Sommet en Islande : Justin Trudeau dit vouloir éviter d’alimenter la propagande russe

Le premier ministre Justin Trudeau et le premier ministre norvégien Jonas Gahr Store s’adressent aux journalistes au musée Eldheimar, en marge de la réunion annuelle des premiers ministres des pays nordiques sur l’île de Vestmannaeyjar, en Islande, le 26 juin. (AFP via Getty images/Halldor Kolbeins)

Le premier ministre Justin Trudeau a déclaré lundi que le Canada surveillait avec attention les événements en Russie après le soulèvement de courte durée de la fin de semaine, mais il a ajouté qu’Ottawa adoptait une approche prudente pour éviter d’alimenter la propagande russe et la désinformation.

Un bref soulèvement armé en Russie, mené samedi par le dirigeant mercenaire Evguéni Prigojine, chef du groupe Wagner, a soudainement occupé une large place au cours d’un sommet de deux jours des dirigeants de pays nordiques, en Islande, auquel assistait M. Trudeau à titre d’invité.

Ces événements en Russie ont placé la sécurité en tête de l’ordre du jour du sommet, organisé autour du thème de la « résilience sociétale », sur le site d’une éruption volcanique survenue en 1973.

S’adressant aux journalistes lundi, M. Trudeau a déclaré que ce récent bouleversement au Kremlin constituait « un problème interne que la Russie devait résoudre », et il a promis son soutien constant à l’Ukraine. Plus tard dans la journée, il a expliqué pourquoi il avait adopté cette approche prudente.

« Nous surveillons, bien sûr, et nous réfléchissons attentivement à ce que pourraient être les implications en Ukraine ou ailleurs en Europe de l’Est, y compris en Lettonie, où des Canadiens sont actuellement stationnés […] Je pense qu’on sait que la Russie utilise énormément de désinformation, de propagande », a dit M. Trudeau.

Dans une vidéo, le président Vladimir Poutine a accusé lundi les « ennemis de la Russie » pour ce qui s’est passé en fin de semaine. 

Evguéni Prigojine, qui critique régulièrement les principaux généraux russes, a conduit ses troupes samedi à travers plusieurs villes russes, en direction de Moscou, mais il a soudainement changé d’avis, à la suite d’un accord présumé avec le président russe Vladimir Poutine, qui prévoyait son exil au Bélarus.

« C’est une situation qui préoccupe de voir ces défis à l’interne au niveau de la Russie […] Il s’agit évidemment d’un problème interne que la Russie doit résoudre, a ajouté M. Trudeau. Mais nous devons rester fermes, en continuant d’être forts, en faveur de l’Ukraine, en faveur de l’ordre fondé sur des règles. »

Il a soutenu qu’il valait mieux surveiller la situation et surtout ne pas intervenir. Il s’est entretenu dimanche avec le président américain, Joe Biden, et avec le président ukrainien, Volodymyr Zelensky.

M. Biden a mentionné plus tôt lundi que les États-Unis et l’OTAN n’étaient pas impliqués dans la brève insurrection. Il a également indiqué qu’il était prudent d’en parler publiquement, car il ne voulait pas donner au président Poutine une excuse pour montrer du doigt l’Occident et l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN).

La Suède à l’OTAN

La réunion islandaise avait lieu à deux semaines du sommet annuel des dirigeants des pays membres de l’OTAN, prévu pour la mi-juillet en Lituanie, que le premier ministre norvégien Jonas Gahr Store a qualifié « d’historique ».

M. Trudeau souhaite que la Suède soit officiellement admise dans l’alliance militaire avant ce sommet du 10 juillet.

L’OTAN a besoin de l’appui unanime de tous ses membres pour accueillir un nouveau pays dans ses rangs. La Turquie accuse la Suède d’être trop indulgente à l’égard des organisations qui, selon Ankara, constituent une menace pour sa sécurité, notamment les groupes militants kurdes, et des personnes associées à une tentative de coup d’État en 2016.

