Nord québécois : des candidats autochtones défaits demandent une réforme électorale

Le candidat libéral Tunu Napartuk avait dû attendre deux semaines après le début de la campagne électorale pour recevoir ses pancartes à Kuujjuaq. (Félix Lebel/Radio-Canada)
D’anciens candidats aux dernières élections provinciales du Québec soulèvent les problèmes que rencontrent les Autochtones quand vient le temps de s’exprimer dans l’isoloir. Ils appellent à une réforme.

Maïtée Labrecque-Saganash et Tunu Napartuk se sont tous les deux présentés dans la circonscription d’Ungava, dans le nord du Québec, aux dernières élections provinciales du 3 octobre.

Et encore une fois, le taux de participation dans Ungava a été le plus bas de toute la province. Il s’élevait à environ 30 %, tandis qu’il était de 66 % au niveau provincial.

M. Napartuk et Mme Labrecque-Saganash affirment que ce faible taux de participation est le résultat direct d’obstacles systémiques liés à la façon dont les élections se déroulent dans la province. Selon eux, ce n’est pas la preuve d’un désintéressement des électeurs.

La candidate de Québec solidaire dans Ungava, Maïtée Labrecque-Saganash, avec la grande cheffe de la nation crie, Mandy Gull-Masty, et le grand chef adjoint Norman A. Wapachee. (Photo fournie par Québec solidaire)

« Ces [obstacles] soutiennent un faux récit selon lequel nous ne nous intéressons pas à la politique, mais la réalité est que beaucoup de gens ont été refoulés aux urnes », a déclaré Mme Labrecque-Saganash, ancienne candidate de Québec solidaire (QS), qui vit dans la communauté crie de Waswanipi.

Dans les jours qui ont suivi l’élection, les communautés cries ont rapporté que des électeurs n’avaient pas pu voter, alors que cela avait été possible lors des élections provinciales précédentes. Au Nunavik, des cartes d’électeurs sont arrivées en retard, voire pas du tout.

Les bureaux de vote de la circonscription d’Ungava ont fermé leurs portes à 20 h le 3 octobre dernier. (Félix Lebel/Radio-Canada)

« Le Québec a été la dernière province à accorder le droit de vote aux Autochtones en 1969. Le fait qu’il soit encore si difficile pour nous de voter est pour moi très révélateur », a ajouté Mme Labrecque-Saganash.

Tunu Napartuk, qui s’est présenté pour le Parti libéral du Québec, a affirmé qu’il était personnellement au courant qu’au moins 50 électeurs n’ont pas pu voter à Kuujjuaq. Selon lui, il y a des histoires similaires dans toutes les communautés du Nunavik.

« Ce sont des gens qui sont des résidents permanents. Ils sont nés, ont été élevés et ont continué à vivre dans leur communauté. Ils ont toujours voté », a-t-il indiqué.

M. Napartuk a mentionné que les irrégularités et les défaillances du système électoral dans le Nord sont « malheureuses et décourageantes ». Il a demandé à Élections Québec de faire mieux.

Selon lui, l’entité chargée de superviser les élections doit embaucher des travailleurs locaux parlant l’inuktitut et le cri et établir des lignes de communication au moins un an avant les élections.

Il a également indiqué que les équipes de révision doivent être à l’œuvre dans les communautés autochtones plusieurs mois avant le jour du scrutin, et non la semaine précédente, comme c’est le cas actuellement.

Tunu Napartuk se présentait sous la bannière libérale. (Félix Lebel/Radio-Canada)

« Il faut avoir une certaine ouverture. [Élections Québec] ne peut pas s’attendre à ce que son personnel soit capable d’établir ces liens quelques jours avant le jour du scrutin », a-t-il ajouté.

Certains observateurs suggèrent que le Québec doit également permettre aux citoyens d’être ajoutés à la liste électorale le jour même d’une élection, comme cela est permis pour les élections fédérales, en présentant deux pièces d’identité et une preuve d’adresse et en prêtant serment.

Selon M. Napartuk, cela pourrait aider certains électeurs autochtones. Il prévient que cela ne résoudra pas le problème pour tout le monde, car de nombreux électeurs du Nunavik n’ont pas de photo sur leur carte d’assurance maladie parce qu’il est difficile d’obtenir une photo admissible.

Maïtée Labrecque-Saganash a terminé deuxième lors des dernières élections provinciales. (Twitter)

« Le fait d’avoir les pièces d’identité appropriées pour pouvoir prouver qui ils sont est en soi un énorme défi », a déclaré M. Napartuk. Il suggère qu’Élections Québec devrait plutôt envisager de nommer des représentants de chaque communauté qui pourraient être autorisés à se porter officiellement garants des électeurs.

M. Napartuk estime également que les communautés cries et inuit du nord du Québec devraient avoir leur propre circonscription. L’Ungava est la plus grande circonscription du Québec et couvre 855 000 kilomètres carrés.

Réponse d’Élections Québec

CBC a demandé une entrevue avec le directeur général de la province, Pierre Reid, mais Élections Québec a refusé.

La porte-parole Julie St. Arnaud-Drolet a déclaré que l’organisme a mis en place un comité de travail composé de représentants de grandes circonscriptions électorales, dont Ungava, pour « examiner, entre autres, les obstacles au vote dans les communautés autochtones ».

Le caquiste Denis Lamothe (à droite) a été réélu dans la circonscription d’Ungava. (Sylvain Roy Roussel/Radio-Canada)

« Nous sommes toujours en train de faire le bilan de l’élection du 3 octobre. Au cours des prochaines années, nous allons préciser les nouvelles procédures qui seront mises en place pour l’élection générale de 2026 », a déclaré Mme St-Arnaud Drolet, ajoutant qu’Élections Québec ne peut pas mettre en œuvre une réforme électorale de son propre chef, mais peut répondre à une demande du gouvernement provincial.

Le ministre des Affaires autochtones du Québec, Ian Lafrenière, n’a pas répondu aux demandes de commentaires sur l’ouverture du gouvernement à une réforme.

D’après un article de Susan Bell, de CBC

Radio-Canada

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