À quelques jours du scrutin, les électeurs de Yellowknife parlent d’enjeux sociaux

Le coût de la vie à la hausse et le manque de logements à Yellowknife font partie des enjeux de la campagne électorale territoriale. (Radio-Canada/Julie Plourde)

Durant la dernière étape de la campagne électorale aux Territoires du Nord-Ouest et à quelques jours seulement du scrutin, le 14 novembre, les électeurs de Yellowknife s’expriment sur les questions qui les préoccupent le plus : le logement, le coût de la vie et les services offerts à la population vulnérable du centre-ville.

C’est au centre-ville, dans la circonscription de Yellowknife Centre, que des électeurs croisés dans la rue s’expriment sur ce qui est important pour eux.

Reyhan Sarikaya, qui habite dans la capitale depuis plusieurs années et a trois enfants, remarque comme plusieurs que le coût de la vie à Yellowknife ne fait qu’augmenter.

En regardant ce qui se passe maintenant, on voit que l’essence est incroyablement chère. Notre facture d’épicerie est encore plus élevée […] C’est décourageant. – Reyhan Sarikaya, résidente de Yellowknife

Reyhan Sarikaya est une employée du gouvernement fédéral. Avec son mari, propriétaire d’une cantine, elle élève ses trois enfants à Yellowknife, où le coût de la vie a explosé, selon elle, depuis quelques années. (Radio-Canada/Sidney Cohen)

Son mari est propriétaire d’une petite cantine à l’aréna, un travail saisonnier. Avec son salaire de fonctionnaire et les revenus de son conjoint, Reyhan dit que c’est «très difficile» de joindre les deux bouts.

Un autre habitant de Yellowknife, Pauloosie Allooloo, vit de l’aide sociale et loue une chambre en ville. Pour lui, le coût de la vie «est vraiment trop» élevé.

Selon des données de 2021 du Bureau des statistiques des Territoires du Nord-Ouest, les ménages de Yellowknife paient 28 % de plus pour leur panier d’épicerie, et 47 % de plus pour leur logement, que les habitants du reste du pays.

Pauloosie Allooloo dit que l’une des solutions serait de construire plus de logements abordables.

Du logement pour les personnes âgées

À quelques rues du centre-ville, un chantier de construction de 102 logements abordables est justement en voie d’être achevé. Une fois terminé, au printemps 2024, le complexe Pavillon Avens sera le plus grand ensemble de logements abordables du territoire.

Ces logements seront réservés aux personnes de 55 ans et plus, un groupe démographique en forte croissance au territoire. Avec ses revenus fixes, cette population subit les contrecoups de la hausse du coût de la vie.

Le Pavillon AVENS offrira, au printemps 2024, 102 logements abordables avec des services de soutien pour les personnes de 55 ans et plus. La construction a été rendue possible entre autres grâce à un versement de 33,7 millions de dollars de la Société canadienne d’hypothèques et de logement. (Radio-Canada/Julie Plourde)

Selon un autre rapport publié par le Bureau des statistiques des T.N.-O. en 2021, le nombre de personnes de 60 ans et plus du territoire a grimpé de 148 % entre 2003 et 2021, comparativement à une hausse de 7 % dans la population générale.

Le projet est mené par le manoir AVENS, un complexe de logements subventionnés et non subventionnés offrant des services de soutien pour les personnes âgées. Son président et directeur, Daryl Dolynny, dit que, lors des travaux préliminaires en 2018 pour lancer le projet, son équipe a déterminé que la capitale avait besoin de 528 nouveaux logements pour répondre à la demande.

Une fois terminé, le Pavillon AVENS sera le plus grand ensemble de logements abordables aux Territoires du Nord-Ouest. (Radio-Canada/Julie Plourde)

Même si le complexe n’est pas encore prêt, le manoir a déjà reçu des centaines de demandes pour emménager dans ces logements.

Brian Macdonald, un aîné rencontré au centre-ville, se désole de voir qu’il y a si peu de logements adaptés pour les personnes âgées.

«Il devrait y en avoir plus pour les personnes âgées qui vivent ici toute leur vie et qui font leur part pour la communauté. Elles ne peuvent même pas se trouver de logement», dit-il.

Difficile de faire avancer les choses

Daryl Dolynny reconnaît que les besoins en logements abordables pour les personnes âgées ont longtemps été laissés de côté. C’est un groupe démographique qui était dans notre ligne de mire, mais je ne pense pas qu’on ait assez planifié pour s’adapter à lui, admet l’ancien député territorial de la circonscription de Range Lake.

