Les rejets en carbone de la biomasse en décomposition des rivières de l’Arctique plus importants que prévu

Robert Spencer prélève des échantillons du fleuve Yukon dans le village yupik de Pilot Station, en Alaska, au plus fort du dégel printanier. (Robert Spencer, Université de l’État de Floride)
Une nouvelle étude dirigée par des chercheurs de l’Université d’État de Floride a révélé que les plantes et les petits organismes des rivières arctiques pourraient être responsables de plus de la moitié des matières organiques particulaires qui se déversent dans l’océan Arctique.

Il s’agit d’une proportion nettement plus importante que celle estimée précédemment, qui a des répercussions sur la quantité de carbone qui est piégée dans l’océan et sur celle qui se retrouve dans l’atmosphère, souligne l’étude publiée lundi dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences.

Le cycle du carbone dans l’environnement est un élément essentiel de la vie sur la planète. À ce titre, les experts rappellent que la compréhension des différentes sources et réservoirs de carbone est l’un des principaux axes de la recherche en sciences de la Terre. Les plantes et les animaux utilisent cet élément pour leur croissance cellulaire.

« Il peut être stocké dans les roches et les minéraux ou dans les océans. Sous forme de dioxyde de carbone, le carbone peut se déplacer dans l’atmosphère, où il contribue au réchauffement de la planète », stipule le document.

Les scientifiques ont longtemps mesuré la matière organique dans les rivières pour comprendre le cycle du carbone dans les bassins hydrographiques. Mais l’étude explique que les organismes présents dans les principaux cours d’eau de l’Arctique jouent un rôle crucial dans l’exportation du carbone, puisqu’ils sont responsables d’environ 40 à 60 % de la matière organique particulaire – de minuscules morceaux d’organismes en décomposition – qui s’écoule dans l’océan.

« Lorsque l’on pense à ces grands fleuves arctiques et à de nombreux autres fleuves dans le monde, on a tendance à les considérer comme les égouts de la terre, exportant les déchets de la production primaire et de la décomposition sur terre », a déclaré Rob Spencer, professeur au Département des sciences de la Terre, des océans et de l’atmosphère.

Cette étude montre qu’il y a beaucoup de vie dans ces rivières et qu’une grande partie de la matière organique exportée provient de la production des rivières.Rob Spencer, professeur

Les experts étudient le carbone exporté par les cours d’eau afin de mieux comprendre le cycle de cet élément dans l’environnement. Lorsque les matières organiques se décomposent sur terre, elles peuvent passer dans les rivières, qui se jettent à leur tour dans l’océan. Une partie de ce carbone alimente la vie marine, tandis qu’une autre s’enfonce au fond de l’océan, où elle est enfouie dans les sédiments.

Les scientifiques ont étudié les six principaux fleuves qui se jettent dans l’océan Arctique : le Yukon et le Mackenzie en Amérique du Nord, et l’Ob, l’Ienisseï, la Lena et la Kolyma en Russie. (Vincent Robinet/CBC)
Arrêt sur les fleuves du Canada et de la Russie

Pour mener à bien leurs recherches, les scientifiques ont étudié les six principaux fleuves qui se jettent dans l’océan Arctique : le Yukon et le Mackenzie en Amérique du Nord, et l’Ob, l’Ienisseï, la Lena et la Kolyma en Russie.

À l’aide de données recueillies pendant près d’une décennie, ils ont construit des modèles sur la matière organique particulaire pour déterminer la contribution des sources possibles à la chimie de chaque rivière.

Les observations indiquent que toutes les matières organiques particulaires ne sont pas égales. Le carbone provenant des sols qui est emporté en aval est plus susceptible d’être enfoui dans l’océan que le carbone produit dans une rivière, notent les experts. Ce carbone a plus de chances de rester en suspension dans l’océan, d’être mangé par les organismes qui s’y trouvent et d’être finalement expiré sous forme de dioxyde de carbone.

« En tant que scientifique ou chercheur, je suis toujours enthousiaste lorsque nous découvrons de nouvelles choses, et cette étude a permis de découvrir quelque chose de nouveau dans le fonctionnement de ces grands fleuves arctiques et dans la manière dont ils exportent le carbone vers l’océan », a souligné M. Spencer.

L’étude en question a été menée à l’échelle internationale par des chercheurs de dix institutions différentes. « Nous devons comprendre le cycle moderne du carbone si nous voulons vraiment commencer à comprendre et à prédire comment il va changer. C’est particulièrement important pour l’Arctique, compte tenu de la vitesse à laquelle il se réchauffe et des vastes réserves de carbone qu’il renferme », a conclu l’expert.

Ismaël Houdassine, Regard sur l'Arctique

Ismaël Houdassine est diplômé en journalisme de l’Université de Montréal. Il commence sa carrière comme reporter et journaliste culturel. Avant de rejoindre l’équipe de Radio-Canada, il a collaboré durant plusieurs années pour plusieurs médias, notamment l’Agence QMI et Le HuffPost.

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