Le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, a révélé lundi qu’il convoquerait une réunion d’urgence, dans les prochains jours, pour surmonter les objections turques à l’adhésion de la Suède à l’alliance militaire

M. Trudeau a rencontré lundi en privé le premier ministre suédois, Ulf Kristersson, en marge du sommet islandais. Il a dit que le Canada « était fier » d’avoir été le premier pays à soutenir l’adhésion de la Suède. Le Canada a également été le premier à soutenir la Finlande, qui s’est officiellement jointe à l’OTAN en avril.

« Il reste encore beaucoup de travail à faire, a admis M. Trudeau. Nous devons nous assurer de vous faire entrer d’ici [le sommet de] Vilnius dans quelques semaines. »

Et l’environnement

Une autre crise a dominé l’ordre du jour des dirigeants nordiques : les changements climatiques et la protection de la glace et des océans de l’Arctique.

M. Trudeau et les autres dirigeants ont quitté la réunion en s’engageant à renforcer la collaboration sur une gamme de sujets, l’action climatique en tête.

Certains experts se sont inquiétés de la paralysie dans laquelle se trouve le Conseil de l’Arctique depuis que la Russie a envahi l’Ukraine au début de 2022. Les pays nordiques présents au sommet islandais, ainsi que le Canada et les États-Unis, se sont prononcés contre la coopération avec la Russie depuis le début de cette guerre.

Mathieu Landriault, directeur de l’Observatoire pour la politique et la sécurité de l’Arctique, affirmait la semaine dernière à La Presse canadienne que cette question demeurait « fragile ». Car sans la Russie, qui possède un immense littoral arctique, le Conseil manque d’informations sur la façon dont les changements climatiques touchent une grande partie de la région.

Des scientifiques précisent que c’est l’océan Arctique qui subit certains des effets les plus aigus du réchauffement de la planète. Des experts de la défense ajoutent que la fonte des glaces ouvre un nouvel accès à cette région, et ils rappellent que des puissances agressives comme la Russie et la Chine en prennent bonne note.

Un comité des Communes qui étudie l’Arctique a également entendu au moins un expert dire que le Canada devait garder ouverts les canaux diplomatiques avec Moscou sur des questions spécifiques comme les changements climatiques.

La chaise vide

M. Trudeau a soutenu qu’avant la guerre en Ukraine, les dirigeants étaient disposés à le faire, reconnaissant que la Russie pouvait être « un partenaire quelque peu constructif » en ce qui concerne l’Arctique et la protection de l’environnement.

« Lorsque nous parlions de la Syrie, lorsque nous parlions du comportement inquiétant de la Russie ailleurs, nous pouvions souvent le faire remarquer, sauf que nous continuons à essayer de travailler de manière constructive avec eux dans l’Arctique », a expliqué M. Trudeau.

Il a mentionné que l’invasion de la Russie et la décision du président Poutine de « rejeter l’ordre fondé sur des règles » et sur la Charte des Nations unies ont rendu cette collaboration plus difficile.

M. Trudeau a exprimé l’espoir de revenir à la collaboration avec Moscou. « Ce sera extrêmement difficile à faire tant qu’ils continueront d’envoyer des missiles et des bombes à Kiev, tant qu’ils continueront de tuer des Ukrainiens innocents, tant qu’ils continueront de commettre des crimes de guerre en Ukraine. »

« La Russie doit faire plus de travail sur le changement climatique, cela ne fait aucun doute, mais ce n’est pas l’une de ses priorités pour le moment », a constaté Justin Trudeau.

Pendant son séjour en Islande, il a pu visiter une installation de capture et de stockage du carbone nichée dans la campagne vallonnée.

Le gouvernement libéral a alloué des milliards au développement de technologies vertes et a exprimé un intérêt particulier pour le captage et le stockage du carbone comme solution pour réduire les émissions dans l’Ouest canadien, qui abrite l’industrie pétrolière et gazière du pays.

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