D’ailleurs, depuis qu’il a quitté la politique, il remarque à quel point il est difficile de faire progresser le dossier du logement.

Pour en arriver à une première pelletée de terre, il a dû travailler fort pour obtenir du financement. Au coût de 45 millions de dollars, la construction du complexe n’aurait pas été possible sans l’apport de différents paliers de gouvernement.

«Ce projet ne va pas remplir tous les besoins qui existent à Yellowknife, mais au moins cela va grandement changer les choses. J’espère que d’autres compagnies, d’autres programmes, d’autres organisations vont voir que tu peux réussir», dit Daryl Dolynny.

Daryl Dolynny est le président et directeur du centre pour personnes âgées Avens Manor, à Yellowknife. Le projet de logements ne répondra pas à l’ensemble des besoins en logements de la ville, mais il espère qu’il améliorera les choses. (Radio-Canada/Julie Plourde)

Je pense que tout le monde veut faire quelque chose de positif pour avoir des programmes comme celui-là, mais il faut de l’investissement. Il faut que [la Ville, le territoire] et le fédéral travaillent collectivement. – Daryl Dolynny, président et directeur du manoir pour personnes âgées AVENS

Daryl Dolynny espère que la prochaine assemblée en fera une priorité. «Si les candidats qui viennent à ma porte n’ont pas comme priorité le logement abordable pour les personnes âgées […], ça va être vraiment dur d’avoir mon vote.»

L’itinérance, un autre problème de la capitale

Dans l’ombre des tours de bureaux du centre-ville, un autre groupe de personnes souffre du manque de logements abordables. Chaque soir, environ 300 personnes espèrent trouver un lit dans un refuge, mais il n’y a que 120 lits environ dans tous les refuges de la ville.

La circonscription de Yellowknife Centre est aussi celle qui retient l’attention, car c’est là que les services offerts à la population vulnérable sont surtout concentrés.

L’Armée du Salut de Yellowknife accueille entre 100 et 150 clients par jour. Le directeur de l’organisme, Tony Brushett, dit qu’il faut plus de services pour répondre aux besoins de la population itinérante. (Radio-Canada/Félix Lebel)

Le directeur de l’Armée du Salut de Yellowknife, Tony Brushett, a été choqué à son arrivée en poste, en juillet dernier. «Ça m’a un peu brisé quand je me suis rendu compte de la gravité de la situation ici », explique-t-il.

Je vis au centre-ville. Alors quand je marche ou que je roule autour, je vois des gens partout et je me demande où ils vont aller pour la nuit. On dirait que c’est disproportionné, ici, à Yellowknife, par rapport aux autres endroits où j’ai travaillé. -Tony Brushett, directeur de l’Armée du Salut de Yellowknife

Tony Brushett est le directeur de l’Armée du Salut à Yellowknife. En poste depuis juillet 2023, il dit qu’il a été choqué de voir à quel point la capitale ténoise est aux prises avec des problèmes criants d’itinérance. « Quand je suis arrivé ici, j’ai réalisé que c’est bien pire ici qu’ailleurs », dit-il. (Radio-Canada/Félix Lebel)

Tony Brushett dit que le refuge pour hommes de l’Armée du Salut est rempli à environ 120 % de sa capacité toutes les nuits et que les autres refuges de la ville sont dans la même situation.

Il craint aussi que le nombre de personnes vivant dans la rue n’augmente si aucune solution à plus long terme, comme du logement abordable, n’est pas mise de l’avant.

«Le pansement se décolle tout le temps et nous, avec les différents gouvernements, le remettons en place», dit-il de façon imagée.

Derrière ce fléau se profilent des problèmes de santé mentale et de dépendance pour lesquels très peu de services sont disponibles. Il n’y a aucun centre de traitement à long terme des dépendances dans le Nord. «Il serait essentiel d’ouvrir quelque chose avec 30, 40, 50 lits. Je sais que nous pourrions remplir 50 lits ce soir rien qu’avec notre clientèle», dit Tony Brushett.

Geneviève Charron vit à Yellowknife depuis de nombreuses années. (Radio-Canada/Félix Lebel)

Geneviève Charron, qui habite à Yellowknife depuis 18 ans, espère qu’on proposera des solutions pour aider ces personnes.

«Il y a beaucoup d’itinérance, il y a de grands besoins au niveau social et on est dans une situation où tout le monde se renvoie la balle, la Municipalité, le gouvernement. Et ultimement, ces gens-là continuent de souffrir et ça a, bien sûr, un impact sur toute la vie de notre ville.»

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