans la course d’Ungava, avec 24 % des votes.
« J’aurais aimé avoir une représentante eeyou à l’Assemblée nationale. Elle aurait pu faire entendre la réalité de notre nation au gouvernement », explique Mandy Gull-Masty.
Quant au gouvernement réélu, Mandy Gull-Masty se dit optimiste. Elle trouve que les relations de travail avec le gouvernement Legault durant les quatre dernières années ont été positives.
Elle croit toutefois que le député d’Ungava devra bâtir davantage de liens avec sa nation dans son second mandat.
« Il devra être plus présent. De savoir que, dans son travail de député, il est là pour représenter tous les Québécois. Le mandat dernier, je ne l’ai pas souvent vu, et quand je l’ai vu, c’était pour des dossiers qui m’inquiétaient. Il y a une relation qui reste à bâtir avec la nation crie », explique-t-elle.
Bonnes relations, grandes attentes
Au Nunavik, le président de la Société Makivik, Pita Aatami, partage le sentiment de Mandy Gull-Masty.
Ce dernier dit aussi avoir eu des échanges constructifs ces dernières années avec le gouvernement Legault et le ministre des Affaires autochtones, Ian Lafrenière.
Il souhaite par contre que le député Denis Lamothe soit plus présent au Nunavik.
« Si tu représentes une communauté à l’Assemblée nationale, tu dois venir parler à ceux qui y vivent. Un élu doit être en mesure d’entendre nos besoins, qui sont nombreux », affirme Pita Aatami.
« Le logement, les infrastructures… On a besoin que le gouvernement fasse quelque chose à propos de ça, parce que, pour l’instant, il n’en fait pas assez », ajoute-t-il.
Le député d’Ungava n’a, en effet, pas pu visiter la région au courant de la campagne électorale en raison du décès de sa mère.
Les visites dans le nord du Québec ont aussi été rendues plus difficiles durant les deux dernières années, en raison de la pandémie de COVID-19.
Denis Lamothe assure toutefois qu’il va visiter le Nunavik en début de mandat.
« La pandémie, tu vas me dire qu’elle a le dos large, c’est certain. Mais le territoire était fermé, même en Jamésie pour un certain temps. Je vais aller dans la région, c’est certain », a-t-il déclaré au lendemain de sa victoire.
Faible participation
Un peu plus de 30 % de l’électorat d’Ungava s’est prévalu de son droit de vote cette année. Il s’agit d’une proportion similaire à celle du scrutin de 2018, et qui représente moins de la moitié de la moyenne provinciale.
Le député réélu reconnaît qu’il y a un problème.
« Je suis satisfait des résultats, mais c’est sûr qu’à 30 % on est en bas de la moyenne provinciale. Ça serait de regarder ce qu’on peut faire pour améliorer la participation d’ici quatre ans », explique Denis Lamothe.
Selon la grande cheffe crie Mandy Gull-Masty, le phénomène est encore plus criant dans les communautés cries.
Elle précise que la barrière de la langue et le fait que les élections se déroulent en même temps que la chasse à l’orignal traditionnelle continuent d’avoir un impact sur la participation dans sa nation.
« Il y a une grande portion de la population qui est partie dans le bois. Ils sont dans une activité culturelle. C’est très rare qu’ils sortent de la forêt dans ce cas-là. Les résidents ne se reconnaissent pas beaucoup dans l’élection », explique Mandy Gull-Masty.
La faible participation des Inuit du Nunavik est aussi un phénomène que constate le président de la Société Makivik, Pita Aatami.
« Les gens trouvent que ça ne vaut pas la peine de voter, dit-il. La seule option que je vois pour que la circonscription soit vraiment représentative, c’est qu’on puisse avoir notre propre circonscription. C’est sûr que je vais pousser pour que ça arrive un jour. »
En attendant un éventuel redécoupage électoral, les communautés cries et inuit d’Ungava souhaitent poursuivre le travail avec le gouvernement du Québec.
Une table de concertation qui unit les deux nations, ainsi que les Naskapis, a par ailleurs été créée récemment.
Les deux groupes espèrent favoriser les échanges entre eux et faire entendre d’une même voix leurs besoins auprès du gouvernement du Québec.